La fête est finie: pétrole, guerre et destin des sociétés industrielles

Les quartiers périurbains n’existeraient pas sans pétrole bon marché. Les Etats-Unis ont une culture automobile, l’industrie automobile a commencé aux Etats-Unis. Et elle a commencé ici parce qu’on cherchait des moyens d’utiliser ce pétrole bon marché. Les Etats-Unis étaient lessivés par le pétrole au début du 20ème siècle. Dans les années 30, ils le découvraient si vite que le pétrole au Texas était moins cher que l’eau potable et de loin.

Les constructeurs automobiles sont devenus rapidement la locomotive de la croissance de l’industrie et de l’économie américaine. Le résultat de ceci est que nous avons créé ce nouveau système d’habitation où les gens vivent à des kilomètres d’où ils travaillent, d’où ils achètent leur nourriture et toutes leurs autres nécessités. Ce mode de vie est basé sur l’idée que les gens peuvent et doivent utiliser leur voiture n’importe quand et rouler des kilomètres et des kilomètres.

Et le seul moyen que ce système marche repose sur une énergie pas chère et abondante, le pétrole.

Quand les gens pensent au pétrole, ils pensent: quand va-t-on être à court de pétrole? En fait, c’est la mauvaise question à poser parce que le pétrole dans la terre n’est pas comme l’essence dans le réservoir de la voiture. Quand la voiture tombe en panne d’essence, alors on sait qu’il y a un problème. Mais elle ne s’arrête pas avant les dernières gouttes.

Par contre, avec le pétrole dans la terre, c’est une situation vraiment différente. On ne peut pomper le pétrole à n’importe quelle cadence arbitraire. Les conséquences du pic global de production de pétrole pour la famille moyenne peuvent n’être pas immédiatement apparentes, car les prix de l’énergie et l’économie sont tellement intimement liés que cela se traduira probablement par une une récession économique.

La direction sous-jacente des événements serait une activité économique ralentie, parce qu’il y aura moins d’énergie disponible pour entretenir l’activité économique. Les gens se demanderont alors pourquoi on enchaîne récession après récession et pourquoi chaque récession semble être pire que la précédente.

Et pourquoi cela prend plus de temps pour sortir de chaque récession, pour finir par comprendre qu’on en sort jamais vraiment et pour finalement en arriver au stade où après quelques années les récessions se transforment vraiment en une dépression économique. Et dans ce cas, ce sera une dépression qui ne finira jamais.

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Les médias sont silencieux sur le sujet de l’épuisement des ressources énergétiques, car ils n’y ont aucun intérêt. Si ils décident de dire au peuple qu’on est en train de tomber à court de la véritable ressource qui entretient la croissance économique, est-ce que cela va faire monter le prix des actions de quelqu’un ? A part une petite niche de compagnies qui construisent des panneaux solaires et des éoliennes, la réalité est mauvaise pour les affaires. Ce qui est bon pour les affaires, ce sont les illusions.

Entrent alors en scène les néo-conservateurs, ils ont un plan. C’est un plan en fait pour dominer le monde. Ils n’en font pas un secret, vous pouvez le lire dans les documents largement disponible sur Internet, et aussi sur leur site web “Le projet pour un nouveau siècle américain“.

La domination du monde requière d’abord la domination des ressources énergétiques planétaires qui diminuent. L’intervention militaire en Irak était l’occasion de poser le premier acte du remodelage général du Moyen-Orient et de l’Asie Centrale. On a été prévenu par nos président et vice-président qu’il fallait s’attendre à la guerre jusqu’à la fin de nos vies.

Les Etats-Unis n’auraient pas été en Irak si ce pays n’avait pas de pétrole. Le seul intérêt américain au Moyen-Orient est le pétrole.

Quelles sont alors les alternatives ? Sûrement, on peut obtenir notre énergie d’autres sources que les combustibles fossiles. Si on avait 50 ans, on pourrait dire qu’à cette échéance, 25% de notre énergie dépendrait de sources alternatives aux hydrocarbures. Oui, cela serait assez réaliste, mais nous n’avons pas 50 ans devant nous, pas même 10 ans… Dans 5 ans, on aura passé le pic de production du pétrole et on aura alors besoin de bien plus que cela.

  • Richard Heinberg, auteur de “The party’s over: oil, war, and the fate of industrial societies”

Interview tirée du documentaire “THE END OF SUBURBIA: Oil Depletion and the Collapse of The American Dream