Pour frauder dans les transports en commun, créez votre mutuelle!

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Le propre de la société en place est de nous faire croire qu’il n’existe pas d’alternative, qu’il ne serait pas possible d’aller contre un principe de réalité érigé en dogme. Une certitude si ancrée qu’elle fait passer ceux qui pensent autrement pour de doux utopistes, incapables de voir plus loin que le bout de leurs rêves enfumés. Ou – au mieux – pour de gentils agitateurs dont il serait salvateur qu’ils n’aient pas le pouvoir de mettre en place les ruptures qu’ils prônent. Tous discrédités, donc. Y compris les militants de la gratuité des transports, mot d’ordre popularisé depuis les mouvements sociaux de 1998 mais très rarement mis en application. Pourtant…

Une utopie ? Mon oeil !

La gratuité des transports publics n’est déjà plus une utopie en quelques communes privilégiées. A Châteauroux, la municipalité l’a mise en place depuis 2001, partant du constat que le paiement du ticket par les usagers ne représentait qu’un pourcentage marginal du coût total des transports.

Châteauroux n’est pas seule. La ville de Compiègne pratique la gratuité des transports depuis 33 ans, celle de Vitré s’y est mise plus récemment. Enfin, la communauté d’agglomération du pays d’Aubagne et de l’Etoile s’y colle en ce début d’année : « Les élus relèvent que les recettes de la billetterie représentent moins de 9 % sur un budget annuel des transports de 9 millions d’euros. Sans oublier le coût de l’émission des billets, de leur contrôle… Au final, le surcoût de la gratuité est estimé à 700 000 €, une somme que l’agglomération est prête à assumer ». (Source: Carfree)

Juste la preuve que c’est possible. La gratuité des transports n’a rien d’une utopie, mais relève d’une simple question de priorité des collectivités. Et là où elle n’est pas mise en place, il appartient à chaque citoyen de la pratiquer. En clair : vive la fraude !

Frauder ? Ok, mais avec une assurance…

Frauder ? C’est bien gentil… Mais encore faut-il s’en sortir gagnant, le montant des amendes n’excédant pas celui du coût des tickets qui auraient dû être réglés. Là, guère de solution, sinon compter sur la chance, sur sa capacité à courir vite pour échapper aux contrôleurs ou… sur une mutuelle. Le principe ? Contre le paiement d’un forfait mensuel par ses membres, une mutuelle de fraudeurs prend en charge les éventuelles amendes. A Paris, elles sont quatre à fonctionner sur ce modèle, la plus importante, celle du Réseau pour l’abolition des transports payants (RATP), comptant une quarantaine d’adhérents.

La sauce a pris, en partie relayée par les médias et par les usagers. Et n’est sans doute pas étrangère à la décision de la région Île-de-France de mettre progressivement en place – à compter de 2006 – la gratuité des transports pour les chômeurs et bénéficiaires de minimas sociaux. Pas question, par contre, d’étendre cette gratuité à tous les utilisateurs des transports en commun. Une réalité qui a poussé les militants du RATP à trouver un biais pour la mettre réellement en pratique :

« On a lancé la mutuelle en 2005, avec cette volonté de montrer qu’on pouvait mettre en place un outil permettant la gratuité, même à petite échelle. Pour nous, c’était une application concrète, histoire de montrer que notre revendication pouvait être mise en œuvre tout de suite. C’est surtout une pratique collective et solidaire, quelque chose de très important dans une société où chacun essaye de fuir et de se débrouiller dans son coin », souligne Manue.

Il s’agit « d’assumer collectivement l’illégalité, précise Gildas, et de permettre aux fraudeurs d’assumer le non-paiement du ticket en donnant un sens politique à leur geste ». Pas si anodin que ça, nombre d’usagers des transports en commun se refusant à frauder par peur des contrôles : « Savoir qu’ils ont un collectif derrière eux aide certains usagers à sauter le pas. Ce n’est pas si facile, tant certains vivent très mal la hantise des contrôles et l’humiliation de la verbalisation. » Logique.

Lire aussi :  À bas la voiture...vive le vélo !

