Le retour du triporteur

Les livraisons de marchandises en vélo-triporteur, on y arrive! Ce que l’on peut appeler la vélogistique est en train de prendre en France un tournant décisif. Car s’il existe déjà dans beaucoup de villes françaises des petites entreprises de livraison qui utilisent le vélo ou le triporteur, un « poids-lourd » du secteur logistique est en train de passer au triporteur.

Il s’agit de Géodis, le n°1 du transport de marchandises en France, une filiale de la SNCF au chiffre d’affaires de 6,5 milliards d’euros en 2010! Bref, un mastodonte du secteur qui lance un nouveau service appelé Distripolis, destiné à couvrir ce que les professionnels du secteur appellent le « dernier kilomètre ».

Au lieu d’avoir des camions ou autres camionnettes polluantes qui se baladent partout en ville pour assurer les livraisons, Géodis met en place des « bases logistiques urbaines écologiques » (BLUE), 8 sur Paris par exemple, en général proches des gares et ravitaillées par trains ou camions, puis des triporteurs électriques ou des voitures électriques assurent la livraison finale, le fameux « dernier kilomètre », depuis ces bases logistiques jusqu’à la destination finale.

Résultat? Moins de camions polluants, bruyants et dangereux et plus de triporteurs ou de voitures électriques.

Cela paraît évident et on se demande d’ailleurs pourquoi cela n’existe pas déjà! En fait, il y a déjà de nombreuses petites entreprises qui font de la livraison en ville avec des triporteurs. L’information véritablement intéressante ici, c’est l’échelle de mise en œuvre. On n’est plus dans la solution innovante un brin folklorique ou « écolo-bobo » diront certains, on est face à un système intégré pris en charge et développé par la plus grosse entreprise du secteur. Autant dire qu’ils ont probablement fait leurs calculs et qu’il ne s’agit pas de faire de la figuration…

D’ailleurs, l’arrivée de Géodis sur le créneau de la « livraison écologique » commence déjà à faire grincer des dents certains acteurs locaux du secteur. Ainsi, après avoir commencé son déploiement à Paris, Géodis à signé une convention avec Strasbourg pour prendre pied en Alsace, au grand dam d’une entreprise locale.

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A Paris, le service est donc en cours de déploiement, jusqu’à 2015, A terme, le dispositif complet en 2015 prévoit un total de 75 véhicules électriques et 56 triporteurs faisant des navettes à partir de 8 bases logistiques. Les deux premières bases sont déjà ouvertes à Bercy et à la Gare Montparnasse, quatre autres devraient suivre en 2012-2014 (Gare du Nord, Saint Lazare, les Halles et Foch), les deux dernières sont attendues en 2014-2015 (Quartier Latin et gare de l’Est).

Signalons qu’à Paris, il existe déjà la Petite Reine, entreprise de livraison qui possède une flotte d’une soixantaine de triporteurs ou cargocycles. Étonnement, les triporteurs de géodis portent l’inscription… de La Petite Reine, il doit y avoir du partenariat la-dessous.

Pour ses projets dans l’Hexagone et au-delà (Distripolis pourrait s’étendre à Londres, Milan et Bruxelles), le logisticien prévoit de commander 287 véhicules électriques et 214 triporteurs. « L’ambition de Geodis, dans les 5 prochaines années, est de développer Distripolis dans les principales agglomérations françaises et de s’implanter dans les grandes villes européennes afin de déployer un réseau multimodal européen de transport de marchandises du dernier kilomètre plus efficace et soucieux de son environnement« , table Geodis.

Quant au modèle de triporteur choisi, il a une charge utile de 180 Kg pour un volume de 1,5m3, une vitesse moyenne de 20 km/h, une autonomie de 50 kilomètres et peut avaler des côtes jusqu’à 8%. Et Géodis a très bien compris tout l’avantage du triporteur: « Il peut emprunter les pistes cyclables et accéder aux zones semi-piétonnes et n’est pas soumis aux restrictions horaires de circulation en centre-ville ».

