Comment la RATP utilise votre argent pour se développer à l’étranger

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Bonne nouvelle pour les sardines usagers du RER A, du RER B ou de la ligne 13 du métro parisien! La RATP a décidé d’investir et de lancer un nouveau tramway… à Tucson dans l’Arizona (USA)!

C’est le Figaro qui nous informe de cette réjouissante nouvelle en forme de cocorico, vous pensez, pour une fois qu’on parle de la RATP sans parler de grève, de CGT ou autres syndicats avec un couteau entre les dents.

C’est la filiale internationale de la RATP, RATP Dev, qui s’est vu confier l’exploitation et la maintenance du tramway de Tucson durant huit ans.

Car la Régie autonome des transports parisiens n’a désormais plus grand chose de « parisien ». RATP Dev est présent dans 12 pays et possède plus de 70 filiales de transports contrôlant des milliers de lignes de bus, de tramways ou de métros à travers le monde.

Pour une fois, la France exporte son savoir-faire et pas seulement du vin et du fromage! Tout est donc pour le mieux dans le meilleur des mondes?

Pas vraiment… En premier lieu, il faut quand même rappeler que la RATP est une entreprise publique, financée en grande partie par l’impôt des Franciliens et de manière accessoire par les usagers parisiens des transports publics qui payent leur ticket ou leur abonnement. Qui plus est, la RATP est lourdement endettée, environ 4 milliards d’euros en 2008.

Dans le même temps, les usagers parisiens de la RATP ont quelques motifs de protestation quant à l’offre proposée en matière de métros ou de RER…

La véritable question est donc de savoir si le développement international de la RATP permet au groupe de gagner de l’argent pour le réinvestir ensuite dans les transports parisiens. Ou alors s’agit-il seulement d’une danseuse coûteuse payée aux frais du contribuable?

Question difficile à trancher face à l’opacité des chiffres mais quelques indices amènent à penser qu’on est plutôt dans la seconde option.

En effet, selon des chiffres syndicaux, on découvre que le résultat net de l’entreprise RATP Dev est très faible et en baisse sur la période récente. Et plus la filiale se développe, moins elle est rentable.

Vous me direz, même un petit bénéfice est meilleur à prendre qu’une perte. Certes, sauf que la situation est sans doute plus compliquée. Ainsi, jusqu’à 2012, la filiale recevait des « dotations » de la maison mère, par exemple 27 millions d’euros pour la seule année 2012. Ne serait-ce pas là une méthode habile pour créer artificiellement un léger bénéfice?

Par ailleurs, il est annoncé par la RATP qu’à partir de 2013 « RATP DEV finance de façon autonome son développement. » Autrement dit, les « dotations » de la maison mère doivent prendre fin. Mais en réalité, le développement autonome de RATP Dev risque bien de se faire par le biais d’une croissance rapide et importante de l’endettement : de 35 M€ aujourd’hui, la dette va en effet passer à 201 M€ dès 2015.

Donc, quand le développement international de la RATP n’est pas payé pas l’usager des transports en commun ou le contribuable parisien, il est payé par de l’endettement. Question à 1,70 euro, prix du ticket à Paris: qui paiera au bout du compte l’endettement?

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Et si on entre dans le détail des investissements internationaux de la RATP, on trouve quelques pépites dont une dénichée par le site Bakchich, et qui concerne le rachat d’une société d’autobus à Casablanca au Maroc au début des années 2000.

Chiffrer le fiasco serait sans doute trop douloureux pour le contribuable. La facture de ses investissements foireux, la boîte publique les garde pour elle. Fort heureusement Bakchich est tombé sur un document interne. En 2008, sa direction a reconnu devant les syndicats maison avoir dû provisionner « 7 millions d’euros » pour couvrir les pertes d’exploitation et les créances non recouvrés pour la seule opération de Casablanca.

Mieux, la Régie a dû réinjecter 80 millions d’euros dans les caisses de sa filiale RATP Dev en 2007, une « dotation de plus » pour sauver les apparences et faire croire que le miracle international de la RATP continuait à fonctionner…

Certains fous se demandent pourquoi les transports en commun ne seraient pas gratuits? La réponse est claire, pour payer le développement international de la RATP!

Plus récemment, on apprend que la RATP n’exporte pas seulement ses bus et ses métros, mais aussi ses grèves! Ainsi, depuis 2012 la RATP gère 79 lignes de bus à Austin au Texas. Et sa première action dans le Texas n’a pas consisté à améliorer l’offre ou à investir dans le réseau, mais à réduire les coûts!

Selon les syndicats locaux, « A Austin, la RATP a adopté une attitude très agressive et négative. Elle semble déterminée à prouver qu’elle est aussi une coupeuse de coûts, même si cela veut dire qu’on pousse des travailleurs dans la misère, car à treize dollars de l’heure, le salaire de départ n’était pas élevé à Cap Metro et le sera encore moins demain”.

« Il est probable que nous nous mettions en grève, peut-être très rapidement », annonçait le représentant syndical du coin fin 2012. Les membres du syndicat à Austin ont d’ailleurs approuvé la grève dans la foulée. Les usagers ont dû alors remarquer le changement d’opérateur…

C’est fantastique, avec la RATP on a donc un groupe public qui joue à l’opérateur privé à l’international avec l’argent des contribuables parisiens qui s’entassent eux dans des RER bondés… Ils n’ont qu’à prendre le tramway de Tucson!

Et le meilleur, c’est qu’on exporte même nos grèves aux USA! La French touch sans doute…

livre-gratuitéMarcel Robert, auteur du livre « Transports publics urbains: Textes sur la gratuité« , 158 pages, 10 euros.

Un commentaire sur “Comment la RATP utilise votre argent pour se développer à l’étranger

  1. Roger Delogo

    Bouarf vous inquiétez pas, en fait c’est la pub, surabondante dans le métro, qui paie tout ça ! Et comme chacun sait, la pub c’est gratuit, donc c’est bon.

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