Pourquoi préférer le vélo-risque au risque voiture

Le vélo est-il plus risqué que la voiture? Et si c’était l’inverse? Vain débat! Le risque est un besoin fondamental de l’âme humaine. La question n’est donc pas celle du plus risqué mais celle du mieux risqué. Partant de là, pourquoi sur des distances raisonnables, préférer le vélo à la voiture? Parce que le risque vélo est plus fructueux que le risque voiture.

Quatre kilomètres. C’est la distance bureau-maison que je viens de calculer sur le compteur de ma voiture. Quand j’effectue mon parcours, j’en croise des cyclistes. Et pourquoi pas moi?

BEAUCOUP TROP DANGEREUX DE SE FAUFILER ENTRE LES VOITURES

A peine sorti de mon véhicule, je tombe sur un voisin qui navigue toujours en grosse cylindrée. Je lui confie ma tentation de rejoindre le monde du deux roues:
-Tu n’es pas fou! Le vélo? Beaucoup trop dangereux de se faufiler entre les voitures. En plus tu as charge de famille. Alors, pas question pour toi de prendre des risques inutiles.

Arrive le Monsieur Vélo du quartier, adepte inconditionnel de la petite reine. Rapidement le ton monte entre mes deux voisins. Le débat se résume caricaturalement à un duel: « la voiture, plus risqué que le vélo! » contre « le vélo, plus risqué que la voiture! »

LE RISQUE EST UN BESOIN ESSENTIEL DE L’ÂME

Cette joute verbale ne m’aide pas beaucoup dans ma réflexion. Je laisse mes voisins à leurs emportements. Une fois chez moi, je me rends compte qu’ils s’accordent au moins sur une chose: le risque. En voiture ou à vélo, il y a du risque. Et le risque c’est fondamental: « Le risque est un besoin essentiel de l’âme. L’absence de risque suscite une espèce d’ennui qui paralyse autrement que la peur, mais presque autant. (…) Le risque est un danger qui provoque une réaction réfléchie; c’est-à-dire qu’il ne dépasse pas les ressources de l’âme au point de l’écraser sous la peur. Dans certains cas, il enferme une part de jeu; dans d’autres cas, quand une obligation précise pousse l’homme à y faire face, il constitue le plus haut stimulant possible. » (1)

Lire aussi :  Appel aux automobilistes

VIVRE PLUS CORPS CŒUR ET ÂME

Quel risque choisir? La question ne se pose pas quand je dois faire trente kilomètres avec ma famille le week-end:
– les enfants en voiture!

Mais sur mon quotidien de quatre bornes, le discernement s’impose. Vous le savez, on reconnaît l’arbre à ses fruits. Quel arbre élire? La voiture ou le vélo?

Je décide de tenter la bicyclette. Après quelques semaines de pratique, j’arrive à mes premières conclusions:
– L’hiver, en voiture, j’ai toujours chaud. A vélo, le vent me glace mais bon sang! j’en apprécie mieux la tasse de café en arrivant,
– Aussi rapide à vélo qu’en voiture: souvenir même d’une longue file de voitures arrêtées à un feu rouge remontée d’un trait,
– Impression à vélo de vivre plus corps cœur et âme là où la voiture me laissait plutôt alangui.
– J’ai pu enfin m’arrêter parler avec cet ami que je ne faisais que saluer de loin derrière mon pare brise.

LA BRANCHE CHARGÉE DE FRUITS S’INCLINE

Cela en fait des fruits cyclables! C’est décidé, j’adopte la petite reine. Voyez-vous, voisin adepte du « tout voiture », je serai même raisonnable. J’enfourcherai mon vélo sauf les jours de pluies débordantes, avec l’assurance que se pencher sur son guidon, lutter parfois tête baissée contre le vent d’ouest n’est pas vain car « la branche chargée de fruits s’incline » (Thomas Fuller).

Loïc TERTRAIS

Illustration Bertrand Dosseur

(1) Simone WEILL – L’enracinement- Editions GALLIMARD 1990

10 commentaires sur “Pourquoi préférer le vélo-risque au risque voiture

  1. Vincent

    « Le risque est un besoin essentiel de l’âme »

    Réflexion très masculine.

  2. TERTRAIS

    « Le risque est un besoin essentiel de l’âme, » réflexion masculine ? Réflexion anthropologique de la philosophe  Simone Weill (L’enracinement )

  3. pédibus

    Oui Loïc, les modes actifs sont des actes à risque mais qui rapportent du lien social, du bien être pour ses pratiquants et l’environnement: la friction avec ses semblables dans la corporéité exposée renvoie au corps social concret de la foule piétonne par exemple, ou encore aux « conflits » maîtrisés par l’urbanité entre piétons et cyclistes et enfin au discours pédagogique – à son corps défendant… – du cycliste qui s’impose sur l’itinéraire de l’automobiliste, déclassé comme  dominateur, suite navrante de l’ostentation des carrosses de la « période moderne »…

    Le risque de l’automobile, outre celui qu’elle fait courir aux sociétés et leur environnement, c’est l’isolement du conducteur : l’ennui de l’enfermement avec soi même de « l’atomobiliste »…

  4. paladur

    Je dirai aussi que l’expérience de la vulnérabilité en vélo permet d’être plus conscient de son environnement, de sa beauté ou de sa laideur. Cette prise de conscience est le premier pas vers la compréhension du monde.

