La bagnole, la poubelle et l’albatros

Il faut rappeler aux optimistes que la bagnole, ce n’est pas qu’une “bagnole”. C’est tout ce qui va avec. C’est l’asphaltage à l’infini. C’est l’agression visuelle qui ne choque plus. Que voit un enfant qui mesure un mètre quand il se marche sur le trottoir ? Bagnole, bagnole, bagnole, bagnole…à perte de vue. C’est obsédant, toujours le même objet. Nausée !

N’oublions jamais nos arguments : la voiture enlaidit, la voiture détruit tout et crée un ensemble de dépendances qui donnent des excuses à Monsieur Tout-le-monde : “Tout seul, je n’ai pas la possibilité de changer, c’est à l’État et aux industriels de le faire.”

C’est aussi valable pour le problème des autres objets jetables, particulièrement en plastique. Bien sûr que les principaux responsables sont les commerçants, les industriels, les hommes politiques, les publicitaires. Résultat ? Des continents de plastiques qui ne sont la faute à personne, car chacun est soumis à un supérieur responsable qui est le seul vrai décideur. La faute au destin ? Ce qui advient ne pouvait qu’advenir?

N’empêche, si aujourd’hui j’ai acheté une bouteille en plastique, je sais que le bouchon finira dans le ventre d’un albatros. Les décharges en plein air existent toujours et sont balayées par le vent. Une grande partie de nos déchets ne finit ni à la benne à ordure, ni à l’incinérateur. Il ne faut pas se voiler la face. Alors nous pouvons un peu agir. C’est chiant, mais cela devient une habitude : manger des fruits et légumes de saison non emballés, du riz de Camargue non emballé qui ne coûtent pas plus cher (parfois moins cher qu’en grande surface)…

Lire aussi :  La Criticona 2009 à Madrid

Depuis quelques temps, j’ai décidé de jeter mes déchets organiques (épluchures, pelures…) sur un petit îlot de terre situé devant un garage souterrain. Résultat : les gens ne sont pas choqués par le garage et ses immondes bagnoles qui puent, mais par des trognons et des restes de repas sur un monticule de terre. Très bien, alors je vais continuer à les jeter sur les pare-brises du haut de ma fenêtre.

Ce n’est toujours pas choquant que ce soient des énormes camion-diesel qui ramasse les déchets. Quand le sera-ce ? Quand ne serai-je plus un extraterrestre, un fou, un criminel ? Comment finira cette somme d’absurdités ? La mort d’un albatros après avoir avalé 300 grammes de bouchons en plastique est-elle tragique ou absurde ? Je n’arrive pas à trouver cela tragique. Ce n’est pas possible. Avant notre époque, il y a toujours eu des morts bêtes, ridicules, indignes, mais pas à une telle échelle. Pas à une échelle industrielle. Nous avons perdu jusqu’au caractère tragique de notre mort, la seule beauté qui restait dans la douleur, la seule beauté qui permettait de la magnifier, de l’accepter, de la désirer ou de la supporter.

Crédit image: David Erlich 2003-2005

22 commentaires sur “La bagnole, la poubelle et l’albatros

  1. Sandro Minimo

    La commune de Carouge à Genève (Suisse) a instauré un ramassage des ordures à triporteurs électriques…

    http://www.tdg.ch/geneve/actu/carouge-instaure-levee-ordures-velo-2009-10-27

    et la commune de Coppet (pas loin) a misé sur des chevaux…

    http://www.24heures.ch/vaud-regions/actu/evacuer-dechets-coppet-mise-energie-cheval-2010-03-31

    Voilà de bonnes vraies solutions… quant à la bagnole, je suis parfaitement en phase avec les premiers arguments, on oublie trop souvent de dire que le problème de la bagnole c’est tout ce qui va avec…et cette laideur… et le paysage urbain pour les gamins…

  2. cycliste alcolique

    J’adore!
    Merci Minou.