Il risque d’y avoir quelques conflits en perspective avec les vélos et les piétons…

9 commentaires sur “Le retour du triporteur

  1. wombie

    Excellente initiative d’une grosse boite.
    Mais, en parlant de grosse boite et de pistes cyclables, je doute qu’ils puissent toutes les emprunter parce qu’un triporteur, c’est assez large.
    Et comme beaucoup de PC sont protégées par des plots pouvant bloquer une Smart, ça devrait les bloquer aussi…
    sinon, évidemment, sur une PC en double sens avec le triporteur qui occupe quasi toute la place et un cycliste voulant le croiser ou le doubler, les dialogues de type « Je bosses, moi ! » vont pouvoir se faire désormais entre cyclistes.

  2. Tassin

    « Ainsi, après avoir commencé son déploiement à Paris, Géodis à signé une convention avec Strasbourg pour prendre pied en Alsace, au grand dam d’une entreprise locale. »

    Et ça y est les multi-nationales après avoir bien tout pourri vont maintenant manger la part de ceux qui ramaient à contre-sens en montant des entreprises de coursiers ou livraisons à vélo!

  3. MOA

    Le capitalisme doit toujours trouvé de nouveaux débouchés. Toujours.

    Donc ce n’est pas étonnant qu’il se transforme en capitalisme vert (le cas de géodis n’est rien d ‘autre) et il ne manquera pas de porter en en étendard un des postulats fondateur à savoir que le bien être de l’entreprise capitaliste (ie. des individus possédant l’entrepise capitaliste) amène le bien être du collectif. Donc où est le problème?

    Le problème est que ce postulat pouvait sans doute se vérifier pendant un certains temps aux origines de capitalisme (amélioration de la vie d’un plus grand nombre grâce aux miettes laissées par le système capitaliste -le système féodal en laissant moins de miettes par exemple) mais on voit bien que ce n’est plus le cas actuellement et ça le sera de moins en moins pour de plus en plus de monde.

    Car la crise écologique lui mettant des batons dans les roues, (aspect qui n’avait pas été théorisé il y a 250 ans), le système économique du sans-limite-toujours-plus se confronte à une limite qu’il aura du mal à dépasser (limite physqiue) malgré toutes les transformations qu’il opèrera pour tenter de se perpétuer. Le temps qu’il/qu’on se rende compte que c’est vain, on aura le temps de bien déguster et le problème global sera probablement insolvable sauf pour une toute petite minorité de possédant.

    Bref, le triporteur, c’est génial mais le triporteur par geodis ne particpe pas à arranger la situation. Moins de camions « dans le dernier kilomètre »… [en ville dense faudrait il ajouter]… certes… vivant en ville-dense, je devrais m’en réjouir et pourtant ce n’est pas vraiment le cas.

  4. triporté

    pour l’avoir testé (modèle en photo) en tant qu’employé d’un autre groupe qui développe un service de livraison basé en partie sur ces triporteurs :

    _ chocs dans le dos dès que le sol n’est pas très plat (les trois roues et la hauteur font que l’engin accentue les secousses plus qu’autre chose)
    _ tendance fâcheuse à se renverser en cas de trottoir mal pris
    _ vitre qui éblouit dès qu’on a le soleil de face. Qui protège de la pluie, certes, mais avec un défaut majeur : toute l’eau se concentre sur les pieds, rapidement détrempés.
    _ pannes fréquentes de l’assistance électrique, (les chocs récurrents n’y sont pas pour rien, sans doute) sans laquelle le cyclo est une enclume (à vue de nez, un poids de 100kg environs !).
    _déraillages réguliers plus complexes à résoudre que sur un vélo classique : pour remettre la chaîne, il faudra savoir se glisser sous le vélo !
    _ position semi couchée douloureuse pour les genoux, peu pratique : pas de position « danseuse » possible pour mettre un coup au démarrage, par exemple.
    _ pour les côtes, la bonne blague, ce cyclo est une torture, notamment due à son poids. Lenteur garantie ! (quand on se fait dépasser par des personnes âgées à pieds, il y a de quoi se poser des questions sur le matos…)

