L’Archipel du Frioul sans voitures

Septième épisode d’une série consacrée aux îles sans voitures. Vous souhaitez passer des vacances réellement sans voitures? Vous voulez voir comment la vie sans voitures est possible? Visitez les îles sans voitures! Aujourd’hui: L’Archipel du Frioul.

L’archipel du Frioul est constitué de quatre îles, l’ensemble atteignant 200 hectares, situé environ à 4 km au large de Marseille. Les îles constituent un des 111 quartiers de Marseille: elles sont situées dans le 7e arrondissement.

Cet archipel est constitué de différentes îles :

  • Île de Pomègues au sud.
  • Île de Ratonneau au nord.
  • Île du Château d’If à l’est des deux îles principales.
  • Îlot Tiboulen du Frioul à l’ouest de l’île de Ratonneau.

Les îles les plus grandes de l’archipel sont l’île Pomègues (2,7 km de long, 89 m d’altitude au maximum) et l’île Ratonneau (2,5 km de long, culminant à 86 m). Les autres îles sont Tiboulen et l’île d’If sur laquelle est bâtie l’ancienne prison du Château d’If. Cette forteresse aurait abrité Edmond Dantès, le héros imaginaire du roman Le Comte de Monte Cristo, d’Alexandre Dumas.

Les îles Pomègues et Ratonneau sont reliées par la digue Berry, qui a été construite dès 1822 sous Louis XVIII. Elle a été nommée ainsi en souvenir du duc de Berry, assassiné en 1820 par Louvel. Cette digue a transformé un mouillage forain utilisé depuis les Romains en port véritable.

Le village où se concentrent les habitations est situé sur l’île Ratonneau. Environ une centaine d’habitants vivent à l’année sur ces îles, enfants, adultes ou retraités, ainsi que des marins vivant sur leur bateau.

Le départ en navette du Vieux Port de Marseille est déjà tout un voyage, qui dure un peu moins de 30 minutes, mais qui permet de découvrir une vue grandiose et magistrale sur Marseille au fur et à mesure que l’on s’éloigne de la ville. Mais le plus beau est sans doute de rester le soir sur les îles afin de voir la ville de Marseille s’illuminer.


Ile du Frioul (photo: Nicobilou)

Ces îles, du fait de leur position stratégique en rade de Marseille, en ont constitué depuis fort longtemps les défenses avancées. Chaque éminence porte un fort militaire, et les batteries, tranchées, postes d’observations, parsèment l’ensemble de l’archipel. Dès Henri IV, un fort très important couronnait l’île Ratonneau, actuellement totalement enfoui sous les reconstructions successives. Puis ce fut l’île d’If qui fut fortifiée. Sous Louis XIV les fortifications furent étendues à l’ensemble de l’archipel par Vauban. D’autres constructions militaires furent édifiées sous Napoléon, mais surtout sous la Troisième République. Ces fortifications édifiées entre 1860 et 1900 ont donné à l’archipel son paysage actuel.

Lors de la peste de Marseille au XVIIe siècle, l’île Ratonneau avait servi de lieu de quarantaine. Plus récemment, lors de l’accueil des réfugiés arméniens, dans les années 1920, les autorités installent un centre de tri sanitaire sur les îles.

C’est au cours de la Seconde Guerre mondiale, et notamment lors de la libération de Marseille, que le Frioul a réellement connu le feu des armes. L’occupation allemande devait investir les fortifications de l’île, et les modifier ou compléter par la construction de batteries nouvelles, de redoutes, clairement identifiables à ce jour par leur construction en béton armé, dont les batteries de marine du cap Caveau sont un exemple impressionnant. Ces travaux ont été menés par le STO (Service du Travail Obligatoire), pour lequel nombre de marseillais ont été réquisitionnés par les allemands.

