Salon de l’auto, salon de la mort ! Stop à l’écocide automobile capitaliste

SolidaritéS est en Suisse un mouvement anticapitaliste, féministe et écologiste pour le socialisme du XXIe siècle. Il a publié cet article à l’occasion du salon de l’automobile qui se déroule à Genève.

Le 6 mars à Genève, Didier Burkhalter, président de la Confédération helvétique inaugurait le Salon de l’Auto. Avec 105 nouveaux modèles de bagnole en primeur mondiale, plus de 700 000 visiteurs·euses et 10 000 journalistes attendus… Sans parler bien sûr de la traditionnelle mise en avant sexiste, à la veille du 8 mars, des nuées de « charmantes hôtesses » embauchées pour mettre en valeur les carrosseries.

Le rite annuel nauséabond d’ouverture de la grande messe genevoise à la gloire de l’écocide par l’automobile et à celle des profits de l’industrie en question, s’est donc déroulé selon les formes habituelles et apparemment immuables.

Selon les formules convenues, le président de la Confédération a évoqué « Les défis planétaires auxquels l’humanité est confrontée et qu’il faudra surmonter pour que les jeunes continuent à bien vivre demain » en assurant que : « L’automobile fait partie de l’équation et devra notamment répondre au besoin de développement durable.»

Un renversement proprement orwellien : la guerre c’est la paix, la liberté c’est l’esclavage, l’ignorance c’est la force… et plus de bagnoles c’est un meilleur respect de l’environnement et des écosystèmes, sans parler du bien vivre des générations futures.

Selon Didier Burkhalter : « Le changement climatique nécessitera une réponse politique et une réponse de la science et de la technologie » et, au chapitre des réponses technologiques, le président du Salon de l’Auto, Maurice Turettini d’enchaîner sur les « modèles ultra-économiques » et les 7,2 % de véhicules sur les 900 exposés qui émettraient « moins de 95 grammes de CO2 par kilomètre »et qui seraient notre planche de salut verte. Tout en annonçant – au chapitre des réponses politiques – que l’initiative fédérale dite « Vache à lait », lancée il y a un an, lors du salon de l’automobile, allait être déposée à Berne – comme elle l’a été en effet ce lundi 10 mars avec 115 000 signatures.

Une initiative que nous aurons donc à combattre dans les urnes, qui voudrait« stopper le pillage permanent du porte-monnaie des automobilistes par les pouvoirs publics », selon la formule du comité interpartis mené par l’association des importateurs suisses d’automobiles (auto-suisse) qui exige via cette initiative l’affectation aux routes de l’entier du produit de l’impôt sur les huiles minérales, soit 3 milliards de francs en 2012, contre le 50 % aujourd’hui.

Il convient donc, à cette occasion, de rappeler que la bagnole c’est la mort. Relevons dans ce sens quelques faits par rapport à l’automobile que signalent opportunément les organisateurs de cet « Autre salon » à Genève, qui vise à combattre la célébration indécente de l’automobile.

Par exemple que chaque année dans le monde, 1,2 millions de personnes meurent dans des accidents de circulation et que 30 millions d’autres sont gravement blessées (OMS, Juin 2009). C’est 3200 personnes par jour, c’est-à-dire autant que les victimes au World Trade Center le 11-Septembre chaque jour ! La moitié de ces victimes sont des piétons et des cyclistes.

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Ou alors, parlant des plus faibles, que les enfants vivant en bordure de routes fréquentées par plus de 20 000 véhicules par jour (par exemple la rue de Lyon ou le Boulevard du Pont-d’Arve à Genève) ont six fois plus de risques de développer un cancer que ceux qui vivent aux abords de voies peu parcourues (moins de 500 véhicules/jour). (Monitor Publishing, avril 2000)

Et encore que Genève – par exemple – compte 468 voitures pour 1000 ha­bi­tant·e·s et que si l’on transposait ce taux insensé de motorisation automobile à toute la planète, il faudrait de l’ordre de 3 milliards de voitures ! Une impossibilité matérielle évidente ne serait-ce que pour cause des quantités limitées de pétrole et de matières premières.

Ou enfin que l’automobile est responsable de l’ordre de 30% des émissions de CO2, contribuant massivement au réchauffement climatique catastrophique qui menace l’avenir de l’humanité. La Suisse, avec 184 g de CO2 au km détient d’ailleurs un record des voitures les plus fortement émettrices de toute l’Europe !

Mais ce n’est évidemment qu’un volet de la réalité sinistre d’une mobilité écologiquement suicidaire. On en voit une autre, illustrée à quelques centaines de mètres du Palais des expositions de Genève où se déroule le salon de l’Auto. Il s’agit de l’explosion des vols low-cost sur la plateforme aéroportuaire de Cointrin. Celle-ci a aussi un prix écologique terrifiant, mais également un prix social et humain immédiat, que payent chaque jour les salarié·e·s sacrifiés sur l’autel d’un délire capitaliste qui fait monter toujours plus à l’Aéroport la pression du dumping en matière de conditions de travail et de salaire.

Cette pression-là s’est traduite dimanche par une explosion de mécontentement des travailleurs de Swissport, l’entreprise qui s’occupe de la plus grande part du handling (manutention) à Cointrin, qui ont arrêté le travail pendant deux heures et bloqué un certain nombre de vols en exigeant d’être traités correctement, en exigeant que l’Etat intervienne pour faire respecter des normes sociales et syndicales élémentaires sur le site dont il est propriétaire.

C’est du côté des quelques dizaines de tra­vail­leurs·euses qui ont participé à ce mouvement et qui ont osé mettre pour une ou deux heures un grain de sable dans la machine terrifiante d’un capitalisme écologiquement, socialement et humainement suicidaire que se situe l’espoir et l’avenir ! Ils méritent toute notre solidarité et notre engagement à leurs côtés.

Pierre Vanek