Accélération – Une critique sociale du temps

L’expérience majeure de la modernité est celle de l’accélération. Nous le savons et l’éprouvons chaque jour : dans la société moderne, « tout devient toujours plus rapide ». Or le temps a longtemps été négligé dans les analyses des sciences sociales sur la modernité au profit des processus de rationalisation ou d’individualisation. C’est pourtant le temps et son accélération qui, aux yeux de Hartmut Rosa, permet de comprendre la dynamique de la modernité.

Pour ce faire, il livre dans cet ouvrage une théorie de l’accélération sociale, susceptible de penser ensemble l’accélération technique (celle des transports, de la communication, etc.), l’accélération du changement social (des styles de vie, des structures familiales, des affiliations politiques et religieuses) et l’accélération du rythme de vie, qui se manifeste par une expérience de stress et de manque de temps.

La modernité tardive, à partir des années 1970, connaît une formidable poussée d’accélération dans ces trois dimensions. Au point qu’elle en vient à menacer le projet même de la modernité : dissolution des attentes et des identités, sentiment d’impuissance, « détemporalisation » de l’histoire et de la vie, etc. L’auteur montre que la désynchronisation des évolutions socioéconomiques et la dissolution de l’action politique font peser une grave menace sur la possibilité même du progrès social.

Marx et Engels affirmaient ainsi que le capitalisme contient intrinsèquement une tendance à « dissiper tout ce qui est stable et stagne ». Dans ce livre magistral, Hartmut Rosa prend toute la mesure de cette analyse pour construire une véritable « critique sociale du temps » susceptible de penser ensemble les transformations du temps, les changements sociaux et le devenir de l’individu et de son rapport au monde.

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Accélération
Une critique sociale du temps
Hartmut ROSA
Editions La Découverte

5 commentaires sur “Accélération – Une critique sociale du temps

  1. joshuadu34

    un monde pressé (dans tous les sens du terme) urgentisé pour répondre à un impératif de « rentabilité », du toujours plus… au point où même le temps qu’il fait devient un ennemi, comme on a pu le voir cet hiver, et l’entendre quand cette neige bloquait tous et empêchait « d’aller au travail ». Un travail où le toujours plus est une règle immuable « travailler plus pour travailler plus pour travailler plus… »

    Et, de là, ce « besoins » d’avoir une auto pour « gagner du temps », et, quand l’auto est contestée, on cherche le moyen permettant de gagner ce temps (il y en a, ici aussi) sans même réflechir à ce « gain » et à sa signification… Gagner ? non, perdre, perdre plus de temps, perdre plus de vie, perdre plus de réel bonheur pour assurer un erzats consummériste.

    La vie n’est plus qu’une question de temps ! On fait de nous des esclaves de l’horloge ( dieu sinistre, effrayant, impassible (…) Chaque instant te dévore un morceau du délice ), et nous suivons, oubliant que la vie necessite de lever les yeux de la montre et que le délice de Baudelaire, tout comme le notre, ne se cache pas derrière une aiguille !

    Pour ma part, le temps, je le prend ! J’ai couru, comme tous, pour gagner quoi ? Des ennuis de santé et une vie passée à courir pour « gagner du temps » alors qu’en fait, je ne faisait que le perdre. Maintenant, je ne cours plus ! Je prend le temps de ne pas avoir de temps, d’heure ! Et vous savez quoi ? Et bien le temps après lequel je ne cours plus me permet de vrais bonheurs quotidiens !

  2. Minou

    « L’homme court le risque d’être réduit à ce qui n’est que travail », disait Heidegger. Une « bête de labeur » dans un non-monde totalement bétonné ; habitué, conditionné à la laideur des villes, des grattes-ciel qui rendent la Terre impoétique peut-être pour toujours…

    « La bête de labeur est abandonnée au vertige de ses fabrications, afin qu’elle se déchire elle même, qu’elle se détruise et tombe dans la nullité du Néant. » (cf une des conférences (je ne sais plus laquelle) publiées dans les Essais et conférences.

    Cette bête de labeur, dont nous avons un exemple avec les rémy, les urb et les goupil qui se ridiculisent sur Carfree, c’est elle qui hait les « assistés », les « profiteurs » (étudiants boursiers, étrangers, chômeurs) brefs les « improductifs » parce que ceux-là, il est plus facile de les attaquer que les Bettancourt milliardaires. Pourquoi, rémy, urb, goupil ? Parce qu’en vérité vous les admirez, ces milliardaires, vous considérez cet état de fait comme normal, vous êtes des esclaves soumis, volontaires, zélés, vous faites toujours plus qu’on ne vous demande, parce que vous aimez lécher le Q des patrons. Parce que vous aimez le travail et la destruction, aussi stupides soient-ils.

  3. Minou

    En 1938, Daladier voulait « remettre la France au travail »
    Sarko a repris exactement la même expression.
    Peut-être que si les rémy, les urb et les goupil travaillaient un peu moins et se posaient un peu plus de QUESTIONS SUR LA NOTION DE TRAVAIL, ils arrêteraient d’employer les termes « assistés » et « profiteurs »… qui ont une très, très, très mauvaises odeur… ne la sentez-vous pas d’ici ? ces termes ne font-ils frémir que moi ?

    http://www.dailymotion.com/video/xhq8s_marre-des-pauvres_fun

    On peut peut-être remplacer « pauvres » par « assistés » ou « profiteurs », n’est-ce pas rémy ?
    Ou alors par « parasite » ? « cancrelat » ? « poux » ? « racaille » ? qu’est-ce que tu préfères ?

    http://www.didiersuper.com/benquoiquibosse.htm

  4. joshuadu34

    @ minou : sans doute « l’essence de la technique » ?… bien que la citation apparaisse aussi dans un recceuil sous le titre « projet pour l’histoire de l’être »…

    À completer, toutefois, par la lecture attentive de Veblen, dans la « théorie de la classe de loisirs »…

  5. Minou

    Je crois que c’est plutôt dans Dépassement de la métaphysique. Je n’ai pas le livre chez moi mais quand j’aurai le temps j’essaierai d’en mettre des extraits sur le site. Heidegger est un auteur extrêmement important et en même temps son interprétation de la modernité est dure à cerner. Il pensait qu’il faut « (…)éprouver la machination de l’homme comme son destin, au lieu de la réduire à une simple affaire d’arbitraire et d’aveuglement(…) » et avouait en même temps n’avoir aucune solution miraculeuse au problème du nihilisme. Selon lui, pour « que nous ne fassions pas que crever » de cette technique moderne, nous ne pouvons que penser, et rien de plus. C’est là que je décroche. Il ne voulait pas être un « faiseur d’opinion »…

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