    Dans un autre registre, j’ai aussi des doutes sur la qualité écologique d’un appareil nécessitant autant de plastique (dont le toit qui ne sert à rien), et générant une consommation d’électricité superflue (une bonne part de l’assistance électrique se justifie par le poids inutile de l’engin).

    cet engin apparemment si bizarre d’un point de vue efficacité (cf les points ci dessus) est surtout un méga support publicitaire, qui permet de faire du greenwashing et de la pub en même temps sur le dos de la santé des salariéEs ! Autrement dit, ceci n’est pas un triporteur. Au mieux, une façon d’accroitre la surface publicitaire en ville, en faisant passer la pilule sous l’argument « éco »…

  5. Bikeman

    Bien d’accord avec Triporté.
    J’ajouterais, pour faire simple, que l’on sent vraiment derrière tout cela une logique économique avant une logique écologique; ça sonne faux je trouve…

  6. Pomme

    Je suis d’accord avec Triporté.
    Nous avons ce triporteur pour nos livraisons, et c’est un tank. Pour le plastique d’après le site internet de la marque, la caisse est 95% recyclée. Il faut à vide, entre 80 et 100Kg, pour un cubage de 1,2 voir 1,3m3. C’est une belle surface de pub, avec des formes rondes. Mais un carton n’est il pas carré? Un carré dans un rond, il n’y a pas un problème?
    L’assistance est très très utile, sinon c’est impossible de déplacer l’engin…
    En ce qui concerne Geodis, c’est un peu utopique, mais c’est un concept qui fonctionne. Seul Hic, c’est aux dépends des entreprises locales de coursiers à vélo, qui sont pour certaines déjà prestataires pour des transporteurs et qui font bien leur boulot. C’est un gros coup de com, plus parlant que les ISO. Pour les véhicules électriques, j’en vois, c’est super, seul Hic trop silencieux donc trop dangereux. Et surtout trop polluant à la fabrication de ce camion de 15m3…

  7. Jean-Marc

    Bien que globalement d accord avec MOA, Tassin, Triporté et ceux d accord avec eux,
    Je serais nuancé.

    Un peu comme sur le sujet de la voiture-vélo, du cyclospace
    (http://carfree.fr/index.php/2012/03/02/cyclospace-la-voiture-de-lautonomie-responsable-et-de-la-sobriete-heureuse/ )

    Oui, c est un triporteur lourd, peu pratique, mal conçus,
    Oui, il est plus là pour faire de l argent avec la pub, que pour faire des livraisons;

    MAIS, gros MAIS

    (paraphrase de ma réponse du 3 mars 2012, sur le cyclospace, en l adaptant à ce sujet)

    Son poids/encombrement/prix en fait un véhicule sans intérêt par rapport à la solution plus modulable de 1 ou 2 vélos normaux + saccoches (+ remorque), ou un vélo cargo + saccoches (+ remorque).

    Cependant, il offre une visibilité, un aspect nouveau au vélo :

    Du fait de sa forme spéciale, de son grand volume qui semble destiné à transporter de gros volumes/de grosses charges,
    il permet d avoir des curieux qui découvrent qu’on peut transporter du poids sur un vélo.

    Ainsi, il offre un plus pour la conversion mentale des automobilistes à la possibilité d’utiliser des véhicules à propulsion humaine :

    Certains automobilistes n’imaginent pas qu’on puisse survivre à une pluie sans toit, ni qu’on puisse mettre ses courses dans des saccoches ou dans une remorque;

    Là, avec un gros coffre + un parebrise+toit + assistance élec, ils sont rassurés :
    ils peuvent comprendre que le vélo EST une alternative à une fourgonnette livrant une enveloppe.

    Après, si celà les fait acheter un VAE pour tester…
    Et si après 6 mois de VAE ils découvrent qu’un vélo sans assistance suffit… tant mieux :

    L’important, c est le 1er pas, c est de franchir le frein psychologique (« pour faire 2km avec mon porte-document et mon ordi portable, j’ai BESOIN de ma voiture » « pour ramener mon enfant de l’école, à 2 km de la maison, j’ai BESOIN de ma voiture »)

    Après, la facilité et les avantages du vélo font qu’ils parleront +/- d’eux-même.

