L’Apocalypse réhabilitée par la « Religion du Progrès » (2)

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Extrait de « La notion d’Énergie dans « Le Meilleur des Monde ». En deux épisodes. Deuxième partie.

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« L’Age Atomique » triomphe et montre l’exemple aux nations émergentes

« Mille milliards de milliards », des mégatonnes d’énergie partis en fumée, peu importe les chiffres exactes, l’énergie colossale dépensée par et pour les essais atomiques est l’une des caractéristiques essentielles du développement de la science nucléaire. Des millions d’hectares de terre et d’écosystème sont dévastés, des populations délocalisées, déportées, dépossédées de leur vie et de leur terre, des hommes instrumentalisés irradiés « pour l’exemple », c’est la recherche nucléaire.

C’est le quotidien du monde et le « quotidien du peuple » à « L’Age Atomique ». Un demi-siècle durant les « essais » (5) pour l’exemple de la puissance nucléaire se sont succédés pour faire « avancer La Science ». La Terre entière est instrumentalisée pour les « essais ». Pour les « besoins de la recherche » elle s’est mise à battre au rythme d’une explosion nucléaire par semaine pendant cinquante ans. Mais avec ces « essais » c’est bien la guerre qui continue dans l’escalade de la terreur. C’est l’expansion de « l’annihilisme national-socialiste » dans sa version strictement technique qui continue. Les deux premiers « essais » « réussis » sont « grandeur nature ». Ils ont eu lieu à Hiroshima et Nagasaki…

Les « essais » de recherche ont fini par cesser, certainement par la simple logique interne, ils ne sont plus nécessaires pour de la recherche fondamentale nucléaire. Des irradiés pour l’exemple, travailleurs survivants du nucléaire sont « indemnisés » mais c’est par simple « bonne conscience » locale, de modiques sommes leur sont allouées pour soigner « l’image de marque » de la recherche savante. Mais l’essentiel est réalisé, l’exemple est donné, par le « monde civilisé des démocraties avancées », l’exemple est suivi. Le message est passé, la relève est assurée et les essais sont prêts à reprendre du service. Le Cœur de l’Age Atomique continue à battre, toujours par des essais en Corée du Nord mais surtout dans le Cœur de Sainte sœur Anne et par elle dans celui de tous les dictateurs.

« L’Apocalypse « enfin » retrouvée par la Religion du Progrès »

Pour la fille spirituelle du national-socialisme, c’est l’heure d’une honnête « retraite » civile, mais hautement (radio) active. Après ses premières, bruyantes, et grossières utilisations militaires, l’énergie nucléaire comme beaucoup d’autres inventions militaires, réussit une brillante et très active reconversion dans le civil.

La première fournée de centrale nucléaire est arrivée, sous le médiocre et fallacieux prétexte du « premier choc pétrolier ». Une « menace sérieuse » semblait planer sur « l’autonomie énergétique » des « démocraties avancées », mais la crédibilité douteuse de cette histoire de Polichinelle, n’a pas fait l’unanimité pour imposer le nucléaire dans le « monde civilisé ». Dès cette époque le nucléaire aurait pu s’imposer sous le prétexte du « réchauffement climatique ». La pollution atmosphérique et « l’effet de serre » étaient suffisamment connus (6,7) dans les milieux savants « bien informés ».

Mais, il était à cette époque, non encore utilisable, le contexte d’expansionnisme et d’aménagement industriel du territoire l’interdisait. La France (et le Japon) représentent seuls le fer de lance du nucléaire. Pour assurer son pouvoir, le Léviathan technocratique nucléarise de la manière la plus arbitraire les territoires et leur population. Une nouvelle étape fondamentale est franchie, le totalitarisme « post-idéologique » (8) progresse en s’émancipant de son carcan strictement militaire. Il s’empare de la société civile. Pour ces deux petit pays, la France et le Japon le territoire est volontairement miné, colonisé de manière inconsidérée, par des centrales nucléaires.

Sous les prétextes fallacieux du « choc pétrolier » et de « l’autonomie énergétique nationale », le Léviathan technocratique assoie durablement son pouvoir et impose une véritable prise d’otage de sa propre population avec forte demande de rançon à ses contribuables. Ailleurs dans le monde, les autres nations industrielles regardent et suivent à un rythme plus mesuré et quelques accidents nucléaires ont permis de ralentir l’entreprise totalitaire. Mais dans le cœur des Léviathans technocratiques le « feu nucléaire » couvait encore et le processus totalitaire attendait son heure pour renforcer son emprise sur la société civile.

