Tout pour la route et des miettes pour les transports publics

Les investissements en infrastructures routières (routes et autoroutes non concédées) s’élèvent à 10,7 milliards d’euros en 2007. Ce chiffre est en augmentation de 40 % depuis 1997 (9,4 milliards d’euros concernent les routes départementales et locales), et représente 64 % des investissements publics en infrastructures de transport. Autrement dit, la route représente près des deux tiers des investissements publics dans le domaine des transports.

Les transports collectifs, le réseau ferroviaire, les ports, aéroports et voies navigables se partagent les 36 % restants.

Les investissements en transports collectifs urbains s’élèvent à 2,1 milliards d’euros en 2007. Ils se répartissent entre les transports collectifs urbains de province (1,4 milliard d’euros) et les réseaux RATP et Transilien (0,7 milliard d’euros).

Et encore, ces chiffres ne prennent pas en compte le réseau autoroutier concédé, c’est-à-dire géré par le privé, ce qui augmenterait encore la part globale des investissements publics et privés dans le domaine routier. En effet, si on connaît de nombreux exemples d’autoroutes gérées par le privé, on ne connaît pas beaucoup de lignes de tramway ou de train gérées par le privé…

Ces quelques chiffres ont le mérite de rappeler l’écrasante suprématie routière en termes d’investissements publics sur tous les autres modes de déplacement. Ce qui est plus surprenant, c’est que cette suprématie du routier augmente considérablement ces dernières années (+40% depuis 1997), alors même qu’on parle de plus en plus du réchauffement climatique, de l’épuisement progressif du pétrole, du Grenelle de l’environnement, du « développement durable », etc.

Ce qui est encore plus étonnant, c’est qu’il se vend de moins en moins de voitures, que les gens l’utilisent de moins en moins et que le trafic passager des transports en commun (urbains et régionaux) explose quant à lui depuis maintenant une dizaine d’années. Les trains, TER, RER, métros ou autres tramways sont le plus souvent bondés aux heures de pointe, le réseau de trains diminue comme peau de chagrin depuis plus de 40 ans et ce qu’il en reste est souvent dans un piteux état du fait du manque de moyens et d’investissements pour l’entretenir.

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Et après, on s’étonne ou on fait mine de s’étonner que les transports en commun ne « répondent pas à la demande », « ne sont pas adaptés », « sont de plus en plus souvent en retard », etc.

Alors certains nous diront que si les investissements routiers sont si importants, c’est que le secteur automobile est le plus gros employeur de l’économie en nous sortant au passage le fameux chiffre de 10% de l’emploi total. C’est faux. Depuis des années, le lobby automobile matraque cette contre-vérité reprise par les médias-qui-mentent: « la filière automobile occupe 2,5 millions de collaborateurs soit 1 Français au travail sur 10« . En fait, il s’agit surtout de gonfler les chiffres… pour toucher toujours plus de subventions et éviter de poser les questions qui fâchent.

Exemple de question dérangeante: aujourd’hui on parle de plus en plus d’aider à tout prix le secteur automobile pour « sauver les emplois », mais pourquoi ne dit-on pas aux gens que le développement du transport public génère deux fois plus d’emplois que le secteur automobile? Autrement dit, et ce n’est pas moi qui le dit mais l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS), « le déplacement d’un voyageur sur 1 kilomètre en automobile crée deux fois moins d’emplois que le même déplacement en bus ou en tramway« .

Aussi, depuis 1997, si on avait accordé autant de financements publics aux transports collectifs qu’au transport routier, on en serait peut-être pas là où on en est aujourd’hui en ce qui concerne la « crise économique » et le taux de chômage…