  5. Augustin

    A propos du risque, il faut être catégorique sur la question :

    Le risque vient des conséquences d’un potentiel accident, qui découle directement de la quantité d’énergie mise en jeu lors du déplacement.

    Or Ecinétique = 1/2 * m * v²

    E(vélo + cycliste) = 1/2 * 100kg * 25km/h  = 347 J

    E(voiture + automobiliste) = 1/2 * 1000kg * 50km/h (au bas mot) = 1735 J

    Conclusion : le danger est 20 fois plus important du fait de la voiture.

    Fin de la discussion.

     

  6. David

    @Augustin:

    Pourquoi 20 fois plus important le danger de la voiture?

    1735 c’est seulement 5 fois 347.

    Quelle est la formule qui détermine l’accroissement de la gravité du choc en fonction de l’accroissement de la masse et de la vitesse?

    On se doute que c’est exponentiel mais comment le chiffrer précisément?

    Merci d’avance, amis physiciens, de votre réponse.

    PS: ne craignez pas d’être pédagogues, je ne suis pas spécialiste :))

  7. Augustin

    @David,

    Je me suis trompé dans le calcul pour la voiture : le résultat est 6944 J (j’ai toujours détesté le passage à la calculette…). Je ne peux malheureusement pas éditer mon commentaire précédent.

    Mais le facteur 20 est correct, puisque le poids est 10 fois plus important, et la vitesse double.

    Enfin, je ne pense pas qu’il y ait une formule de l’agravement du choc, celui-ci dépendant de multiples paramètres, certains aléatoires. Mais ce qui est sûr, c’est qu’en cas de choc, c’est notre corps qui doit encaisser cette énergie et c’est ce qui cause des dégats sur le corps humain.

    Voici ma maigre contribution basée sur mes souvenirs étudiants. Je pense que je me pencherai un peu plus en détail sur la question à l’occasion !

  8. Jean-Marc

    @David et Augustin

    Augustin s est trompé dans sa correstion : éliminons la résolution numérique, c est plus simple :

     

    je cite, en éliminant  le résultat, et en corrigeant les manques (le *25 et le *50 oubliés) :

    « Or Ecinétique = 1/2 * m * v²

    Ec(vélo + cycliste) = 1/2 * 100kg * 25*25 km/h

    Ec(voiture EN VILLE + automobiliste) = 1/2 * 1000kg * 50 *50 km/h

    = 1/2 * 10*100 * 2*25 * 2*25

    =1/2 * 100 * 25 * 25 * 10 * 2* 2

    =Ec(vélo+cycliste) * 10 * 2 * 2

    Ec (voiture EN VILLE +automobiliste)=40 x Ec(vélo+cycliste)

     

    en sachant que 1 000kg pour une auto, c est peu…

    l Ec, c est l énergie qui se disperse lors d un choc frontal entrainant un arrêt : lors du passage de la vitesse V à 0km/h

     

    en fait, par chance, certains accrochages ne dispersent pas toutes l Ec, cependant, plus l Ec est importante, plus une fraction de cette EC reste importante :

    quand 2 piétons marchant en sens inverse, se cognent le bras, leur bras encaissent une fraction de l Ec de piéton 1 et une fraction de l Ec de piéton 2.

    (chaque piéton, principe de la ction-réaction, encaissant la même somme de fraction des Ec)

    et ils continuent leurs route sans problème, et sans bras cassé…

     

    quand 2 voitures roulant à 80 sur une nationale, en sens inverse, par brouillard, s accrochent l aile,

    la fraction de leur 2 Ec encaissée a des conséquences bien pire : perte de contrôle, tête à queue, voiture volant au-dessus du talus, et souvent, morts

    (en fait, l Ec du 1er choc n entraine que la perte de contrôle : mais il reste tellement d Ec, qu’elle est alors dispersée lors des têtes à queues et/ou tonneaux, et de l arrêt final :

    en fait,plus l Ec est encaissée vite, dans un espace court, plus le corps encaisse des G, des accélérations (décélérations, en fait… mais bon, c est pareil), et donc, plus il y a de destruction physiologique, voire mortelle

    c.f. les vieilles Volvo, dure comme tout, qui encaissaient tout = l Ec etait dispersée, absorbée par le corps des pasagers, devenant de la bouillis :

    une R5, avec les ailes se pliants, qui faisait rire les proprio de volvo, s en sortaient vivants : c est la voiture, pas les passagers, qui encaissaient la décélération la plus brutale, le max de l Ec.