Quelques vingt ans plus tôt avant le « Choc Pétrolier », en 1956, alors que l’élite scientifique unanime perfectionnait les bombes atomiques et les faisait exploser pour des « essais » ; Günther Anders s’inquiétait et s’interrogeait sur les causes de « notre aveuglement en face de l’Apocalypse ». Sa réponse était claire, une nouvelle religion était née. Le « Monde civilisé » sorti de la guerre ou plutôt produit de la guerre, était dans son ensemble animé par la « Religion du Progrès ».

« La notion de progrès nous a rendu aveugle à l’apocalypse ». « Bien que la fin [dernière] soit entrée dans le domaine du possible [par apocalypse nucléaire] et que nous disposions de tous les moyens de communication imaginables, il règne pourtant un « calme plat » sur le plan eschatologique. » « Pour celui qui croyait au progrès, l’histoire était a priori sans fin puisqu’il la voyait comme un heureux destin, la progression imperturbable et irréversible du toujours meilleur (9). »

Dans ces années là, en effet, plus que le « calme plat », c’est l’euphorie générale, les « démocraties avancées » « avançaient à grands pas » et appliquaient au « monde occidental » le programme du Parti National Socialiste, elles motorisaient massivement la population (10). A la production comme à la consommation, les « heureux héritiers » de la Seconde Guerre mondiale devenaient en masse des consommateurs d’énergie. Ils se familiarisaient avec cette notion scientifique, s’émerveillaient sur l’efficacité des moteurs à explosion et sur les prouesses exceptionnelles de la Fée électrique.

Dans cet élan collectif et joyeux, ils devenaient d’heureux automobilistes téléspectateurs…

Ce qu’avait bien pensé et prévu Günther Anders mais qu’il n’avait pas pu exprimer explicitement, c’est qu’un « scénario catastrophe » puisse servir « d’apocalypse devanture » (11) pour occulter « l’apocalypse nucléaire » toujours réelle (12) et même plus légitimer une nouvelle « fuite en avant » de l’entreprise nucléaire…

Changement radical de décor… Aujourd’hui « l’Apocalypse » reprend du service et a trouvé son visage dans la « Religion du Progrès », « Le Réchauffement Climatique ».

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La dialectique historique est diabolique, « Le Réchauffement climatique » fait aujourd’hui office de « menace nazie » et encore une fois, comme à son origine, c’est le nucléaire qui prétend repousser l’apocalypse. A l’unanimité, dans les états majors politiques, le nucléaire est célébré comme « La Solution » « incontournable » pour ne pas dire « la Solution Finale » à la menace. En France c’est Sainte sœur Anne qui porte bien haut le flambeau support de la « flamme nucléaire » salvatrice.

Tout comme la Bombe Atomique il y a un demi-siècle, le nucléaire affiche encore la prétention de « sauver l’humanité et la planète » d’une « menace colossale ». Sainte sœur Anne parle de « planète en péril » et de « menace d’un monde invivable ». Dans sa « tête bien pleine », la menace est claire « comme une image », c’est « L’Apocalypse Climatique ».

Pour nous convaincre Sainte sœur Anne de l’avant-garde consciente, n’a plus peur des mots et insiste, « pour éviter la menace du « monde invivable » il faut entreprendre la « Troisième Révolution Énergétique ». Dans sa suite, pour vendre dans l’urgence des centrales nucléaires, l’ensemble du Léviathan technocratique et « révolutionnaire énergétique » « pour sauver la Planète » découvre la nécessité de réintroduire une « Apocalypse » dans la « Religion du Progrès ».

L’histoire infernale se répète donc, toujours inchangée pour perpétuer et s’obstiner dans sa logique totalitaire.

« Thermostater » la planète, le Léviathan technocratique à l’unanimité avec sa domesticité d’experts scientifiques et cinématographiques, « armés de leur apocalypse » s’activent énergiquement pour vendre des centrales nucléaires.
Mais sont-ils encore crédibles, puisque en définitive toute cette entreprise nucléaire dont Sainte sœur Anne est aujourd’hui l’héritière, a commencé de manière criminelle, avec la guerre et sous le prétexte de contrer « l’expansion de « l’annihilisme » national-socialiste » ?