    Mais il est important d’écouter les arguments -même bidons… SURTOUT les arguments bidons en fait- des automobilistes, pour qu’ils puissent avoir des passerelles répondant à leurs craintes, et qu’ainsi ils osent franchir le pas.

    Ils ont peur de la pluie ?
    -> il existe des toits adaptables à tous vélos, dont il faut leur parler
    (et des vêtements de pluies, dont la cape de pluie + lunettes envelopantes de ski est le plus simple/moins cher/plus efficace)

    Ils ont peur des pentes et/ou des grandes distances ?
    -> même si on ne compte pas s’en servir, il est important de militer pour la possibilité de monter dans les TEC avec son vélo

    Ils ont peur de la circulation auto ?
    -> même si on ne compte pas s’en servir, il est important de militer pour la multiplication des aménagements vélos, dont des voies vélos séparées.

    On peut se moquer de leurs craintes infondées,
    mais c est mieux s’ils voient que des passerelles existent, et qu’ainsi ils soient plus nombreux à oser tester.

    [Une fois le frein psychologique franchis, il y a une 2eme étape importante, même si moins dure : éviter l’échec, le retour en arrière :

    si qq un teste, il faut savoir l accueillir, l accompagner, pour qu’il surmonte ses pb de débutant :
    lui prodiguer de l aide/des conseils si nécessaire, et ainsi faciliter sa phase de transition* (musculature + équipement vélo + équipement perso pas forcément adaptés au parcours visé, à la vitesse visée, dans les conditions météo et de charges visées)].

    * Perso, après des années avant de franchir le frein psychologique, ma phase de transition m’a pris 2 ans.

    Vu le temps mis, toute aide pendant cette phase de transition -comme offrir une cape de pluie ou expliquer comment rustiner ou dévoiler une roue- peut éviter l’échec de cette transition, et le retour arrière.

    (phase de transition :
    c est à dire, prendre son vélo une fois de temps en temps, moins d’une fois par mois, quand il fait beau et chaud, que « je » n ai pas de charge à transporter, que je suis en avance, et que… pour qu’une fois, par hasard, je ne prenne plus ma voiture;
    pour arriver, après transition, à prendre le vélo* +/- tous les jours pour tous ses déplacements, en empruntant, si nécessaire, une voiture moins d’une fois par mois).

    * ou marche ou TEC

  8. MOA

    J’aimerais partager ton point de vue quant à la participation du triporteur à la prise de conscuence par les automobilistes qu’1 alternative à la bagnole existe, mais ce n’est pas le as.

    Tous les arguments que tu opposes sont rationnels (ce qui est 1 bonne chose bien entendu) or on voit bien qu’aucun arguments rationnels n’a fait changer le cours des choses concernant l’utilisation de la bagnole.

    Le système consumériste via la propagande publicitaire (et symbolisée ici par geodis) est un trop gros rouleau compresseur idéologique.

    Tu omets donc selon moi de prendre en compte l’aspect idéologique très important pour que l’automobiliste fasse « ce premier pas » :
    – « je donne une image de moi gratifiante à travers l’utilisation de ma voiture »

    et beaucoup plus important « je ne veux pas donner une image de moi qui laisse supposer un déclassement social en utilisant une bicyclette, fut-ce un triporteur de looser »

    En outre et à titre d’exemple (il vaut ce qu’il vaut), à Toulouse circulent depuis env. 2 ans de plus en plus de triporteur livrant des courses alimentaires (notamment casino fait ça).
    Assiste-t-on à une multiplication des vélos / triporteur? Non, loin de là.

    Bref, seuls les convaincus savent que le triporteur est une alterntive et sont peut être prêt à aller plus loin dans leur style/mode de vie, MAIS, ils n’ont pas besoin de geodis ou casino -etc- pour ça, sachant en outre que ces entreprises participent à perpétuer et accentuer les énormes dysfonctionnements actuels (sociaux et environnementaux).

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