Dans la pratique ? Le Réseau pour l’abolition des transports payants a institué un rendez-vous [1], histoire que les membres se connaissent, fassent le point sur les actions et règlent leur écot du mois à la mutuelle. Le montant ? Sept euros par mois, cotisation permettant à la structure informelle de ne pas faire de déficits et de pratiquer des tarifs réduits à l’intention de ceux qui ont des moyens limités. Une assurance risque qui couvre les contraventions émises dans les bus, métros et RER d’Île-de-France.

Facile à mettre en place, ce type de structure pourrait essaimer partout. « Il suffit d’une vingtaine de membres pour qu’une telle mutuelle fonctionne. Un réseau de potes peut suffire, comme à Montreuil où une mutuelle s’est créée entre amis, assure Manue. Notre principal objectif est que les gens s’organisent. Plus il y aura de mutuelles, plus les transports payants verront leur légitimité menacée », confirme Gildas. En un mot : bougez-vous les fesses !

Manue et Gildas, du Réseau pour l’abolition des transports payants, pour Article 11

[1] Chaque premier mercredi du mois, à 19 h 30, au CICP 21, rue voltaire dans le XIe arrondissement. N’hésitez-pas, la réunion est ouverte à tous.

9 commentaires sur “Pour frauder dans les transports en commun, créez votre mutuelle!

  1. Marschupp

    A Styockholm, le réseau Planka (fraudé en suédois) compte plusieurs centaines de membre. Pour 10€/mois, la même idée est mise en place. Le prix d’un abonnement normal est de 70€, l’amende 120€.

  2. Stase

    Bonjour, je voudrais adhérer a votre mutuelle que je trouve ultra pertinente en ces temps de grand n’importe quoi général! Merci pour cette super idée! merci pour votre réponse Anastasia

  3. Djib

    Je suis vraiment écoeuré de constater encore une fois l’expression de la mentalité pourrie que l’on a en France. Toujours essayer de frauder, le fisc, les transports, les examens …
    Les transports parisiens sont peu chers et efficaces, pourquoi vouloir frauder ?! Le prix du billet est dérisoire par rapport aux coûts réels et au service apporté. Si vous prenez votre voiture, avec le prix d’un billet (1€60) vous démarrez, faites 200m et les 1€60 sont déjà bouffés.
    Le principe même de cette mutuelle est vraiment lamentable.

  4. Minou

    DJIB, tu demandes « pourquoi vouloir frauder ? » et tu affirmes que « le prix du billet est dérisoire par rapport aux coûts réels et au service apporté ».

    Et là, tu devrais te demander POUR QUI le prix est dérisoire. Sais-tu qu’il y a en France des gens qui vivent avec moins de 10 euros par jour ?

  5. LeMaltais

    Bonjour,

    Je partage entièrement l’avis de Minou. La véritable question a se poser est pour qui le prix des transports en commun est dérisoire?

    Je déteste entendre des regretteurs se plaindre d’une certaine mentalité qui serait « pourrie » en France parce que des personnes s’organisent et refusent un état de fait qu’on leur impose.

    Le prix des transports en commun est loin d’être dérisoire et il faut vraiment ne pas se rendre compte de la réalité économique de ce pays pour oser dire une telle absurdité. Il est de plus foncièrement injuste: pourquoi sont- ce les personnes les plus éloignés du centre qui doivent payer le plus cher alors que ça ne sont pas ceux qui disposent des revenus les plus élevés? L’emploi se trouve plutôt dans le le centre des grandes villes et l’accès à ces centres devrait être soutenu par les collectivités locales.

    Je constate encore une fois que les fraudes ou les abus commis par les personnes très riches (dont certains de nos élus) sont considérées comme normales (parachutes dorés, salaires 20x supérieurs au salaire minimum- pour une responsabilité 20x supérieure, peut- être?, voyage en jet privés plutôt qu’en transports « normaux », etc).

    En revanches, les « combines » des personnes aux revenus les plus faibles sont stigmatisées, poursuivies et jugées comme des comportements anti- sociaux alors qu’il s’agit de leur survie au quotidien et non de placement dans des paradis fiscaux.

    Et pour répondre à toute critique, je n’ai aucune étiquette politique. Je suis seulement profondément révolté contre les injustices structurelles et organisées par les plus puissants.

