Quand les pistes cyclables améliorent le trafic automobile

Une des raisons importantes qui explique l’opposition à la mise en place de pistes cyclables tient dans les règles habituelles de l’ingénierie du trafic. Selon ces règles, les pistes cyclables conduiraient au ralentissement des voitures et à la congestion automobile.

La logique sous-jacente de l’ingénierie du trafic est simple: moins d’espace de route pour les voitures signifie plus de retard aux intersections. On n’est pas très loin de la logique reptilienne de l’automobiliste moyen: « si on diminue la taille du tuyau, on pourra écouler moins de voitures« .

De nombreuses villes dans le monde ont rejeté cette croyance populaire menant à affecter la quasi-totalité de l’espace à l’automobile. Mais, elle reste encore assez largement un obstacle au développement des pistes cyclables et, de manière plus large, à la mise en place de rues réellement multi-modales.

Or, il apparaît désormais assez clair qu’en prenant de l’espace à la voiture pour l’affecter aux vélos, on résout par la même occasion la plupart des problèmes de circulation automobile.

Il s’agit probablement d’un pendant de ce que l’on appelle le Paradoxe de Braess, qui montre qu’en supprimant des voies de circulation automobile, on améliore la fluidité.

En effet, un rapport récent sur ​​les pistes cyclables protégées publié par le New York City Department of Transportation offre un excellent exemple de la façon dont la sécurité des cyclistes peut être augmentée alors même que la vitesse de la voiture est maintenue.

Ce rapport décrit une situation typiquement américaine et donc pas forcément adaptée au contexte français ou européen. Mais, pour résumer, des travaux ont été réalisés à New York dans certaines rues afin de créer des pistes cyclables. L’espace pour créer ces pistes cyclables a été obtenu en réduisant la largeur des voies de circulation automobile, et non pas en supprimant des voies.

Dit autrement, là où il y avait trois ou quatre voies de circulation automobile (ce qui paraît quand même beaucoup en ville!), elles ont été maintenues mais en étant beaucoup moins larges.

Après ces changements, le trafic continue à s’écouler. Les chiffres du rapport montrent même une baisse globale des temps de déplacement automobile dans les rues où des pistes cyclables protégées ont été installés.

Lire aussi :  Les envahisseurs sont parmi nous

Donc, que s’est-il passé ici qui permet de surmonter l’idée traditionnelle que les pistes cyclables conduisent à une détérioration de la circulation pour les voitures? Sans doute de nombreux facteurs sont en cause, mais un porte-parole du New York City Department of Transportation explique que le flux de trafic régulier est en grande partie le résultat de la mise en place de voies dédiées au tourne à gauche.

Dans les anciennes configurations de rues, pour tourner les voitures se mettaient à gauche d’une voie de circulation générale; dans la nouvelle configuration, ils utilisent un tourne à gauche qui vient longer la piste cyclable (photo ci-dessous).

new-york-cyclable

Mais, certains changements ont même été plus loin encore. Ainsi, la conception de la Première Avenue a été considérablement modifiée. Là où il y avait auparavant cinq voies de circulation et deux voies de stationnement pour les voitures (rien que ça!), il y a désormais « seulement » trois voies de circulation, deux voies de stationnement, une voie de bus, et une piste cyclable protégée. (image ci-dessous)

premiere-avenue

Malgré tous ces changements, les vitesses de déplacement sont restées à peu près les mêmes par rapport à la situation précédente. La vitesse des taxis en journée a fléchi de peut-être un mile par heure après la reconfiguration (environ 1,6 km/h), selon les chiffres du ministère des Transports. Mais ce retard minuscule a probablement été contrecarré par une hausse globale de la mobilité: le volume des vélos a augmenté de 160%, par exemple, en plus de l’avantage fourni aux transport en commun par la mise en place d’une voie dédiée.

La conclusion est donc claire. Les villes qui sont régulièrement paralysées par les bouchons automobile connaissent désormais la solution à leur problème: mettre en place des pistes cyclables sécurisées et des voies de circulation réservées aux bus!

Source: http://www.citylab.com/cityfixer/2014/09/when-adding-bike-lanes-actually-reduces-traffic-delays/379623/

18 commentaires sur “Quand les pistes cyclables améliorent le trafic automobile

  1. @MatttRab

    J’étais également enthousiaste à la lecture du titre de l’article de Citylab mais la conclusion que j’en ai retenu était surtout l’intérêt de la file de tourne à gauche… ce qui n’a rien à voir avec la création des aménagements cyclables. La (mauvaise) conclusion que l’on pourrait en tirer est de faire des tourne-à-gauche partout pour fluidifier le trafic et que les pistes cyclables sont là pour faire joli…

  2. pedibus

    Pour convaincre les titulaires de l’idée reçue – géométrique – de l’entrave au trafic auto (les tous puissants techniciens territoriaux gestionnaires de la ciculation…) dès qu’il s’agit de mettre en place des couloirs bus et vélos, qu’on leur oppose alors l’argument de la mécanique des fluides : une moindre vitesse diminue les turbulences et améliore le débit…

    Comme ça on reste de plain pied avec l’idéologie techniciste qui a bonne presse dans le milieu et on fait baisser la pression automobile : au moins peut on espérer un petit transfert de part modale des motorisés individualistes au profit de transports urbains plus crédibles quant à la qualité du service offert, c’est-à-dire plus rapides…

    L’idée n’est pas nouvelle : l’urbaniste Marc Weil est bon pédagogue là-dessus, en préconisant de baisser la vitesse du flus auto pour que ce mode perde de son attrait… quand ça roule…

  3. alfred

    MAIS ALORS si on fait trop de pistes cyclables…les vélos vont être bloquer dans des bouchons !
    Que le monde est compliqué !

