Des trajets plus courts, plus rapides et plus sûrs… pour les cyclistes !

Les dernières réalisations cyclables du Grand Toulouse et de Tisseo démontrent une chose : le vélo n’est pas encore considéré comme un moyen de déplacement à part entière par ces collectivités.

Mettons de côté le loisir et la balade et parlons de ce qu’un cycliste a besoin pour aller travailler, étudier, faire ses courses, … :  des trajets les plus courts possible, les plus rapides possible et les plus sûrs possible.

Ces conditions sont évidemment très difficiles à réunir, nous ne sommes pas (encore ?) au Danemark ou en Hollande !! Pourtant ce sont elles qui peuvent rendre le vélo compétitif par rapport à la voiture individuelle.

Malheureusement, à Toulouse, les objectifs des aménageurs ne vont pas exactement dans ce sens. Si la sécurité par rapport aux voitures est évidemment au centre des préoccupations, les gymkhanas, trottoirs partagés et autres pistes cyclables perdant la priorité tous les cinquante mètres sont très en vogue.

Parmi les derniers aménagements construits, l’un m’a particulièrement interpelé, il s’agit du boulevard des Récollets. Il est assez symptomatique du bon et du beaucoup moins bon de nos aménageurs.

fin de piste Dans le sens vers la Croix de Pierre, seule la partie après la rue Achile Viadieu est équipée. Une bande cyclable en remplacement d’une voie de circulation (s’il vous plait !) mais la bande « monte » sur le trottoir… réservé aux acrobates !
traversée La suite se déroule sur le pont du Stadium, avec la piste existante, bien délimitée sur le large trottoir mais les traversées des rues perpendiculaires ne sont pas équipées (passages piétons impliquant théoriquement de traverser… à pieds), sans priorité et avec des franchissements de trottoirs « bateaux » particulièrement hauts.
bateau
Bateau très haut à franchir, potelets en travers.

[…]  Venant du pont et après deux traversées hasardeuses, la nouvelle piste monte sur le trottoir.  La piste, bien visible et séparée du cheminement piétonnier (clair = vélo, goudron sombre = piétons, séparée de pavés collés), s’interrompt à l’approche des passages piétons et des carrefours voire même très en avance comme sur la photo.

interruption
50 mètres qui deviennent un trottoir et donc autorisés au seuls cyclistes… âges de moins de 8 ans ! Comme le montre la photo, aucune insertion sur la chaussée, les deux voies de circulation ont d’ailleurs été préservées (alors que la chaussée se réduit à une voie 200 m plus loin !). Le panneau de publicité a évidemment sa place ici, il laisse à peine un mètre de trottoir, la grande classe !
On poursuit par des traversées en passage piéton (il suffirait d’un logo vélo sur la chaussée pour permettre la traversée sur le vélo et non à pieds côté !),…
gymkanha …une belle chicane sans visibilité pour contourner un abribus et à l’arrivée du carrefour de la rue du Férétra, c’est fini ! …
Ah bien non, ça continue ensuite sur une bande cyclable qui, finalement si elle nous amène plus près des voitures, nous facilite la vie pour les priorités et enfin pour se placer sur la chaussée au carrefour suivant, dont le marquage particulier s’avère intéressant pour s’avancer dans les beaux sas à vélo.

Carrefour URSS

Ces aménagements sont légalement facultatifs et le cycliste a le droit de rouler sur la chaussée dont les 2 voies de circulation ont été en majoritairement conservées. Mais il est dommage d’arriver à de telles conclusions sitôt une piste créée. En effet, cet axe est largement emprunté par des cyclistes utilitaires qui veulent aller vite, à l’image des automobilistes juste à côté dont peu sont là pour se promener !

Alors la solution qu’on leur offre c’est de partager les trottoirs avec les piétons… et de devenir piéton le temps d’un traversée ou d’un rétrécissement publicitaire.

Lire aussi :  Autoroutes sans futurs
Cette mode du trottoir partagé, si elle peut répondre au désir de cyclistes en promenade, débutants ou très craintifs, ne permet pas le déplacement efficace à vélo et le partage équitable de l’espace puisqu’elle prend la place aux piétons, laissant la part belle à l’auto pour ne surtout pas la perturber.