    Tu parles des emballages et des objets jetables.
    Je suis passé aux produits Bio et le plus possible locaux depuis peu. Surtout depuis que j’ai lu un bouquin qui m’a foutu la frousse. Depuis plus de pesticide (pour la santé et l’environnement), plus d’OGM, pour la santé encore, mais surtout pour des raisons politiques.
    J’ai trouvé un petit supermarché Bio pas très loin. J’y vais à vélo. Lorsque je déballe mes courses, je me retrouve avec toujours autant d’emballages. Concombre Bio mais emballé dans un film plastique. Biscuits emballés par par groupe de 4 dans un sac plastique, le tout contenu dans une boite en carton… Et là, je réalise tout le chemin (inverse) qu’il nous reste à faire. Je pensais, naivement que écologie et produits biologiques allaient un peu plus de concert.

  3. Minou

    Je sais, Cyclalcoolo. Dans un de ces commerces « éthiques », j’ai trouvé, tiens-toi bien… du sucre de palme emballé dans du bambou puis suremballé dans du plastique, le tout évidemment importé de l’Asie la plus lointaine. La totale quoi !
    Le problème est insoluble, car les producteurs et les revendeurs ont toujours réponse à tout : « Si on ne s’adapte pas au marché, on coule. » Conclusion : rien ne change, il faut toujours produire plus, et plus vite, donc on ne peut pas se passer d’emballages. De plus, les habitants des villes doivent acheter des produits qui viennent de plus en plus loin à cause de l’étalement urbain. Certains Américains qui en ont ras-le-bol de l’asphaltage infini font régulièrement du « depaving », c’est-à-dire qu’ils enlèvent le béton de certains endroits (après autorisation du maire je suppose). Mais voilà l’absurdité : ils transportent tout ce béton je ne sais où à l’aide d’énormes trucks qui consomment des tonnes de diesel. Mais au moins, le geste part d’un bon sentiment.

    Le principal problème, il me semble, est que les individus refusent d’admettre leur responsabilité. Les automobilistes pensent que c’est uniquement à l’État et aux industriels de leur donner la « possibilité de se passer de voiture ». Mais dans cette expression réside l’hypocrisie la plus éhontée, la pire absurdité. Elle revient à dire que nous sommes arrivés à un point de non-retour ; que la bagnole et les bateaux qui se meuvent grâce à un moteur diesel sont le stade ultime de la civilisation. Elle revient à dire que le bateau à voile, c’est la barbarie. Qui oserait affirmer aujourd’hui (sans craindre de passer pour un dingue ou un homme « préhistorique ») que les transports maritimes et aériens sont immoraux ?

    « C’est à ce prix que vous mangez du sucre », disait Voltaire au XVIIIème siècle, à propos de l’esclavage des Noirs.

    Eh bien, aujourd’hui, c’est au prix de milliards de tonnes de diesel dans l’air et dans l’eau que nous mangeons du sucre, du café, des épices… Et c’est toujours au prix des esclaves bio, des esclaves éthicables, équitables, appelons-les comme on voudra… Sont-ils pas beaux « les petits producteurs » en photo sur les boîtes de café Max Haavelar ? Comme ils respirent l’éthicabilité et l’équitabilité !

    Tant qu’il n’y aura pas de grandes catastrophes que les aveugles puissent voir, cette absurdité continuera. Mais quand ils auront honte, il sera trop tard. Ils les auront enfin, leurs « preuves ». Mais qu’en feront-ils?