  6. Minou

    « Je constate encore une fois que les fraudes ou les abus commis par les personnes très riches (dont certains de nos élus) sont considérées comme normales (parachutes dorés, salaires 20x supérieurs au salaire minimum- pour une responsabilité 20x supérieure, peut- être?, voyage en jet privés plutôt qu’en transports « normaux », etc). »

    Tu sais d’où vient cette façon de penser, Lemaltais ? Elle vient du fait que les pauvres et les moyennement pauvres EUX-MÊME considèrent comme normal que les riches s’en mettent plein les poches et qu’ils les asservissent. Ils voudraient faire pareil. Et ils s’accusent entre eux, les pauvres.

    Les plus indignés, les plus « écoeurés », comme DJIB, ne sont pas les riches, ce sont les pauvres eux-même et les moyennement pauvres, qui considèrent leur sort comme mérité, parce qu’ils n’ont pas été des winners. Ils « assument » le fait d’être des « losers ».

    Ainsi, ils alimentent et renforcent la croyance selon laquelle « chaque chose est à sa place » : le patron mérite son poste et son salaire, l’esclave aussi. Le patron veut le bien de son esclave, n’est-ce pas ?

    LA-PREUVE-IL-LUI-DONNE-DU-TRAVAIL.
    SANS-LUI-IL-SERAIT-À-LA-RUE.

    Prions pour les patrons, ces grands hommes, ces saints, qui nous donnent si grâcieusement notre i-pod quotidien.

    Au nom du patron, de la machine et de la croissance, i-men !

  7. URB

    Tout dépend de la ville.
    Chez moi, un abonnement au mois reviens à 30 €, voyage illimité.
    L’employeur peut/doit te rembourser 50% de l’abonnement à hauteur de 200€/an.
    Donc prix d’un abonnement mensuel : 15€.
    Pour une si petite différence, est-ce que ça vaut le coup de frauder ?

    Après cette mutuelle a t-elle des restrictions ?
    Est-elle accessible pour tous ?

    Je demande ça, car cela peut être un bien pour ceux qui n’ont pas beaucoup de revenus, mais même si des personnes qui gagnent de quoi se payer un abonnement sans que cela ampute sérieusement leur budget, c’est n’importe quoi.

    Au final ça finira par avoir trop d’adhérent, qui provoquera une hausse des amendes à payer par la mutuelle et finira par la couler, vu que les entreprise ne vont pas se gêner à renforcer les contrôles et donc verbaliser.

  8. CarFree

    Projection-Débat Jeudi 24 février 2011

    Contrôles, fichage, caméras, amendes… Contre les transports payants et policiers, pratiquons l’entraide et le mutualisme !

    Les transports en commun sont un des lieux privilégiés de toutes les lois et technologies sécuritaires. En plus de la multitude de caméras et de tourniquets qui nous empoisonne la vie, on y croise pêle-mêle des contrôleurs, des milices privées, des policiers, des militaires, bref toute la panoplie répressive du pouvoir dont les tours de force sont insupportables au quotidien. Des sans-papiers arrêtés sous couvert de « banals contrôles de billet », des bus arrêtés devant un commissariat ou des dizaines de robocop en arme pour cause de billet non compostés… ! Des panneaux publicitaires comme seul horizon, et des injonctions autoritaires et comportementalistes comme seuls échanges !

    Nous prenons les transports en commun tous les jours. Nous ne voulons plus de ce quotidien. Nous nous sommes organisés en mutuelles de sans-tickets pour y résister. Parlons-en :

    Projection-Débat Jeudi 24 février 2011 à 19h au café de la Commune Libre d’Alligre 3, rue d’Aligre 75012 Paris, M° Gare de Lyon

    19 h Projection du film Sans titre : Chronique d’une mutuelle de fraudeurs

    19h30 Débat : Gratuité, entraide et mutualisme dans les transports en commun contre la délation, la répression et l’assignation à résidence

    Restauration sur place

    Source: https://paris.indymedia.org/spip.php?article5625&utm_source=viatwitterfeed&utm_medium=twitter

  9. gardrat

    bonjour

    je suis a fond avec vous pour la gratuité des transports publics et je voulais savoir si sur lyon il existait un dispositif merci par avance

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