Dès lors, les Alliés se sont employés à bombarder massivement cet archipel, inhabité mais lourdement fortifié, pour détruire ces défenses avancées qui leur entravaient l’accès à la ville. Aujourd’hui encore, malgré la végétation sauvage qui a repoussé, les photos aériennes montrent un sol lunaire parsemé de cratères de bombes, surtout à Ratonneau.

L’archipel est resté propriété de la Défense Nationale, interdit au public, jusqu’en 1975, où le maire Gaston Defferre obtenait de la Défense l’autorisation de transformer la rade militaire déclassée en port de plaisance, bordé d’un noyau urbain de 450 logements et quelques commerces, une caserne de pompiers. Un service de navettes maritimes fut créé à cette occasion, pour permettre de vivre à ces habitants. Le reste des iles a été cédé à la commune par la Défense à partir de 1995.


Paysage du Frioul (photo: Marcovdz)

Semblable aux calanques de Marseille et aux madragues de l’Estaque, l’archipel du Frioul présente des falaises de calcaire blanc stratifié tombant dans la mer. Mais au Frioul, ce paysage a été profondément remanié par l’homme, tant durant l’époque des grands travaux militaires, que durant celle des constructions récentes. L’activité militaire a laissé en de nombreux endroits des bâtis éboulés, des gravats, et une pollution métallique de munitions lourdes ou légères sur l’ensemble de l’archipel.

Sur le plan floristique, on retrouve également toutes les espèces endémiques du littoral provençal, ainsi que quelques espèces rares et protégées, propres aux iles de Marseille.

La faune est assez pauvre, essentiellement représentée par l’avifaune, surtout des oiseaux de mer, dont la plupart sont rares et protégés. Il n’y a pas de grands mammifères, mais par contre des espèces introduites comme le lapin et le rat, ainsi que de nombreux chats harets. Les insectes sont bien représentés.

L’archipel est très sec, car il y pleut moins qu’à Marseille. Il se dit même que les iles du Frioul présentent le curieux privilège d’être le site le plus sec de France. Le faible relief des îles et leur étendue déchiquetée expliquent cette pluviométrie déficitaire.

Combinée aux vents souvent violents qui peuvent y souffler, cette météo ne permet qu’une végétation rabougrie, où de rares pins d’Alep tortueux poussent au ras du sol. Ces îles sont ainsi le royaume des plantes dites « xérophytes » pour la sécheresse, des « alophytes » pour le sel et de formes curieuses. Au total, 200 espèces de plantes peuvent être observées dont certaines sont protégées.

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Ces paysages, et la très faible fréquentation humaine durant le XXe siècle, ont évidemment privilégié les oiseaux de mer les plus farouches, parmi les espèces animales qui occupent ce biotope très remanié par l’homme.


Port-Frioul (photo: Jacqueline Poggi)

Sur l’archipel du Frioul, on trouve désormais un port de plaisance de plus de 600 places, un centre de vacances Léo Lagrange, une caserne de marins-pompiers, l’une des stations du service du pilotage de Marseille-Fos, et surtout une ferme marine bio, installée dans l’ancien port de quarantaine de Pomègues, probablement la seule activité économique de production du quartier.

Le village est formé de constructions bétonnées des années 1975, avec des commerces longeant le port et des habitations au-dessus. Le parti architectural de décrochements successifs du bâti est assez original.

Il n’y a pas de voitures sur les îles du Frioul. Le vélo n’y est pas complétement prohibé, mais seulement autorisé dans le village et sur la voie carrossable: autrement dit, le VTT est interdit.

Les habitants manquent cruellement de services publics à ce jour, en l’absence de police, d’école, de médecin, chacun devant se rendre quotidiennement en ville pour ces besoins. Cet abandon administratif, et une desserte maritime contestée, expliquent largement le ressentiment des insulaires à l’égard de leur cité-mère, et la faiblesse du développement actuel du quartier.

Des projets de doublement du port, ainsi que de bâtis complémentaires à but touristique, sont régulièrement évoqués par l’administration centrale de la Communauté Urbaine et les hommes politiques, mais même les projets les plus nécessaires semblent à l’abandon.