    J’ai fait le pari, sur un site ami de Carfree, qu’un jour (dans 20 ans, ou 40 ?), avoir un truc à roulettes qui se propulse à l’aide d’un carburant sera considéré comme honteux, de même que les transports qui ne respectent pas les limites écologiques. Irais-je jusqu’à dire que les limites écologiques se situent au niveau du cheval et du bateau à voile ? Non, car je serais traité d’extrémiste. Mais alors les époques qui précèdent le XIXème siècle étaient-elles toutes barbares ? C’est plutôt notre modernité qui a détruit tout sacré par la fabrication d’objets laids reproductibles à l’infini. Ainsi, notre modernité nous aurait affranchi des besoins bestiaux ? Laver son linge au lavoir, ce serait de l’esclavage ? Peut-être que nous ne lavons pas notre linge au lavoir et que nous ne nous déplaçons plus à pieds ou à cheval, mais tout ce qui nous reste de sacré est dans les musées. Où est la possibilité d’avoir l’expérience du divin devant un temple grec ou une cathédrale s’il y a un putain de panneau de signalisation devant et des putains de bagnoles qui cherchent à se garer le plus près possible pour ne pas fatiguer ses petits mollets ? Il paraît qu’au moyen-âge, les charrettes pouvaient circuler d’une porte à l’autre à l’intérieur des cathédrales, mais bordel, ces charrettes n’étaient pas toutes les mêmes ; elles se ressemblaient mais il n’y avait pas qu’un seul modèle !
    Mais peut-être qu’après tout, le « progrès » vient du christianisme et de son mépris pour l’irrationnel, qui nous a conduit au règne de la sainte Raison, et par le fait, à celui de la sainte Technique et du Progrès qui n’en finit jamais de progresser.

    Nietzsche, vers 1879, disait qu’on a pas encore tiré les conclusions, pour les mille ans (humhum) à venir, de la presse, de la machine, du chemin de fer et du télégraphe.

  4. cycliste alcolique

    @Minou,
    C’est là qu’on voit que le Bio n’est qu’un nouveau marché qui s’adresse principalement à une clientèle soucieuse se sa santé (ou froussarde comme moi). Pour quelque $$ de plus, tes raisins importés de Californie ne sont pas irradiés, bombardé de pesticides, génétiquement modifiés. Ça ne modifie pas vraiment notre façon de consommer.

  5. Minou

    Non, en effet. Notre façon de consommer et de nous déplacer changera bientôt ; pas par la naïve bonne volonté et la conscience intranquille de quelques-uns ou de tous, mais par les catastrophes à venir. Car il n’y a pas de solution. La majorité des individus croit toujours au « Progrès ». Elle croit toujours que « on » ou « L’État » ou « ils » vont faire à sa place les choix qu’elle rechigne à faire. C’est ça la démocratie : le pouvoir des cons. La citoyenneté se résume à voter et à payer ses impôts, pendant que quelques cons prennent des décisions qui remettent en cause l’existence même de tout être vivant.

  6. Gildas

    @Minou
    En effet, niez la réalité (ce que font la plupart des gens qui ne se pose pas de question) pour vivre dans l’illusion n’est pas une solution à terme.
    Ensuite, après une prise de conscience, être choqué par la réalité (vous, moi) est légitime, mais est ce réellement possible de vivre ainsi?
    Enfin il me semble que la troisième étape est celle d’atteindre l’attitude du sage qui sait mais qui a accepté la réalité dans son intégralité, qui vit en harmonie avec son environnement (souvent reclus donc) et qui prodigue ses conseils avec sérénité aux personnes qui ne connaissent pas encore la vérité et qui peuvent elles aussi à leur tour prendre conscience de la réalité et au fur et à mesure, si tout le monde atteint ce niveau, le changement aura lieu?

    Merci à carfree pour vos articles

  7. Minou

    « (…)au fur et à mesure, si tout le monde atteint ce niveau, le changement aura lieu? », dites-vous, Gildas ? Vous êtes bien optimiste…

    Le changement aura lieu en effet, mais tout sera déjà tout gris, ou peint en vert. L’attitude du sage serait de changer cette boue en or. Mais vous ne pourrez nettoyer l’air ni l’eau, ni défaire des atomes assemblés irrémédiablement pour des dizaines de milliers d’années. Vous ne transformez pas les déchets radioactifs en des non-déchets radioactifs.
    Tout ce que l’écologie et le développement durable produiront, c’est de la peinture verte, jusqu’à ce qu’il n’en reste même plus. Et les prochaines grandes catastrophes, notamment les crises agraires à venir – puisque les sols sont pourris – ne feront même pas remettre en cause la notion de « progrès ». On se demandera plutôt quel progrès on pourrait encore faire pour surmonter ces catastrophes, quelles nouvelles technologies on pourrait inventer. Et ainsi de suite…

