Sexe, drogue et bagnole

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Je viens des pays de l’Est mais le responsable du réseau est français. Il s’appelle Carlos et a mis en place des filières à travers toute l’Europe pour nous faire venir en France, une conséquence de la mondialisation sans doute. Car nous arrivons sur le marché français avec un prix de revient beaucoup plus faible que les françaises. 

Une fois en France, chacune de nous arrive chez un petit revendeur qui organise le proxénétisme dans sa zone d’action. Il nous refile à des maquereaux qui vont nous faire travailler. On est mises aux normes occidentales puis vendues comme du bétail. Chaque maquereau en fait travailler une ou deux selon les cas.

On passe le plus clair de notre temps sur la voie publique à faire les trottoirs. Certains macs nous bichonnent, mais la plupart nous traitent comme de vulgaires objets de consommation, nous pénétrant en général deux fois par jour durant des séances pouvant atteindre 30 minutes à une heure. Parfois, ils se mettent même à plusieurs, jusqu’à quatre ou cinq pour nous pénétrer, mais heureusement, cela arrive très rarement…

Comme on passe le plus clair de notre temps sur les trottoirs, certains ont le culot de nous accuser parfois d’être « garées en putain »! Mais on ne va quand même pas aller tapiner dans les magasins non plus? Certaines se spécialisent dans les parkings souterrains et ne voient quasiment jamais le jour.

En règle générale, on est constamment harcelées par la police, tout particulièrement celles qui traînent sur les trottoirs et celles qui sont maquillées comme des voitures volées. Et puis il faut dire que notre activité n’a plus vraiment le vent en poupe, on parle de plus en plus de crise du secteur depuis que les autorités tentent de nous éloigner des centre-villes. Il paraîtrait qu’on défigure la ville et qu’on pollue le paysage, à moins que cela ne soit le contraire…

Mais notre problème fondamental, ce ne sont pas les flics ou les autorités, mais la dépendance à la drogue. Car nous sommes toutes toxicomanes sans exception, c’est dans nos gènes. Le plus souvent, je vais voir mon dealer principal, Christophe de M., dit le « Total« , mais il m’arrive aussi parfois d’écumer les parkings de supermarchés à la recherche d’une dose pas chère.

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Car de la dope il nous en faut beaucoup, pas moins d’une dose à 30 euros toutes les semaines ou tous les 15 jours. Et sans drogue, impossible d’assouvir les besoins insatiables de nos maquereaux… Et des besoins, ils en ont des particulièrement bizarres. Certains nous prennent dans un train d’enfer par les voies rapides, d’autres préfèrent déployer toute leur lubricité en groupe, en nous alignant en file indienne collées les unes contre les autres.

Autant dire qu’à ce rythme, on ne fait pas long feu. Certaines tombent dans la violence la plus sordide et se mettent à tuer des gens, et parfois même leur proxénète, par vengeance sans doute. Certaines ont des comportements suicidaires et foncent dans les murs ou dans les arbres. D’autres tombent malades sans raison et si elles sont déjà trop vieilles, on leur démolit le portrait sans autre forme de procès et elles finissent complètement cassées.

Mais, avant d’en arriver là, nos macs se désintéressent en général assez rapidement de nous et nous revendent à vil prix au bout de deux ou trois ans. Après avoir été vendues plusieurs fois, tripotées par plusieurs propriétaires successifs, on ne vaut plus grand chose. C’est en général à ce moment qu’on nous envoie en Afrique finir notre vie. Là aussi, des filières existent pour nous envoyer tapiner dans les grandes capitales africaines.

Mon nom n’a pas vraiment d’importance, je suis juste une voiture…