L’archipel du Frioul est actuellement confronté à des perspectives contradictoires quant à son avenir. Il présente la particularité administrative d’être la propriété foncière de la commune pour plus de 90% de son sol, ce qui est rarissime pour un espace urbain de cette taille, en face et appartenant à la deuxième ville de France. Il excite donc les appétits les plus divers, des promoteurs qui en feraient bien un paradis insulaire pour milliardaires, aux écologistes enclins à y restreindre la fréquentation humaine. Évidemment, ces perspectives sont totalement opposées, et chacun des deux camps assiège les politiques, pendant que les insulaires comptent les points.


Iles du Frioul (photo: Rafael Penazolan)

C’est dans ce contexte qu’est né un projet farfelu d’indépendance insulaire. En juillet 1997, un dénommé Jean-Claude Mayo, propriétaire du fort de Brégantin sur l’ile Ratonneau, et quelques amis décident de fonder la République libre du Frioul, une galéjade sous forme de micronation, car « dans notre société, on n’a jamais le droit de faire le con« .

Le président, nommé à vie, est Egrégore le Virtuel, tandis que Jean-Claude Mayo en devient le ministre « convoyeur du verbe« .

La petite république édite sa propre monnaie, la polymonnaie qui n’a cours légal que dans la république. Une suite logique à cette première République libre du Frioul éteinte depuis 2000, voit le jour en 2012, « la République du Frioul » est proclamée. Sa devise est: « Pour l’art et l’insolence, sans insolation« . Des ambassades sont ouvertes partout en France et sur l’île du Frioul, elle a son drapeau, son blason, sa monnaie, « le PAGA », ses ministres, etc…

L’objectif de cette deuxième République est de favoriser l’investissement culturel et artistique sur l’île du Frioul dans la bonne humeur et sur le ton de la « galéjade ». La République du Frioul a bien entendu aussi son site internet officiel: http://www.larepubliquedufrioul.com/


Billet de DEUX CENT FRIOUL/HEURE à l’effigie de Roland Magdane

Le Frioul est une destination touristique importante du littoral provençal avec plus de 400.000 visiteurs par an.

Les visiteurs proviennent en majorité de l’agglomération marseillaise, confirmant ainsi la fonction péri-urbaine de ce territoire.

Ainsi, jusqu’à 2.500 personnes peuvent arriver par navette les jours de forte fréquentation auxquelles s’ajoutent les plaisanciers débarqués sur le liseré côtier.

En fonction des types d’usagers et des saisons, la fréquentation du site est néanmoins très différente. Durant la période estivale, une nette attraction de l’île de Ratonneau et de ses plages est observée. Au printemps et à l’automne, les usagers de l’archipel viennent principalement pour découvrir les îles, les paysages, le patrimoine historique et naturel. Des promeneurs et des groupes de randonneurs ainsi que des scolaires forment la majorité des visiteurs. L’île de Pomègues devient alors la destination privilégiée.

On y rencontre également de nombreux pêcheurs à pied marseillais qui pratiquent cette activité tout au long de l’année.

Le caractère affirmé des îles du Frioul et leur relief tourmenté, calanques, plages et criques sablonneuses, à-pics impressionnants, qualité de la lumière, transparence de l’eau, en font un site d’une grande séduction, un lieu encore préservé, une rencontre authentique en Méditerranée.


Frioul (photo: Marcovdz)

Moyens d’accès

Traversée d’une demi-heure environ au départ du Vieux Port de Marseille. Les départs ont lieu toute les heures à partir de 9h. Et pour le retour, la première navette part à 7h15. Les suivantes partent toutes les heures et demie à partir de 9h30 jusqu’à 19h. En juillet et août, le dernier départ du quai des Belges a lieu à 23h30. La dernière navette quitte le Frioul à minuit.

Sources:

Archipel du Frioul sur Wikipédia
Iles de Marseille


Îles sans voitures
22 îles, 26 cartes, 168 photographies

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