  8. Gildas

    Optimiste ou alors pessimiste car la condition que tout le monde atteigne le niveau de connaissance suffisante n’est pas facilement réalisable! En fait le sage est finalement hors du jugement car il n’ignore pas que la souffrance (le tragique) fait totalement partie de la condition de l’homme et que le ‘Progrès’ en tant qu’idéologie (pas les différents progrès techniques qu’on peut constater ponctuellement chacun) ne résoudra jamais les souffrances et le côté tragique du monde.
    Sur ce dernier point, on le sage et vous êtes d’accord! 😉

    De mon point de vue, informer sur la vérité et chercher à comprendre est utile et nécessaire, beaucoup plus que de juger car et il ne faut pas souffrir à cause du jugement que l’on peut porter sur la situation.

    Restons passionnés et réalistes!

  9. Minou

    Être réaliste, c’est comprendre une fois pour toutes que les cons croiront toujours en la Technique, que c’est la Technique qui nous sauvera d’elle même. Le Progrès et la Technique ont définitivement tué le divin. Les cons finiront par douter de la Technique quand elle aura tout dévasté. « Ah oui, finalement », remarqueront-ils. Ou alors ils ne remarquerons rien du tout, habitués qu’ils seront au gris et à la laideur depuis l’enfance. La Technique n’aura alors plus qu’à crever, et nous avec, comme Dieu il y a près de deux siècles.

  10. Pim

    @Minou : Là où je suis complètement d’accord, c’est que la technique ne sauvera pas tout! Telle qu’elle est employée aujourd’hui, càd à des fins productivistes et consuméristes, c’est du grand n’importe quoi. Par contre elle offre beaucoup de solutions aux problèmes actuels (et non je ne parle pas de voiture électrique là! 🙂 ) bien plus que la religion je pense.
    Quand je lis « Le Progrès et la Technique ont définitivement tué le divin », je trouve que c’est pas si mal au fond!

    C’est quand même grâce à la technique que tu roules à vélo et que tu manges tous les jours à ta faim! Mais c’est avant tout à cause du marketting que tout le monde s’endette pour disposer d’une houature et du mobile dernier cri AieFouneTouche gadget plus …

  11. Minou

    Je mange tous jours à ma faim, en effet, puisque je fais partie des quelques millions de personnes qui ont ce privilège. Quelques millions sur plus de six milliards. Ton constat est donc très creux : tu raisonnes en termes de résultats (je mange à ma faim) sans prendre en compte la façon dont ces résultats sont rendus possibles (l’esclavage de 80% de l’humanité). C’est aussi nul que « c’est quand même grâce à la technique que tu roules à vélo ». Tu n’as pas compris ce que j’ai dit.

    Si je mange tous les jours à ma faim, c’est parce que le Nord exploite le Sud. C’est parce que la terre est violée pour ses fruits. Comprendre la Technique, ce n’est pas peser le pour et le contre. Ce n’est pas jouer à débit-crédit comme sur une feuille de calcul.

    Si c’est pour répondre « Voyons le bon côté des centrales nucléaires, tout dépend l’usage qu’on en fait »… ce n’est pas la peine de répondre. C’est trop creux. Il faut aller plus loin.

  12. Minou

    Bien entendu, tu ne considères absolument pas la CROYANCE, la FOI en la Technique comme une religion, comme un dieu, n’est-ce pas ?

  13. Gildas

    @Minou « Le Progrès et la Technique ont définitivement tué le divin »
    C’est vrai que la technique domine comme idéologie de nos société développées, mais le divin existe toujours il me semble?

    Faut pas se sentir mal par rapport au tragique inné du monde, c’est un choix personnel de regard sur le monde, vu que quasiment personne n’a de regard objectif.
    Rien que de l’améliorer modestement à son niveau, c’est déjà beaucoup. Qui peut prétendre résoudre tous le maux de la terre?