  4. Pim

    En dehors de tout savant calcul, ma compréhension du sujet est la suivante :
    Ce qui permet de réduire les bouchons c’ est la diminution du trafic automobile en soi. Autrement dit, il faut faire diminuer le nombre de bagnoles.
    Comment? En ne leur donnant plus envie de fréquenter la ville en bagnole mais autrement.
    Comment? En réduisant leur espace.
    Ainsi, le procédé énoncé dans l’article consiste à combler les espaces historiques dédiées aux bagnoles par des espaces modernes multi-modaux : une ou 2 voies de tram/bus, une ou 2 voies cyclables et 2 voies séparées de voitures.
    Au final, cela réduit la vitesse générale, car les automobilistes ne peuvent plus doubler, cela améliore la sécurité, la « paisibilité » et la « vivabilité » du quartier, car d’expérience, c’est bien plus agréable qu’un traditionnel boulevard à 2×2 voies!
    Seuls les automobilistes motivés, (ayant peut etre une presque bonne raison de passer par là) empruntent ces tronçons.

  5. Pim

    NB : j’écris le commentaire ci dessus non par plaisir de paraphraser l’article, mais en 1ère lecture, je comprenais qu’en créant un piste cyclable à la place d’une voie automobile, tout allait mieux comme par magie.
    L’amputation d’une voie automobile diminue clairement la quantité de véhicules qui fréquente cet axe en le répartissant sur les axes plus petits voisins (axes devenus de même taille du coup). Je pense que le tour de magie est là.
    A contrario, l’ajout d’une voie amène plus de trafic, délaisse les axes voisins et sature in fine les petites rues voisines des CV car tout le monde veut venir en bagnole puisqu’il y a un grand boulevard jusqu’au CV.

  6. Jean-Marc

    @MatttRab

    La différence entre une ville avec des pistes vélos ou sans a déjà été testée,
    avec la hollande et le danemark d’un coté,
    et les USA de l autre.

    La fluidité de copenhague et d amsterdam d’un coté, et les bouchons des 2×6 et 2×8 voies de L.A., Houston ou Phoenix de l autre.


    Remarque :
    bien sûr, on pourrait me rétorquer, qu’ Houston, Phoenix et LA sont moins denses que Copenhague ou Amsterdam…

    mais c est l oeuf et la poule :
    plus on fait de place à la voiture, plus elle en occupe, si bien qu’il faut élargir les rues pour accueillir ces nouvelles voitures (les gens ou entreprises déménagent plus loin, vu que cela reste « à 15-20 minutes par la route »).
    Au contraire, plus on rétrécie les voies autorisées aux autos (en nombres et largeurs), et qu’on développe les offres alternatives*, plus cela favorise les report vers les autres modes (TEC et modes actifs) donc moins il y a de bouchons]

    * seulement diminuer les voies auto, sans offrir d alternatives, ou offrir des alternatives sans incitation à les utiliser, comme la gratuité des TEC ou des voies en moins pour les autos, cela ne marche pas :
    il faut coupler la contrainte sur l auto et l incitation sur les autres modes, pour que les reports se fassent

    exemple des parkings de délestages vides aux entrées de villes, à coté des arrêts de TEC, car il existe tjrs pleins de parkings dans les entreprises ou dans la ville pour accueillir ces voitures des périurbains.

    (à l inverse de nombreuses villes françaises, ces parkings de délestages marchent très bien au luxembourg, car ils sont associés une très forte contrainte de +/- absence de parkings auto peu chers dans la ville)

  7. Vincent

    C’est pas tout ça, mais on attend toujours l’enquête qui nous donnera les motifs exprimés par les automobilistes aux Porte de Paris pour expliquer pourquoi ils sont venus en voiture, malgré les embouteillages et les problèmes de parking.

  8. pedibus

    Il faut reprendre la formule de Lucrèce : « c’est l’organe qui créé la fonction ».