Les trois conditions précédentes ne sont pas réunies : si la distance est quasi inchangée, il y a une perte de temps considérable et des conditions de sécurités aléatoires lors des traversées et lorsque la piste disparaît au profit d’un trottoir. Il est également utile de rappeler que les élus mais aussi et surtout les médias et bien sûr les piétons eux-même, à très juste titre, fustigent les vélos sur les trottoirs. C’est interdit officiellement mais les réalisations concrètes l’encouragent !

Alors que faire ?

des aménagements vraiment continus, pris sur la chaussée auto plutôt que sur les trottoirs,
avec priorités claires aux intersections et traversées (une piste est règlementairement considérée comme une voie de circulation de la chaussée qu’elle longe sur le plan des priorités article R415-14),
régulés aux carrefours par des feux vélos décalés à l’image des bus et synchronisés par une « onde verte » calée sur les vitesses vélos (15 ou 20 km/h),
aux jalonnements lisibles,
bateaux « zéros »…

A l’heure où les autoroutes du vélo sont d’actualité dans les villes cyclables, application par excellence du trio distance, temps et sécurité, Toulouse est en complet décalage. A moins que nos aménageurs aient encore le seul aspect loisir et balade pour la pratique du vélo mais on parle là d’une autre époque, non ?

Sebastien Bosvieux – Association Vélo Toulouse –  15 octobre 2010

Source : http://toulousevelo.free.fr/spip.php?article552
Photo « fast lane, fat lane » copyright Love Your bike

10 commentaires sur “Des trajets plus courts, plus rapides et plus sûrs… pour les cyclistes !

  1. CarFree

    Je suis allé deux ou trois fois seulement à Toulouse, mais j’avais remarqué un nombre impressionnant de bandes cyclables sur les trottoirs, avec effectivement souvent des parcours acrobatiques entre bordures de trottoir, potelets, sorties de garage, panneaux publicitaires, cabines téléphoniques, etc. Bref, des aménagements la plupart du temps dangereux et inadaptés mais qui ont le mérite de pouvoir ensuite s’afficher sur un plan des aménagements cyclables de la ville vu comme un support de communication de la politique municipale…

  2. Colin

    Il y a quelques bandes ou pistes cyclables correctes mais effectivement, les nouvelles réalisations et en particulier celle dont il est question ici défient l’entendement.

    J’ai beau savoir que ça coûte pas cher au kilomètre, ça me fait grincer des dents de payer ça avec mes impôts. J’imagine bien l’agacement que ça peut susciter chez quelqu’un qui ne fait pas de vélo et haït ces « cyclistes qui font tous n’importe quoi »…

    Il n’empêche que depuis un mois que cette absurdité est en place et que je passe tous les soirs sur la chaussée à côté, personne ne m’a encore klaxonné.

  3. outak

    quel vaste sujet que l’aménagement cyclable actuel.
    tous les jours ou presque je prend mon vélo et tous les jours je me pause la question : « mais qui est le génie qui a pondue ca? »

    je ne connais pas bien le cursus qui amène au métier de l’urbanisme mais ca n’a pas l’ai complet niveau vélo.

  4. Moa Auteur

    C’est tristement la réalité.

    Et la municipalité communique (en s’auto-grattant le dos) sur le nombre de kms supplémentaires octroyés soit-disant aux cyclistes tous les ans.

    1er constat : la municipalité doit avoir de large stock de peinture verte (un peu moins pour la peinture blanche mais quand même, il en faut pour peindre un vélo en blanc sur les voies de bus !.. mais y a pas de vert là).

    2ème constat : les aménageurs / la municipalité ne doivent pas rouler très souvent en vélo, y compris sur les Vélô’Toulouse…
    dont le marché a été attribué à JCDecaux il y a environ 3 ans, au détriment, entre autre, d’un acteur toulousain qui était déjà présent en proposant de la location de vélo.
    A noter qu’en plus, cet acteur toulousain (movimento) fait travailler les PME locales comme pour la fabrication de ses vélos (faits à St Gaudens).
    Mais bon, JCDecaux a été préféré… bref, là c’est du « hors sujet ».