  14. Pim

    Effectivement Minou, la Technique apparaît hélas presque comme une religion pour certains, mais l’avantage, c’est qu’on peut argumenter pour la discuter la remettre en cause et la faire avancer avec des preuves, chose qu’on ne pouvait pas faire avec la religion! Ceci dit, c’est déjà un tort d’en faire une religion!

    Les arguments que tu développes (escalavage) sont des arguments sociaux et non techniques… Je ne pense vraiment pas que la technique soit responsable (du moins, si elle a une part de responsabilité, c’est très indirectement). Les problèmes sont avant tout économiques et politiques.
    Pour évoquer des progrès qu’on ne peut nier, il s’agit des progrès d’hygiène et de médecine dans le monde entier réalisé en 1 siècle!

    Enfin, mon opinion n’est pas du tout incompatible avec la décroissance, puisque je pense qu’il faut revenir à des « choses simples », de même qu’en sciences de nombreuses solutions à nos problèmes sont solvables par des » choses simples ». Evidemment, tant que les enjeux seront d’abord financiers, ce sera difficile de faire dse « choses simples », le superflu, le sophistiqué, et même l’inutile étant bien plus rentables.

    (Désolé pour cette réponse un peu décousue, mais c’est pas évident de faire 3 choses à la fois)

  15. Minou

    « Les problèmes sont avant tout économiques et politiques », dis-tu, Pim ? Économie, politique et technique ne seraient pas liées ??? Ce ne serait pas une seule et même chose ?

    « Pour évoquer des progrès qu’on ne peut nier, il s’agit des progrès d’hygiène et de médecine dans le monde entier réalisé en 1 siècle! »

    Est-ce un progrès de vivre plus longtemps ? Certes, les Japonais vivent très vieux, mais dans quel état ? Dans quel but ? À quoi ressemble le Japon aujourd’hui ? Qui es-tu pour dire que telle chose est un progrès par rapport à une autre ? Notre modernité est-elle un modèle par rapport au passé ? Notre époque regarde le passé du haut de sa pyramide d’accumulation de savoir, comme si le passé n’avait comme unique sens que d’aboutir à nous, modernes.

    L’historien humaniste Burckhardt – qui n’était pas dupe de ce qui était en train de se passer – écrivait, en 1867, à propos de la montée des nationalismes en Europe et de la technophilie dominante :

    « Tout dépend de savoir comment notre génération soutiendra cette épreuve. Il peut venir des temps de profonde misère. Nous voudrions savoir sur quelle vague de l’Océan nous flottons, mais nous sommes nous-même cette vague. Cependant l’humanité n’est pas destinée à périr encore [humhum], et la nature continue à créer avec autant de bienveillance que jamais. Mais si dans le malheur il doit y avoir encore un bonheur, il ne peut être que de nature spirituelle, tourné en avant pour une défense inlassable et sereine de l’esprit, en un temps qui, sans cela, risquerait d’être complètement ASSUJETTI À LA MATIÈRE. »

    En 1870, il écrivait dans une lettre que « les hommes d’aujourd’hui (…) sacrifieront s’il le faut toutes leurs littératures et leurs civilisations propres pour avoir des trains de nuit directs. »

    Il faut arrêter de se regarder le nombril. Tant que le passé ne redeviendra pas un modèle pour nous (ainsi qu’il l’a été jusqu’à la fin du XVIIIe siècle), nous n’aurons comme perspective que le développement durable, qui durera, durera, durera. Un développement durable qui se contentera non pas de NE PAS POLLUER, mais de polluer « durablement », « raisonnablement », de polluer dans « des proportions acceptables ». Tant que tous les « conforts » – que nous considérons comme évidents, comme allant de soi parce qu’acquis depuis longtemps – ne seront pas remis en cause, ne seront pas perçus comme immoraux, égoïstes, maladifs, alors nous n’aurons aucune perspective d’avenir. Nous sommes tels des hamsters dans la roue du Progrès, car actuellement, c’est encore trop « ringard » et irréfléchi » de le remettre en cause. Soit. Continuons d’être des hamsters ! Des rats ! Les rats survivent à tout, même à l’hiver nucléaire, paraît-il.

