Yves Cochet : Pétrole Apocalypse

Nous vivons la fin du pétrole bon marché. Et les adaptations requises vont sérieusement bouleverser nos modes de vie. Cela ne sera pas un simple choc économique, mais la fin du monde tel que nous le connaissons, car nous devrons organiser la décroissance de la consommation de matières et d’énergie, tout en sauvegardant la solidarité.

Yves Cochet a été ministre de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement dans le gouvernement Jospin. Docteur en mathématiques et militant écologiste depuis trente ans, il est aujourd’hui député Vert de Paris.

Note de lecture rédigée par Gwenaëlle Sauzet pour l’IRIS

Yves Cochet jette un pavé dans la mare avec Pétrole Apocalypse, en abordant courageusement les problématiques futures de la crise pétrolière qui se profile. « Chaque jour qui passe nous rapproche d’un choc imminent que nous ignorons : la fin de l’ère du pétrole bon marché ». Elle aura duré cent cinquante ans, elle s’achève et constitue la trame de fond de l’ouvrage de l’ancien ministre de l’Environnement et actuel député de Paris. Bien sûr, écrit-il, il reste encore du pétrole mais il tend inexorablement à se raréfier, tout simplement car la demande est vraisemblablement sur le point de dépasser l’offre, et son mode de production va s’avérer de plus en plus onéreux.

L’auteur nous parle d’un « triple choc » pétrolier qui aura lieu selon lui d’ici la fin de notre décennie et qui s’annonce de nature complètement différente de ceux de 1973 et de 1979. Les hausses successives du prix du baril de pétrole que nous subissons depuis quelques temps ne vont d’ailleurs pas le contredire. Et ce ne serait que le commencement, sans possibilité de retour en arrière. Selon l’auteur, la nouveauté de la situation actuelle tient en effet pour l’essentiel, à trois facteurs – géologique, économique et géopolitique – qui n’étaient pas présents jadis et qui contribuent à l’augmentation non seulement du prix du pétrole mais de toutes les énergies.

C’est « la fin du monde tel que nous le connaissons » que s’évertue à nous présenter Yves Cochet et il décrypte pour nous tout au long de son ouvrage, et de manière argumentée, ce « choc » de civilisation qui nous guette, tant le pétrole s’est infiltré dans tous les secteurs. Nous serons obligés d’aller « moins vite, moins loin, moins souvent » et ce sera « plus cher », nous dit-il. L’accession aux biens et services sera de plus en plus difficile et l’inflation qui risque d’être très forte touchera bien entendu le transport, mais pas seulement, car le pétrole est partout : le tourisme, la chaîne agroalimentaire, les grandes entreprises transnationales – dont la production est aujourd’hui délocalisée -, les institutions internationales seront tous des secteurs qui seront frappés de plein fouet par la fin du pétrole bon marché. Bref, il va falloir relocaliser plutôt que mondialiser et ainsi aller totalement à l’encontre des tendances actuelles.

Mais ce n’est pas tout, cette hausse tendancielle inéluctable du prix des hydrocarbures, ainsi que leur raréfaction, mènera, selon l’auteur, non seulement à des guerres civiles, mais aussi à de graves tensions internationales et guerres au Moyen-Orient.

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Devant cette description d’un avenir apocalyptique, ne vaudrait-il mieux pas économiser les réserves qui nous restent ?, demande l’auteur. Or, dans le même temps, il serait selon lui trop tard pour bien faire, à cause de nos comportements trop consuméristes, mais aussi de la frilosité des politiques à prendre des mesures forcément impopulaires car contraignantes. Mais il serait encore temps selon lui de réduire le choc en adoptant dès aujourd’hui une nouvelle vision de l’économie, l’auteur faisant la démonstration d’une « bio-économie » qui serait bien plus adaptée à la nouvelle donne mondiale, une économie de rationnement organisé et démocratique. Devant l’inéluctabilité du choc, seule la demi-solution de la sobriété immédiate pourrait réduire les effets dévastateurs du choc.

Si les solutions développées par Yves Cochet semblent répondre à la situation qui se profile – autosuffisance locale et régionale, décentralisation géographique des pouvoirs, relocalisation économique et protectionnisme, planification concertée et rationnement -, on regrettera, et ce encore d’autant plus qu’il s’agit d’un écologiste, qu’il ne parle pas, ou très peu, des énergies renouvelables. Peut-être parce que l’auteur sous-estime le potentiel des gains d’efficacité énergétique et celui des technologies alternatives. Du coup, il dresse un tableau particulièrement austère de l’ère de l’après-pétrole, nous faisant réaliser que nous ne percevons qu’une infime partie des effets du pétrochoc.

Instructif et argumenté, ce livre, empreint d’un cynisme et d’un fatalisme surprenant de la part d’un homme politique, nous met face aux réalités que nous ne voulons pas voir. Yves Cochet dépeint-t-il un avenir beaucoup plus noir que celui que nous aurons, ou livre-t-il une réflexion réaliste et lucide ? Quelle que soit la réponse, ce livre clair, doté d’une réflexion globale, nous fait comprendre qu’il faut réagir, et vite.

Présentation de l’Editeur

Les prix du pétrole flambent. Pourquoi ? Les explications courantes ne suffisent plus. Ne vivons-nous pas la fin du pétrole bon marché ? Ce problème peut bouleverser gravement nos modes de vie.

Transports, agriculture, plastiques, vêtements, médicaments : le pétrole est partout. C’est pourquoi la hausse du prix des hydrocarbures ne sera pas un simple choc économique, ce sera : la fin du monde tel que nous le connaissons.

Il est encore possible de repousser la date de cet événement et d’en limiter les effets par la mise en œuvre d’une sobriété nouvelle.

Cela implique d’organiser la décroissance de la consommation de matières et d’énergie, tout en sauvegardant la solidarité, la démocratie et la paix. A ce prix, la transition sera moins douloureuse.