La crise automobile est structurelle

Ne nous laissons pas leurrer par les constructeurs automobiles et par les entreprises sous-traitantes du secteur automobile. La crise actuelle de l’automobile n’est pas une crise conjoncturelle, mais une crise profonde et structurelle dont les fondements datent non pas de 2008 mais remontent au début des années 2000.

C’est désormais la question urgente à traiter : il faut sauver le soldat automobile. Les patrons en rajoutent dans la surenchère à coup de milliards nécessaires pour sauver l’industrie automobile, les syndicats montent également au front pour « sauver l’emploi » du secteur automobile, les politiques de gauche comme de droite sont tous d’accord pour mettre sous perfusion d’argent public une industrie automobile à la dérive, au passage en s’asseyant sur les travaux issus du Grenelle de l’Environnement, et les médias entretiennent le mythe de la crise conjoncturelle liée à la crise financière de 2008.

Car la question est bien là: l’argument de la crise conjoncturelle est le seul valable pour injecter des milliards d’euros dans le secteur automobile. Dit autrement, la crise des subprimes aux USA a provoqué la crise financière mondiale que l’on connaît, la crise du crédit qui a suivi et en bout de course, la crise du secteur automobile à partir du moment où les gens ont moins accès au crédit pour acheter une voiture neuve tous les deux ans. Selon eux, comme la crise est conjoncturelle, il faut assez de trésorerie pour laisser passer la bourrasque, attendre que les choses se stabilisent, et les ventes de voitures repartiront en flèche comme avant.

Egalement, l’idée d’une crise conjoncturelle tombe à pic pour dédouaner les patrons des constructeurs et des équipementiers automobile quant à leurs responsabilités (« c’est la faute à la crise mondiale »)  et permet d’éviter de se poser trop de questions embarrassantes: pourquoi les gens achètent-ils moins de voitures? Les voitures sont-elles adaptées au marché? A quoi ça sert une voiture au bout du compte et comment peut-on s’en passer?

Enfin, l’idée de la crise conjoncturelle tombe au bon moment pour justifier les suppressions de postes et les licenciements qui, de toute manière, auraient eu lieu.

Or, si on y regarde de plus près, on s’aperçoit que les licenciements dans le secteur automobile ont commencé dès 2003, que les délocalisations ont commencé bien avant pour arriver à une situation où la France est désormais importatrice nette de voitures. On s’aperçoit également que le trafic routier a entamé en France une baisse significative dès 2005.

Lire aussi :  Mise en abyme : la Géographie par et pour la voiture, de LandRover à Frankenstein en passant par l'exégèse

La réalité, c’est que l’industrie automobile connaît une crise structurelle de grande ampleur, au même titre que l’industrie sidérurgique dans les années 80. Et pour les mêmes raisons que dans le cas de l’industrie sidérurgique, il ne faut pas aider l’industrie automobile.

Au contraire, il faut préparer les salariés à des reconversions vers des métiers d’avenir, leur permettre d’obtenir une validation des acquis de l’expérience, des contrats de qualification afin qu’ils obtiennent un diplôme validé par l’éducation nationale. Un syndicaliste de Renault précise: « Renault a des volumes impressionnants d’heures de formation jamais utilisées. L’adaptation aux nouvelles technologies, relève pourtant de leur compétence ! » (Source: http://crise.blog.lemonde.fr/)

Quels seront dès lors les métiers d’avenir envisageables dans le cadre de la reconversion massive des salariés de l’automobile? Il faut nécessairement faire évoluer un système de mobilité fortement dépendant du pétrole et apporter une réponse au réchauffement climatique en diminuant fortement les émissions de CO2.

Seul un développement massif des transports publics pourra répondre à ces enjeux. Il est donc plus que jamais nécessaire d’investir massivement le champ des transports publics, depuis les réseaux de transports publics urbains aux réseaux ferroviaires de proximité (tram-train, TER, etc.) en passant par la construction de nouveaux systèmes de trains et tramways.

Le développement massif de ce secteur pourrait permettre la création de millions d’emplois depuis la mise en place des infrastructures et leur gestion/entretien, la planification des transports, la construction, l’entretien et la mise en service des matériels roulants, etc. A la manière de ce qui est proposé aux USA, il faut mettre en œuvre dès à présent un New Deal des transports publics.

L’industrie automobile est structurellement malade, il est donc illusoire de vouloir mettre un emplâtre sur une jambe de bois. Il faut changer radicalement de paradigme et créer dès à présent les emplois de demain pour répondre aux enjeux environnementaux d’aujourd’hui.

6 commentaires sur “La crise automobile est structurelle

  1. Immo

    Compte tenu du contexte économique actuelle, une telle crise nécessite indiscutablement une profonde remise en question.

  2. Acouphene

    Un an et demi plus tard, alors qu’on a vu par exemple les ventes de voitures françaises flamber en 2010, que changeriez-vous à ce billet ?
    Cordialement

  3. Marcel Robert

    Honnêtement, rien du tout! Où avez-vous vu que « les ventes de voitures françaises flambent en 2010 »? En tout cas pas sur les chiffres officiels du CCFA qui montrent que sur les 6 premiers mois de l’année 2010, l’augmentation des immatriculations en France est de seulement 5,4% par rapport aux 6 premiers mois de l’année 2009!
    http://www.ccfa.fr/IMG/pdf/IP6.pdf
    En outre, cette augmentation de seulement 5% doit se comparer avec une année 2009 qui n’a pas été spécialement terrible du fait des conséquences de la crise de 2008 et pourtant malgré la mise sous perfusion de l’automobile du fait des primes à la casse et autres bonus automobiles…

    Egalement, pour les constructeurs français (renault et peugeot), les chiffres ne sont pas vraiment meilleurs et reflètent assez bien la tendance globale. Le seul vrai changement (abordé dans l’article), c’est que ce que vous appelez les « voitures françaises » ne sont désormais plus vraiment des voitures françaises car plus de la moitié des voitures produites par renault et peugeot psa sont désormais fabriquées à l’étranger, délocalisations obligent…

  4. Moa

    Acouphene, n’oubliez pas de nous fournir vos références sans quoi on pourrait croire que votre intervention n’est que désinformation.

  5. Acouphene

    Oh la la, de la désinformation ? Non, loin s’en faut… C’est tout simplement une erreur de ma part, j’aurais dû vérifier avant de poster : je croyais que les marques françaises avaient largement augmenté leurs ventes à l’étrange (je ne parlais donc pas du marché hexagonal) en 2010. Mais visiblement j’avais plus que tort !

Les commentaires sont clos.