Ode à l’auto

Dans une ville minière de la taïga québécoise où la voiture ne sert à rien, on a pourtant sa voiture devant chez soi.

« …ce véhicule, lavé, bichonné, à qui on fait faire de temps en temps quelques kilomètres en rond sur la rocade de la ville (il n’y a pas d’autres routes), est un symbole de niveau de vie américain, le signe que l’on appartient à la civilisation mécanique (…) »

Cette phrase attribuée à Baudrillard est extraite d’un excellent texte intitulé le spectacle du cyclo-voyageur dans Carfree.

Il est vrai que l’ère de l’automobile n’est pas prête de s’éteindre du jour au lendemain puisque la Chine s’éveille à l’automobile et à tous ses excès destructeurs.

D’abord, je le confesse: la plupart de mes amis cyclistes sont tous pourvus de confortables berlines et il ne leur viendrait pas à l’idée qu’ils puissent s’en séparer. Même si le précieux bien roule peu et se déprécie d’année en année.

Quant à moi, c’est vrai, je m’évertue à faire tourner une à deux fois par mois un antique fourgon par crainte qu’il se grippe sous son abri.

L’autre soir encore, sur l’autoroute, je comptais les modèles 4X4, dernière farce et attrape pour le consommateur gogo qui s’y laisse prendre. De quoi étancher une soif de respectabilité et de puissance!

Donc, du vélo pour les loisirs certes, mais pas pour tout le reste.

Le concept du vélo utile, il faut le dire, s’arrête pour la grande masse des cyclistes à celui du vélo loisir bienfaisant, celui du vélo tout terrain qui nous réconcilie avec le terroir de nos ancêtres.

Ah, le VTT, qu’est-ce que ça fait du bien!

Autrement dit, le vélo n’est qu’un instrument de loisir dont la fonction sociale est d’entretenir la forme physique. Et rien d’autre.

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Toute autre déclinaison relèverait de l’incongruité.

Verrait-on des parkings entiers de supermarchés couverts de vélos avec des remorques attelées?

De la déraison!

Là où intervient la fragilité du discours pro-vélo universel, c’est quand les raids cyclo-alpins à 300 km de son domicile se font en voiture. Ici le discours se grippe.

L’auto redevient un auxiliaire du vélo incontournable.

Un alibi suffisant pour démonter toutes les stratégies vertueuses.

Il faudra donc aussi en convenir: cette Confrérie des Cent Cols qui incite les cyclistes à franchir des cols dans tous les coins d’Europe encourage indirectement l’usage de la voiture, vu le peu d’attrait des formules train+vélo.

On n’imagine pas le nombre d’adeptes conquis par cette formule vélo+auto. Il suffit lors de la grande transhumance estivale de compter sur les autoroutes tous ces vélos trimballés brinquebalants sur des centaines de kilomètres.

Les militants de rallyes automobiles ne s’y trompent d’ailleurs pas lorsqu’ils dénoncent l’extraordinaire pollution qui accompagne les Tours cyclistes, ses cortèges de voitures accompagnatrices…sans parler des affidés en camping-cars qui suivent les étapes les unes après les autres…devant leur poste de télévision pendant que la caravane passe.

Si Mercedes, Porsche, Peugeot…et même Norauto se mettent à vendre des vélos, c’est justement parce qu’il y a là le moyen de réconcilier le cycliste avec son inséparable auto.

Ne nous trompons pas: si le vélo est là dans le showroom des vendeurs de voitures, c’est pour mieux nous vendre… une voiture.

Juste pour nous faire oublier la puissance destructrice du monde automobile.

4 commentaires sur “Ode à l’auto

  1. thermo

    « Ne nous trompons pas: si le vélo est là dans le showroom des vendeurs de voitures, c’est pour mieux nous vendre… une voiture. »

    d’ailleurs, est-ce que Renault vend encore des vélos??? (je crois que non, ils doivent mettre toutes leurs forces pour sortir leur voiture électrique avant les chinois 😀 )

  2. bruno le hérisson

    Bonjour,

    Des personnes de Renault ont créé la société engine lab qui propose trois types de VTT TS de 100 à 160 mm de débattement.

    Le process NRS propriété intélectuelle de Renault est toujours utilisé sur des modèles de la marque Giant.

    Hier, un automibiliste m’a fait une crasse alors que j’allais au travail en vélo, il a ensuite continué sa route pour aller se garer tranquillement au parking sous terrain de son entreprise 1 km plus loin, sauf que la dite entreprise est aussi celle où j’exerce. Ma vengeance sera terrible, je n’ai pas encore choisit, l’email à toute la société pour décrire le comportement de l’individu, la résistance des pneus aux crevaisons … ?

  3. xtoflyon5

    @Bruno : Je te suggère pire, le forgeage d’un faux email de sa part vers les services généraux pour demande de « déshabilitation » de son badge d’accès au parking. Même si ça ne dure que 3 jours, je trouve ça intéressant d’attaquer la voiture par cette vulnérabilité.

  4. Tommili

    Un hérisson sous chaque pneu, un gros tag sur la carrosserie, les essuie glaces et les rétros pétés, bien fait pour sa gueule…

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