    Ici c’est l’offre d’infrastructures dédiées à l’automobile – voire même ces fameux « espaces partagés » trop accomodants… – qui créé les embarras de circulation et les externalités négatives qu’il est inutile ici de rappeler.
    Or cette offre il faut la reconvertir au profit des modes dont la pratique est favorable à la société et son environnement…

  9. Benchaouche yassin

    internotes,étant à nantes je me déplace qu’en vélo,d’après tout ce que j’ai lu auparavent,j’ai l’impression que les commentaires viennent de la vision d’automobilistes,en faites ils ne voient rien,préoccupés d’appuyés dès que possible sur l’accélérateur..A nantes les pistes cyclables que j’utilise moyennement,car elles sont dangereuses,mal indiqués,avec beaucoup de nid de poules et le trajet est beaucoup plus long que l’automobiles,donc je roule près des voitures et si c’est engorgées ,je roule à gauche,de façon à ce qu’on me vois et de très loin..Mais combien de fois ,meme des gros camion de chantier comme les autos,essaient de passer à des rétrécissement de chaussées,alors meme que je suis sur une voie cyclabe,vous brule la priorité en vous doublant et passent à moin de 10 cm.Ceci est très dangereux,il n’y a que les bus qui vous laisse passés par amabilité et ne force en aucun cas le passage.dès fois aussi on se fait agresser,alors que la circulation est très dense,parce que vous vous trouver sur la route ,et sont presque à vous renverser,car pour eux ils faut que je prenne la piste cyclable qui je le souligne n’est pas obligatoire et pour moi c’est une commodité ,car le trajet est moin long..pour conclure les pistes cyclable à nantes sont faits pour des trajets touristiques et conçues pour des familles le week end ,ce qui veut dire qu’elle ne servent pratiquement pour les pluparts à rien en semaine.En se qui concernent les priorités,c’est toujours l’automobiles qui en bénéficient.Je suis écoeuré de la politique de déplacements,les véhicules sont toujours rois de l’alsphalte ce qui renforcent leurs positions de puissances à vous dominer et pratiquer des manoeuvres très dangereuses,ou la cordialité et le civisme n’a plus court..merci d’avoir pris un petit moment pour me lire,car je réflète la réalité..

  10. legeographe

    Eh bien, s’il s’avère qu’on améliore (grâce à nos bicyclettes) leur temps de parcours, on va peut-être pouvoir penser à redonner une vraie priorité de passage aux autres usagers…
    Par exemple, on pourrait imaginer des pistes cyclables qui ne perdent pas constamment la priorité alors même qu’on continue tout droit…

    Ou bien des boutons pour que les piétons demandent que le feu piéton passe au vert (de grâce, piétons du monde entier, quand vous voyez ces boutons, servez-vous-en, ne serait-ce que dans un souci de lutte commune)…

    Ou, encore, la réduction du nombre de voies sur tous les axes où il n’y aurait pas encore de trottoirs assez larges pour les piétons/PMR/poussettes ni de pistes cyclables…

    Voilà qui devrait créer une ville plus belle !

  11. Jean-Marc

    « Par exemple, on pourrait imaginer des pistes cyclables qui ne perdent pas constamment la priorité alors même qu’on continue tout droit… »

    C est déjà la recommandation OFFICIELLE du CERTU (c.f. certu.fr), que les municipalités sont sensées suivre :

    c est chaque municipalité/agglo, qui décide, en conscience, de ne pas tenir compte de ces recommandations officielles…. et qui, après, se plaignent des frais d’infrastructures, de travaux et du nombre croissants de nouveaux périurbains, ayant quitté leur agglo.
    Des problèmes directement issus de la priorité aux voitures qu’ils ont voté…

  12. pedibus

    Une solution élégante – mais pas complètement satisfaisante pour résoudre le stop and go – consisterait à instaurer des passages piétons d’office au droit des intersections avec la piste cyclable : le cycliste aurait alors la ressource de descendre de sa machine pour redevenir piéton et faire valoir sa priorité face au flux motorisé…

    La situation de la piste cyclable Bordeaux Lacanau et Bordeaux Sauveterre de Guyenne, par exemple – sur l’emprise d’une ancienne voie ferrée -, est très pénible à cause de ces intersections non prioritaires, en agglomération particulièrement, où le réseau viaire est le plus dense.

  13. Douglas Carnall

    Aussi habitant de Nantes, je suis d’accord avec Benchaouche Yassin que l’arrivée des pistes cyclables ne représente pas forcément un amélioration de vie pour le cycliste. À Nantes, il y a bien la volonté de faire une politique pour encourager le vélo. Or la mairie dépense pas mal des sous sur la voirie qui sont dédiés aux cyclistes. Malheureusement, un effet gymkhana a été crée : une course d’obstacles, bordures, poteaux, déviations, courbes peu nécessaires, feu contradictoires l’un 2m de l’autre et cetera–de quoi faire plaisir pour un enthousiaste de VTT, plutôt que l’humble ouvrier qui voulait atteint son boulot avec un minimum de dépense énérgetique.
    Et on plus, maintenant les conducteurs à coté voulaient donner une leçon klaxonne au cycliste de bon sens qui évite ces conneries d’urbaniste en roulant sur la route.
    Il doit être une incontournable principe que le cycliste garde toujours sa droit de rouler sur la route. Les nouvelles pistes sont pour les nouvelle cyclistes, les vieux, les handicapés, les enfants. Bien sur, c’est toujours bien d’avoir le choix. Mais souvent le choix serait direct et vite, sur une route lisse.
    « Maman, pourquoi la piste cyclable est obligatoire? »
    « Parce qu’elle est inférieure. »

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