Facteur 4: quatre fois moins de voitures en 2050?

Où en est la Division par quatre des émissions de gaz à effet de serre de la France à l’horizon 2050?

Le groupe « facteur 4 », travaillant sur la division par quatre des émissions de gaz à effet de serre de la France à l’horizon 2050, a rendu son rapport le 3 juillet 2006, il y a donc bientôt deux ans déjà. Ce groupe a été installé le 8 septembre 2005. Il était présidé par Christian de Boissieu et composé de 31 personnalités choisies pour leurs compétences dans des milieux divers : élus professionnels, associations, syndicats, académiques, universitaires. Il a auditionné une vingtaine d’experts extérieurs, dont trois étrangers : un député européen « vert », un scientifique allemand et un économiste américain.

Ce groupe de travail s’est appuyé sur les travaux du GIEC (Groupe international sur le climat) qui montrent que, pour une stabilisation de la concentration atmosphérique en CO2 à 450 ppm, la croissance de la température s’établirait dans une fourchette comprise entre 1,5 et 3,9°C. Autrement dit, la probabilité pour qu’on reste en dessous de 2°C pour une concentration de 450 ppm est largement inférieure à 50 %. Cet objectif de 450 ppm est sans doute le plus bas qu’on puisse se fixer puisque nous sommes aujourd’hui à 382 ppm avec une croissance proche de 2 ppm par an qui ne s’atténuerait que progressivement, même si nous supprimions toute émission. Rappelons que les pays signataires du protocole de Kyoto se sont engagés à limiter leurs émissions de gaz à effet de serre provenant de l’usage des énergies fossiles comme le charbon ou le pétrole pour revenir d’ici 2012 à un niveau inférieur de 5,2 % à celui de 1990.

Selon le GIEC, pour stabiliser à 450 ppm, il faut donc avoir réduit les émissions annuelles en 2050 à 4 Gt de carbone, soit, pour une population actuelle de 6,5 milliards d’habitants, 0,6 t de carbone par habitant et par an. La France, avec 61 millions d’habitants, aurait droit, pour une répartition proportionnelle au nombre d’habitants, à 38 Mt de carbone, c’est-à-dire une division par quatre par rapport à ses émissions actuelles (140 Mt C).

Diviser par 4 les émissions françaises de gaz à effet de serre (GES) à l’horizon 2050 est donc un objectif ambitieux et volontariste affiché par notre pays, et qui mêle tout un ensemble de considérations -techniques, technologiques, économiques, sociétales…-, avec en toile de fond des choix et des enjeux majeurs pour les politiques publiques.

Le Facteur 4 oblige à penser et à agir à long terme, dans un monde où tant de forces ont tendance à nous ramener vers le court terme. Le succès légitime et durable du concept de développement durable y pousse déjà, avec l’accent mis sur les questions d’environnement, de pollution et de climat, le thème central et mobilisateur de la solidarité entre générations, l’exigence de la bonne gouvernance (publique et privée), etc.

Plus globalement, au niveau international, l’enjeu d’une stratégie de type Facteur 4 est de voir les gouvernements reprendre le contrôle de leur futur énergétique. Les changements dans les modes de production et de consommation devront donc être majeurs (l’ampleur du chantier à mener s’agissant des bâtiments existants ou de l’automobile suffit pour s’en convaincre). Il s’agit donc bien d’écrire, et non d’essayer de décrire, le futur à l’horizon 2050. Il s’agit bien de politique et non de prévision.

Diviser par 4 le nombre de voitures?

Du côté des transports et de l’automobile, il faut rappeler que la consommation de pétrole dans les transports est passée en France de 25,7 Mtep (Millions de tonnes équivalent-pétrole) en 1973 à 50,4 Mtep en 2004, soit un doublement de la consommation de pétrole pour les transports en 30 ans!


Emissions de gaz à effet de serre en France (y compris DOM/COM) en 2004, par secteurs (entre parenthèses, l’évolution depuis 1990 ; source : CITEPA / Inventaire SECTEN/Format PNLCC février 2006)
Cliquez sur l’image pour l’agrandir

Les transports représentent en 2004 26% des émissions de Gaz à Effet de Serre en France, en hausse de 23% entre 1990 et 2004 (voir ici). Car, si les autres secteurs d’activité (industrie, agriculture, déchets, habitat, etc.) ont fait des efforts considérables pour réduire leurs émissions de GES et de CO2 en particulier, les transports et l’automobile restent dépendants à 98% du pétrole et émettent toujours plus de CO2 dans l’atmosphère.