    Donc, OUI, à moins de changer les lois de la physique (bon courage…), une voiture de plus de 1.2 tonnes, pouvant rouler à plus de 60km, sera toujours, forcément, plus mortelle pour ses occupants, qu’un vélo, quand un accident à lieu.

    les ceintures à pré-tentionneur, airbags, et bloc moteur à absorption d’énergie (par pliage de la taule) permettent d en réduire la dangerosité, pas de l éliminer :

    les tests des voitures sont faites pour rouler à 50km  (de mémoire.. c est peut-être 43, 45 ou 53), et que les occupants se sortent vivant (pas forcement en bonne santé…) d un choc frontal dans un mur, à cette vitesse :

    elles ne sont pas conçues pour un choc frontal à 80, 90 ou -biensûr- à 150km/h…

    même pas les ferrari ou les porsche : elles répondent aux même tests qu’une smart ou une twingo… et, parfois, elles réussient même moins bien les tests = à une vitesse IDENTIQUE, elles sont plus mortelles qu’une smart ou twingo.. alors, à une vitesse triple (80 contre 240), je te laisse imaginer ce que les pompiers ont la chance d aller ramasser…

    cependant, toutes les personnes ne meurent pas, ou ne se retrouvent pas dans un fauteuil, tetraplégiques, après un accident de voiture à 50km/h (au contraire, c est la minorité qui meure), car les chocs frontaux avec arrêt brutal, comme un mur de béton ou un camion à l’arrêt, représentent une minorité des chocs réels.

     

  9. Jean-Marc

    Ce n est pas de moi, mais de ROAMDAM

    (à qui je n ai pas demandé l autorisation, car son pseudo ne donne pas d adresse mail :'( )

    La différence entre 2 chasseurs, un conte qui va rappeler bien des choses aux cyclistes/automobilistes :

    « Richard et Renault vont souvent chasser ensemble, dans la même forêt. Mais ils n’ont pas les mêmes goûts. Richard est plutôt archer, tandis que Renault est plutôt bazooka.

    Du coup, quand Renault va chasser, il se trimballe un gros sac, une arme très lourde, il fait beaucoup de bruit, il casse des branches en passant, et en plus il râle beaucoup parce qu’il est ralenti par ses bottes qui s’enfoncent dans la boue. Surtout, Richard se déplace quand même beaucoup plus vite que lui, et, comme il fait moins de bruit, chasse beaucoup mieux.

    Ce qui a tendance à agacer Renault, à la longue. « Non mais il fait n’importe quoi Richard, il monte sur les arbres, il rampe sous les fougères, il ne respecte rien ! Est-ce que je monte aux arbres moi hein ? » Beh non Renault, tu as un bazooka, tu ne vas pas monter sur les arbres.

    Des fois, des choses malheureuses arrivent à la chasse. Une mauvaise flèche, une roquette partie un peu trop à droite… Renault ne manque pas de signaler qu’avec tous ces archers qui traînent dans la forêt sans faire de bruit, il est obligé de faire vachement attention, ce qui le saoûle un peu quand même, il est là pour tuer du gibier, pas pour faire gaffe à ses congénères amateurs de flèches ! C’est vrai qu’un tir de bazooka qui rate, ça tue à tous les coups, et je vous raconte pas le bordel, c’est toujours le mec qui a tiré la roquette qui est en tort, jamais l’archer qui était sur la trajectoire ! Comme la fois où Renault a confondu un sanglier et Richard caché dans un buisson. Heureusement, Richard est vif et il connaît son petit Renault, il a pu esquiver, mais malheureusement la flèche qu’il préparait est partie et a transpercé la gorge de Mamie Pédestre qui passait par là.

    Tout le village a été ému de la mort de Mamie Pédestre, elle n’avait rien demandé à personne elle. On ne sait pas trop pourquoi, mais depuis cet accident, la communauté villageoise est obsédée par les archers, les accusant de tous les torts, oubliant au passage les désastres causés par les tirs de roquette manqués. Faut dire que pas mal de villageois chassent au bazooka, du coup il vaut mieux cracher sur Richard que sur Renault s’ils veulent continuer. Comme les archers sont peu nombreux, ça marche assez bien, et Renault est désormais ravi de pouvoir défoncer en paix son gibier à coups de roquette et de gueuler sur Richard après avoir couru un quart d’heure à toute allure pour finalement voir le lièvre qu’il suivait (oui oui, il faut au moins un bazooka pour buter un lièvre, ça évite d’avoir à le couper pour le cuisiner) depuis un quart d’heure transpercé d’une flèche venue d’on ne sait où.

    « Je l’aimais bien Richard quand même, il avait l’air de bien s’éclater avec son arc, et j’avoue qu’il avait un peu moins de bide que moi. Mais bon, comme je le dis toujours « Plus t’es gros, plus t’es fort, et plus t’as le droit d’y aller comme un bourrin ». Richard, de son côté, continue d’utiliser son arc, même s’il est un peu emmerdé par le fait qu’une compagnie d’assurance de chasseurs au bazooka est en train de faire pression auprès de la fédé pour que les archers portent des gilets par balle. Histoire que les mecs comme Renault puissent faire encore moins attention, même si le gilet ne protègera ni Richard ni Mamie Pédestre contre un tir de roquette… »

     

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