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Notes

(5) Gûnther Anders critique ce mot « essai » dans « Hiroshima est partout » Ed. Seuil 2008
Le nazisme a survécu au Japon même avec la Bombe et malgré les Bombes tombées sur Hiroshima et Nagasaki. Grace à la Bombe et ses milliers de mort instantanés de l’atome et ses milliers de « morituri » irradiés, c’est un Léviathan technocratique qui triomphe après guerre et impose le nucléaire pour perpétuer la verticalisation totalitaire de la société devenue énergivore.
(6) René Dumont « L’Utopie ou la Mort » Ed. Seuil 1973. L’auteur parle déjà du problème de « l’effet de serre » de manière très précise et catastrophique des les années 1970…
(7) Voici ce que l’on pouvait lire sur le « réchauffement climatique » dans un livre « grand public » sur « la vie de la forêt » paru en 1970. « Ce ne sont pas là des propos en l’air : les effet du déséquilibre causés par l’homme (« civilisé ») sont déjà sensible. Les mesures effectuées par des laboratoires américains prouvent qu’en un siècle le taux de gaz carbonique dans l’atmosphère s’est accru de 15 % et il a été constaté que les températures moyennes du globe se sont élevées d’un demi-degré en un siècle. Tous les scientifiques s’accordent aujourd’hui [fin des années 1960, il y a un demi- siècle maintenant] pour relier cette tendance constante à l’échauffement à l’effet de serre dû aux gaz carbonique. De nombreuses constatations donnent, par ailleurs, la certitude que le phénomène du recul des glaces est déjà nettement amorcé. » Bernard Fischesser « La Vie de la Forêt » Ed. Horizon 1970.
(8) Terme de Günther Anders (« L’Obsolescence de l’homme ») pour caractériser la société industrielle issue de la Seconde Guerre mondiale dominée par les marchandises et l’injonction à consommer propagée par les « médias » de masse. Dans ce monde le « mensonge est devenu vrai », car réalité matérielle entourant en permanence et de toute part et pénétrant « par tout les pores » chaque individu. Les agences de propagandes (publicitaires) n’ont plus la contrainte de savoir si leur « discours » verbal ou en image est conforme à une quelconque l’idéologie officielle, c’est l’efficacité qui compte. Toute critique de la « pub » peut être aujourd’hui et en toute logique stigmatisée comme « rétrograde » et pire comme « idéologique »…
(9) Günther Anders « L’Obsolescence de l’homme » page 308 « Causes historique de l’aveuglement face à l’apocalypse »
(10) voir sur site carfree France : La dictature automobile
Cette affiche nazie de 1936 incite la population allemande à voter pour Hitler en notant ce qu’il a fait pour favoriser la propriété d’automobiles en Allemagne.
La légende dit: “le Führer a promis de motoriser l’Allemagne. En 1932, 104.000 véhicules à moteur étaient manufacturés, 33.000 personnes ont été employées, et des marchandises avec une valeur totale de 295.000.000 marks ont été produites. En 1935, 353.000 véhicules étaient manufacturés, plus de 100.000 personnes ont été employées, et la valeur des marchandises produites était de 1.150.000.000 marks. Le Führer a donné à 250.000 camarades un travail dans l’industrie automobile et ses fournisseurs. Les allemands: Remerciez le Führer 29 mars! Donnez-lui votre voix!“.
(11) Troisième thèse rappelée dans sa préface à la 5e Edition de « L’Obsolescence de l’homme » « Nous ne croyons que ce qu’on nous autorise à croire – ou plutôt ce que nous devons croire, ou plutôt ce qu’il faut impérativement que nous croyons (page 12)… » Relatif au chapitre « Le monde comme fantôme et comme matrice » (page 117).
(12) Le Monde vendredi 27 février 2009 A la rubrique « faits divers » En fevrier 2009 deux sous-marins nucléaires « amis », un Français et un Britannique, se sont heurtés, un événement hautement improbable… « Le Triomphant » avait à son bord 96 têtes nucléaire d’une puissance équivalente à 1000 fois celle d’Hiroshima. En face le « Vanguard » disposait d’un arsenal comparable… L’apocalypse nucléaire n’a donc plus besoin d’un conflit mondial entre « superpuissances », un malencontreux accident de la circulation entre SNLE peut suffire… (Sous-marin Nucléaire Lanceur d’Engins)