Les transports en général et l’automobile en particulier deviennent dans ce contexte le secteur où il faudrait agir le plus vite et le plus fortement pour faire baisser les émissions de GES. Parmi ses recommandations, le Groupe de travail « Division par quatre des émissions de gaz à effet de serre de la France à l’horizon 2050 » demandait donc au Centre d’Analyse Stratégique de réexaminer à l’aune du Facteur 4, en tant que de besoin, les critères de choix en matière d’infrastructures, notamment dans les transports, tels qu’ils ont été définis par l’ex-Commissariat général du Plan.

Lire aussi :  Automobile, CO2 et concentrations de polluants

Des « bilans carbone » ou équivalent devront être réalisés par les Pouvoirs publics avant d’engager tout investissement public d’une certaine taille.

Toujours selon ces recommandations, il faut porter l’effort financier en priorité sur les transports de masse (transports urbains, rail, voies d’eau), sans oublier la bicyclette. Les vitesses maximales autorisées doivent être réduites (pour commencer, 120 km/h sur autoroute, 100 km/h sur voies rapides). La vignette automobile doit être rétablie avec un contenu écologique fort. Le péage urbain doit être légalisé, ainsi que la possibilité de taxer les parkings des entreprises. Une redevance routière doit être imposée au transport routier de fret, selon le modèle suisse. Le kérosène doit être taxé. Pour combattre ou organiser l’étalement urbain, tous les effets pervers de la fiscalité doivent être corrigés. Les collectivités territoriales doivent harmoniser leurs politiques régionales et départementales.

Deux ans après les recommandations du Groupe de travail « Division par quatre des émissions de gaz à effet de serre de la France à l’horizon 2050 », que reste-t-il de toutes ces bonnes intentions? Rien. Les bilans carbone semblent être au point mort, la vignette écologique est morte-née, la réduction des vitesses sur autoroute a été projetée puis abandonnée, l’effort financier sur les transports en commun ou le vélo se fait attendre, la taxe sur les parkings des entreprises n’a jamais été reprise ni même envisagée, comme la redevance routière sur le transport routier de fret d’ailleurs… Quant à la taxe sur le kérosène, elle n’est plus vraiment dans l’air du temps, en ce moment, on parlerait plutôt de détaxer le carburant pour les routiers, les pêcheurs, les agriculteurs, les taxis, etc.

En termes d’émissions de CO2, la France arrive tout juste à maintenir à grand peine ses émissions de CO2 pour les années 2006 et 2007, et on ne parle même pas de retrouver le niveau de 1990!

Vous me direz, l’échéance est à 2050, il reste donc encore une quarantaine d’années pour parvenir à tous ces objectifs modestement ambitieux… Sauf qu’on semble aller à l’encontre même des objectifs affichés en 2006: toujours plus de voitures, de camions, d’émissions de CO2 et de GES et toujours moins de taxes car « il ne faut pas pénaliser l’activité économique ».

Ne nous leurrons pas, la réalisation de l’objectif Facteur 4 doit passer par la division par 4 du nombre de voitures en France d’ici 2050. Avec un parc automobile d’environ 36 millions de voitures en 2007, il faut donc envisager un parc automobile d’un peu moins de 10 millions de voitures en 2050. C’est à ce prix que la France apportera sa réelle contribution au changement climatique. Elle y gagnera au passage un grand nombre de nuisances en moins (accidents, pollution, bruit, etc.) et une indépendance énergétique retrouvée à l’échelle internationale.

Finalement, si nous voulons nous attaquer véritablement aux causes du réchauffement climatique et en limiter autant que possible les effets désastreux, nous allons devoir, en deux générations, transformer de fond en comble l’organisation, le fonctionnement et les finalités de notre société. Cette mutation ne se fera pas sans douleur tant le chemin qui nous reste à accomplir est immense et les difficultés à surmonter puissantes. Mais c’est à ce prix, et en osant imaginer et mettre en œuvre les solutions les plus audacieuses , que nous pourrons peut-être éviter la catastrophe planétaire annoncée et transmettre aux générations futures une terre vivable.

Pour en savoir plus:

Rapport du Groupe de travail « Division par quatre des émissions de gaz à effet de serre de la France à l’horizon 2050 »
sous la présidence de Christian de Boissieu

http://www.industrie.gouv.fr/energie/prospect/facteur4-rapport.pdf

Un commentaire sur “Facteur 4: quatre fois moins de voitures en 2050?

  1. julien

    bande de connard faut pas supprimer la voiture vous etes vraiment tous deranger les ecolos de merde vous rouler a velo et casser nous pa les couille la voiture c’est dabord une passion

Les commentaires sont clos.