  5. Pim

    Il est clair que toutes les grandes villes cherchent en ce moment à reverdir leur image en déroulant de la bande cyclable au kilomètre vite fait mal fait. On n’hésite pas pour cela à sucrer des trottoirs aux piétons, mais quand il s’agit de la chaussée pour la sacro sainte bagnole, là au mieux, on accorde au vélo une ridicule et dangereuse bande de 40cm dans le caniveau, entre le flux de véhicules à gauche et les véhicules stationnés à droite qui ouvrent leur portière sans même regarder si quelqu’un arrive.
    Dans le cas de Toulouse, le plus critiquable je pense est l’ensemble des petites rues en zone 30 mais interdites à double sens par arrêté. Alors que vu la largeur moyenne des rue(lle)s, il serait plus logique d’y interdire les voitures. On peut aussi parler des fausses rues piétonnes toujours accessibles (et accédées) par les voitures, rue du Taur par ex.

    Autre remarque intéressante dans le cas de Toulouse : la maison du vélo (en partenariat avec Tisseo?) propose des vélos en location à 5 eur par semaine! ou 100eur par an! et même quelques pliants je crois. Pour une fois qu’il y a quelque chose de positif, on peut le souligner.
    Par contre, je ne connais pas les modalités du marché, mais je ne pense pas qu’il y ait un rapport avec un certain JCD

  6. Colin

    Quant aux zones 30 sans DSC, c’est déjà bien pénible, mais ce je-m’en-foutisme n’est pas limité aux cyclistes. Je connais plusieurs rues où aucun des deux trottoirs n’est assez large pour une poussette ou un fauteuil roulant ; mais supprimer le stationnement pour faire un vrai trottoir ? Vous n’y pensez pas !

    Exemple : http://maps.google.fr/?ie=UTF8&ll=43.582093,1.450678&spn=0.003995,0.008368&z=17&layer=c&cbll=43.582045,1.450565&panoid=00hUNaml8X_Ue-4puzm1yg&cbp=12,225.22,,0,5
    (désolé pour la longueur du lien)

    Toulouse est une ville de bagnolards, heureusement elle a d’autres aspects plus agréables.

  7. apanivore

    Les trottoirs étroits c’est partout pareil. Dans ma ville le stationnement est matérialisé sur les trottoirs entre les arbres. Pour peu que les voitures se garent mal (autant dire tout le temps), les piétons doivent marcher sur la route.

    A Paris on fait des fois dans le trottoir non-partagé. Tout le long du Bois de Vincennes au sud (Av. de Gravelle) il y a une piste à double sens sur trottoir. Et pas de place prévue pour les piétons sur plusieurs kilomètres !

    La logique voudrait quand on aménage une rue qu’on se préoccupe dans l’ordre :
    * des piétons et personnes à mobilité réduite
    * des cycles
    * de la circulation automobile
    * du stationnement automobile

    Mais en général on commence toujours par les 2 derniers points et pour le reste tant pis s’il n’y a pas la place.

  8. noisette1325

    J’ai trouvé quelques vérités dans cet article et ses commentaires.

    Piste cyclable perdant sa priorité tous les 50 m. Lorsque j’emprunte les pistes cyclable le long d’un axe prioritaire, les cyclistes perdent leur priorité en faveur des rues secondaires. Pourquoi les cyclistes n’auraient-ils pas le droit d’être prioritaires? Sans compter qu’il faut passer entre les caniveaux et bouches d’égoût.

    Lorsque l’on construit de nouveaux lotissements, on s’occupe d’abord de l’automobile. C’est vraiment criant lorsque l’on constate que de nombreux quartiers ne disposent pas de trottoirs. Ah oui, c’est vrai les voitures sont garés sur le bas côté… Où se gareraient-elles si il y avait un troittoir. Réponse : sur le trottoirs évidemment.

  9. VTT

    Espérons que le nombre croissant de cyclistes du quotidient fera évoluer:

    – les aménagements urbain vers plus d’efficaicité et de sécurité pour les plus fragiles,
    – la mentalité des automobilistes pour plus de conscience de l’autre,

    avant que ce ne soit le nombre inévitablement croissant d’accidentés (blessés, paralysé et morts) qui obligent à la prise de conscience.

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