Leur monde de l’assurance

Certains métiers ont le mérite de nourrir l’avidité de l’homme en le flattant, par exemple, d’avoir acheté tel ou tel modèle de véhicule, puissant, inspirant la sécurité pour sa famille et lui même. Il s’agit là d’appuyer un « choix » (qui en fait n’en est pas un puisque intégré dans un système complètement délimité et cloisonné) en proposant un contrat, un service (peu en importe le nom) adapté au « besoin » (qui n’en est pas un non plus : le besoin étant le déplacement, pas le fait de rouler en voiture).

But supplémentaire : saisir l’opportunité du « contact client » pour susciter l’envie d’un « équipement » supplémentaire. Le terme « équipement » correspond au nombre de contrats détenus. Plus un client est « équipé », plus les chances de résiliation diminuent ; c’est statistique. Il faut donc :

  • Susciter le désir de prévoir l’avenir en se protégeant des accidents domestiques. Ne pas hésiter à faire culpabiliser « le client » s’il ne détient pas de contrat de prévoyance contre les accidents. Il pourrait arriver malheur à cette personne et nous sommes là, nous assureurs, pour couvrir sa famille en lui versant un capital en cas de décès par exemple.
  • Donner l’envie de financer les « projets » de la famille : ouvrir un contrat d’assurance vie pour garantir le financement des études, l’achat de la voiture qui viendra en remplacement de celle déjà assurée…

Deux exemples parmi tant d’autres qui montrent que l’assurance s’inscrit dans le domaine de l’infini. Nous sommes « objectivés » par an, mois et jour. Des chiffres qui, pour certains « items », ont été multipliés par 4 en 4 ans.

Je me permets cet article car je suis salarié d’une mutuelle d’assurances très connue. Je souhaite vous faire partager ma vision des choses, de l’intérieur de cette machine. D’autant que le lien entre le marché de l’automobile et l’assurance est étroit.

L’assurance est un domaine dans lequel on peut vous demander de produire plus de contrats d’assurance automobile alors que le marché de l’automobile est en chute libre. Dans le monde de l’assurance (et dans beaucoup d’autres mondes je pense…) le déni de réalité tient une grande place !

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La trajectoire des compagnies d’assurance est claire, pour combattre ce fléau (qui selon eux est temporaire), il ne s’agit plus de « proposer un service », il faut aussi féliciter le con sommateur : il a raison, il est dans le réel, ce modèle de véhicule lui convient parfaitement !

Il faut le rabaisser aux pulsions primaires développées par les « mass media » ; « vous avez fait le bon choix » (un choix parfaitement intégré dans une société malade). On peut même récompenser sa « con somme action » en le gratifiant d’une remise s’il fait moins de 8000 km par an, s’il dispose d’un forfait de transport en commun(1)

Ce client reconnu peut également bénéficier, chez nous, d’un crédit à la consommation pour financer son véhicule. Nous lui offrons des options d’assurances s’il dit « oui ». Après avoir souscrit ce crédit à la consommation, nous pouvons même lui proposer de s’assurer contre le risque de ne plus pouvoir payer ce crédit (perte d’emplois, décès…). Les plus vicieux (appréciés de la haut pour leurs talents) n’hésiteront pas à appliquer les techniques étudiées en « formation » : « faîtes leur peur », « s’ils ont des enfants, vous voilà sauvés », « vous n’êtes pas couvert contre ça, vous avez un problème ? ».

Nous sommes au cœur de la théorie du « vendre plus », « travailler plus » et du « produire plus ». Nous vivons la fin d’une utopie et c’est une bonne chose car cela ouvre la porte à d’autres perspectives et à la libération de l’esprit de ces concepts insensés, destructeurs de liens sociaux, prônant l’écrasement par la compétition…

(1) Il dispersera ainsi entre 800 et 1000 kg de CO2 dans l’atmosphère en une année alors que la limite soutenable pour notre planète est de 1.5 T/an. Effectivement, félicitations, vous avez « dépensé » 2/3 de votre « budget carbone » annuel grâce à votre véhicule.

5 commentaires sur “Leur monde de l’assurance

  1. MarcDS

     » le marché de l’automobile est en chute libre »? Je ne pense pas que le nombre d’immatriculation de voitures soit en baisse, si?

  2. pierre paul jacques

    Finalement l’assurance c’est une économie qui repose sur des mécanismes très primitifs de la peur. On se doute qu’il n’y a plus beaucoup de philantropie chez notre assureur, ni chez notre banquier et encore moin chez notre garagiste.

    Ce vieux concept de mutualisation du risque et d’entraide ne fonctionne plus ?

  3. bikeman

    Bon article, en effet. Après, ce concept du marché de la peur s’applique aussi très bien dans tous les autres domaines : les marchands d’alarme, ou + généralement les produits de « sécurité » (aux USA, ce sont des armes à feu…) ou encore dans le domaine médical par exemple avec des vaccins qui contiennent de l’aluminium etc.

    Bref, quand on fait contre-pieds à cela, en se détachant comme on le peut, des considérations matérielles, on ne s’en porte que mieux, ex : vendre sa bagnole = résiliation de son contrat d’assurance…
    (que du bonheur)

  4. nico

    Merci pour cet article! Pour ma part, je n’ai plus aucune assurance:
    – pas d’assurance auto vu que je suis un carfree depuis longtemps
    – pas d’assurance santé: je travaille en libéral en Afrique, je n’ai pas de sécu obligatoire, et je n’ai pas souscrit à une assurance privée
    – pas d’assurance logement (pas obligatoire ici)
    Donc, par rapport aux assurés qui enrichissent les assureurs, j’économise de l’argent qui peut me servir en cas de pépin; je ne pense d’ailleurs même plus aux assureurs, parce que je suis aussi « TV-free »,( je ne vois plus les publicités pénibles des assureurs depuis très longtemps).
    Je vis plus mal que les assurés? non. Je suis en plus mauvaise santé qu’eux? non.

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