Rêvons la ville

Rêvons la ville

A l’intention des sceptiques et « déclinologues », proposons leur de rêver, de s’interroger sur l’utopie, de montrer des projets ou des réalisations originales et porteuses d’espoir, de considérer qu’on peut, peut-être, chacun à sa façon, contribuer à penser un autre monde.

Il faut sans doute le voir comme un signe. Un très bon signe même, le concept de ville durable s’enracine, lentement certes, un peu partout sur la planète.

Une ville sans voitures, accueillante pour tous les groupes sociaux, capable de produire l’énergie dont elle a besoin sans polluer est-elle une totale utopie ?

Quelques développements urbains d’envergure peuvent nous faire croire en des cités idéales possibles.

Au Sud du Maghreb, une localité de 9000 habitants devrait naître dans les 3 ans à venir. Construite à partir de matériaux locaux, la ville sera alimentée uniquement par énergies solaire ou éolienne. Sans voitures polluantes, on y marchera et redécouvrira le plaisir des déplacements à cheval ou à vélo ; seuls les véhicules électriques légers pourront circuler. Les anciens bâtisseurs avaient trouvé des réponses aux variations de climat en construisant des murs épais, en réduisant ou agrandissant les fenêtres pour protéger du soleil ou au contraire le faire entrer…là aussi, des bassins rafraîchissants se substitueront à l’habituelle climatisation du XXème siècle et à ses méfaits. Il est également prévu d’éviter le traditionnel « ghetto bobo » des grandes villes et de construire différents types de logements sociaux, haut-de-gamme et touristiques. Le projet, financé par des investisseurs privés, est soutenu par le gouvernement, confié à l’architecte française engagée dans le développement durable, Françoise-Hélène Jourda et surveillé par une ONG qui supervise les opérations et évalue leur impact.

Pour 9000 habitants, me direz-vous, c’est à peine un grain de sable… J’ai une autre échelle à vous proposer : la Chine avec un projet pour 50 000 habitants à horizon 2010. La cité idéale de Dongtan sortira de terre sur la troisième plus grande île du pays : Chongming. Les petits immeubles seront recouverts de plantes permettant d’isoler et récupérer l’eau de pluie. Les autobus rouleront à piles à combustible, l’énergie sera produite par la force du vent et là aussi, on ira à pied ou à vélo. Bien sûr, certains pourront affirmer que cette éco-ville phare ne suffira pas à faire oublier l’empreinte écologique du pays, mais Dongtan est prévue comme la première phase d’un chantier beaucoup plus vaste ; elle sera l’exemple pour les 400 villes qui seront construites d’ici 2020 pour accueillir les populations des campagnes.

Lire aussi :  Copenhague, la ville des cyclistes

Les efforts menés depuis les années 1990 en Europe, dans le quartier Vauban de Fribourg en Allemagne, à Malmö en Suède, à Bedzed au sud de Londres ont eu des impacts positifs qui ont pu être mesurés. En plus d’un cadre de vie agréable, ces quartiers voient leurs consommations d’énergie se réduire jusqu’à 60% et leur volume de déchets chuter de 70% par rapport aux habitations classiques. Même si ces efforts restent trop rares au regard du réchauffement climatique et de l’exacerbation des inégalités sociales, on ne peut nier que l’enjeu soit important si l’on considère que la vie en zone urbaine concerne aujourd’hui un terrien sur deux, bientôt deux sur trois et que l’habitat et les transports contribuent grandement aux émissions de gaz à effet de serre.

Ces exemples de réalisation participent à la prise de conscience collective et le concept de « ville durable » est devenu un référentiel qu’urbanistes et politiques ne peuvent désormais plus ignorer.

GILLES BAHDA