  16. TP

    Tu dis beaucoup de choses très intéressantes auxquelles j’adhère Minou.
    Par contre, contrairement à toi, je suis convaincue que le passé n’est pas un idéal à atteindre (« Tant que le passé ne redeviendra pas un modèle pour nous, nous n’aurons comme perspective que le développement durable, qui durera, durera, durera. »)
    D’accord, les générations passées ne détruisaient pas autant la planète, elles n’étaient pas aussi égoïstes (quoi que… la nature de l’homme…), elles vivaient avec plus de valeurs, etc.
    Pourtant le passé n’était pas un jardin merveilleux : guerres, esclavage, exploitation des femmes (jamais je ne voudrais connaître l’existence des femmes d’avant 68, sachant qu’il reste encore beaucoup à faire, à l’étranger mais aussi en france!) …

    Bref, la société actuelle est en perdition, mais le passé n’est pas la voie vers laquelle se tourner!!
    L’idéal est à créer ; chacun à notre échelle, agissons pour un monde meilleur! Et si le capitalisme et cette société pourrie ont raison de nous, au moins nous aurons essayé!
    Si nous échouons, cela ne sera que la preuve que l’humanité n’est pas ce qu’elle se prétend être : ce que le monde à fait de meilleur!

  17. Minou

    À TP:

    « Pourtant le passé n’était pas un jardin merveilleux : guerres, esclavage, exploitation des femmes (jamais je ne voudrais connaître l’existence des femmes d’avant 68, sachant qu’il reste encore beaucoup à faire, à l’étranger mais aussi en France!) … » dis-tu.

    Et aujourd’hui ? Pas de guerres ? L’esclavage n’existe plus ? ni l’exploitation des femmes ? Êtes-vous aveugle ?

    Mais faisons comme si vous aviez raison. Faisons comme si nous nous trouvions dans un état de paix momentané. MOMENTANÉ. Mais à quel prix ? Au prix de faire de la terre une poubelle, voilà à quel prix nous avons notre liberté momentanée. Ces guerres, dont vous vous réjouissez qu’elles se soit raréfiées, vous les aurez bientôt, et au niveau planétaire. Elles sont déjà là. Il n’y a même plus de différence entre la guerre et la paix.

  18. Gildas

    Je suis d’accord avec Minou sur le fait que le tragique du monde ne sera pas résolu par le Progrès technique.
    Néanmoins, il faut accepter ce tragique sans le nier et sans non plus en être désespéré puisqu’il sera toujours présent.
    Aujourd’hui n’est pas plus tragique qu’hier.
    Enfin chacun peut œuvrer à son niveau pour en limiter la diffusion locale et surtout son impact sur les personnes vivant aujourd’hui, à proximité de soit ainsi que les pour les personnes dans le futur.

  19. Minou

    Le tragique du monde n’a pas à être résolu. Ou alors nous n’avons qu’à aller nous faire chier au paradis ou chez les Bisounours. J’ai précisé justement que nous avons perdu le caractère tragique de notre mort et de notre vie. J’ai pris comme exemple – j’aurais pu en prendre d’autres – la mort des albatros à cause de nos objets en plastique. C’est une mort absurde et pitoyable, ce qui est différent d’une mort tragique. À partir de la reproductibilité technique de tous ces petits bouchons de plastique et autres bidules, la poésie n’a plus été possible, ni un regard poétique sur le monde. Ou alors si : quand nous nous échappons vers les îlots de ce qui reste de nature.

  20. Minou

    « il faut accepter le tragique(…) », dites-vous, Gildas.

    Je suis tout à fait d’accord, sauf que le « tragique » de notre monde moderne est fondamentalement différent du tragique du monde pré-industriel. Ce n’est que mon avis, je ne demande qu’à être contredit.
    Il me semble qu’il y a une différence essentielle entre le tragique (qui peut être absurde et poétique à la fois) et l’absurde absolu, cette merde qu’on aimerait bien transformer en or, sans y parvenir, ou alors en se contentant de minables consolations.

Les commentaires sont clos.