A vélo, retrouvez l’aventure au quotidien

« Ce qui rend la vie romanesque et pleine de possibilités ardentes, c’est l’existence de ces grandes limitations naturelles qui nous forcent tous à subir les évènements que nous n’aimons pas et que nous n’attendons pas. » Gilbert Keith Chesterton (1)

Huit kilomètres de pistes, après ça ira mieux

Il est 13 heures 15. Pause déjeuner à la maison. La touche météo de mon I Phone me prédit : « Maintenant : nuageux. » C’est vrai, je n’ai qu’à regarder par la fenêtre, le temps est à la bourrasque grise. Mais je lis également: « 14 heures: Entre nuages et soleil. » Pas de quoi s’affoler. C’est décidé, je prends ma bicyclette pour rejoindre le cabinet cet après midi. Huit kilomètres de pistes, après ça ira mieux. 13 h 30 : je sors la bécane du garage. Dehors, le temps est toujours gris. Il y a même de l’humidité dans l’air. J’ai la tentation de prendre la voiture. Mais une voix en moi me rappelle à l’ordre : tu as décidé vélo, alors c’est vélo ! Il ne faut parfois pas trop réfléchir.

Je traverse un grain

J’enfourche mon deux roues et me lance dans la rue accompagné par quelques gouttes. Inquiet sur les conditions météo, je me raccroche aux promesses de mon I Phone. Les premiers cent mètres sont rassurants. Pas trop de flotte. Du vent, oui. Mais, plus j’avance, plus il faut me rendre à l’évidence, je traverse un grain. Normal en Bretagne. Coup de vent à tribord. Balloté à bâbord. Pluie cinglante. Et à peine deux kilomètres de roulés. Je n’ai pas emporté de pantalon de ciré. Ce serait raisonnable de faire demi-tour. Pas question ! Je décide de m’abandonner à ma petite audace et au bon-vouloir du ciel.

Lire aussi :  Du tramway au PLU, épilogue politique

L’âme humaine faite pour l’aventure

Je vois peu à peu mon pantalon se piqueter d’eau avant de passer en mode éponge. J’arrive trempé au bureau vers 14 heures. Mouillé mais heureux car j’ai la certitude que ce moment passé à subir les caprices du ciel m’a permis de retrouver un peu plus les profondeurs de mon âme car « l’âme humaine n’est pas faite pour maîtriser toutes les situations, elle est faite pour l’aventure !  » (2) J’accroche mon vélo. Je lève les yeux et vois le soleil qui perce enfin. L’I phone avait raison.

Loïc Tertrais

Illustration Bertrand Dosseur

Notes

(1) La raison pour laquelle la vie des riches est au fond si plate et si dépourvue d’évènements, c’est simplement qu’ils peuvent choisir les événements. Les riches s’ennuient parce qu’ils sont omnipotents. Ils sont incapables de goûter l’aventure parce qu’ils la créent eux-mêmes. Ce qui rend la vie romanesque et pleine de possibilités ardentes, c’est l’existence de ces grandes limitations naturelles qui nous forcent tous à subir les évènements que nous n’aimons pas et que nous n’attendons pas. Gilbert Keith Chesterton – Hérétiques – Editions Saint-Rémi, 2008 – « L’univers de G.K Chesterton » Philippe MAXENCE – Editions VIA ROMANA 2008
(2) Indomptable – John Eldredge- Editions FAREL 2005.

12 commentaires sur “A vélo, retrouvez l’aventure au quotidien

  1. Cablat Christophe

    Aloha

     

    Cette vision est mon quotidien, je me sens un homme des hautes plaines tout le temps sur ma monture. Comparer un vélo à une monture, quelle drôle d’idée ! J’assume pleinement cette comparaison car ma bicyclette est à mes yeux ce moyen de transport doux qui me porte dans ma ville ou à l’autre bout de la terre. Tel un cow-boy des temps modernes avec son cheval fidèle je pars conquérir le territoire dans la lenteur. Avec ses sacoches  il me fait ressembler parfois à Charles Ingalls le héros de LA PETITE MAISON DANS LA PRARIE mais c’est mon côté candide.  Aller au marché, au bureau, prévoir une virée dans le Béarn ou partir plusieurs jours devient un moment de plaisir et de liberté.

     

    Christophe

  2. Vincent

    « l’âme humaine n’est pas faite pour maîtriser toutes les situations, elle est faite pour l’aventure !  »

    Comme Tchernobyl et Fukushima.

  3. végédécroissant

    J’aurais pu également écrire cet article car je vie pleinement cela au quotidien. Quelle chance avons nous, nous cyclistes, de profiter ainsi des éléments naturels qui parfois se déchainent sur nous. Quelle chance de sentir cette odeur si particulière qu’est la pluie, de ressentir le vent, le soleil sur la peau… Je rétorque toujours à mes collègues automobilistes invétérés qui me qualifient de courageux de me déplacer à vélo lorsqu’il pleut ou fait froid (voir quand il fait chaud), que moi même je les trouve courageux de mener  une vie carcérale, toujours enfermés dans quelque chose (maison, voiture, bureau, voiture, supermarché, voiture, maison, voiture, cinéma, voiture, maison, etc.).

    Merci Loïc pour ce témoignage qui reflète la vraie vie du cycliste au quotidien.

    Sylvain

  4. Victorien

    OK sur le fond. Un bémol toutefois sur l’usage de l’Iphone : ça contient (entre autres) du coltan, minerai pillé en RDC ( entre autres ). Des enfants l’extraient des mines et en prime il y a quelques guerres civiles. Source de ces infos : lire le livre « Le téléphone portable, gadget de destruction massive » aux éditions « Pièces et main d’oeuvre » :

    http://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=7

    Le vélo, c’est très bien mais encore mieux sans Iphone !

    Franck

  5. Victorien

    Un peu de poésie pour rebondir sur mon précédent message !
     
     
    Totem des temps modernes, nouvelle égérie,
    Elément indispensable, prothèse de l’humain,
    Le summum est de toujours l’avoir en main.
    Etre connecté, c’est l’impression d’être en vie.
    Peur de ne pas être joignable, à toute heure :
    Homo sapiens sapiens des temps modernes.
    Oeil rivé sur son écran, ainsi va le bonheur,
    Négligeant ses pairs, sans doute trop ternes.
    Etre, toujours devoir répondre, dans l’urgence…
     
    Peut-être serait-il temps de retrouver un sens,
    On est en train de devenir de nouveaux esclaves !
    Raillant les chaînes des prisonniers, nous voici
    Tributaires de ce fil à la patte, nouvelle entrave
    A la liberté, à qui il serait temps de redonner vie !
    Bienheureux celui qui vit librement et qui du futile,
    L‘a relégué au musée des inventions de l’inutile,
    Et a compris que la liberté rime avec la sobriété…

  6. Jean-Marc

    T’inquiète, Victorien/Franck :

    Tous les cyclistes n’ont pas de Go-Pro, GPS, cardio-truc ni smartphone.

    Pour ma part, pour savoir comment m’habiller, avant de partir, je regarde par la fenêtre.

    Je ne m intéresse pas au temps qu’il fera pour le retour :

    Deja, sur une demi-heure donnée, il pleut/neige très peu souvent; et, les très rares fois où il y a des bourrasques violentes/pluies diluviennes, sous lesquelles je n ai pas trop envie d aller, je reste 20 à 40 minutes de plus au boulot (à bosser… et, si cela se prolonge, sur le net), en général, celà ne dure pas.

     

    Et, après le boulot, que ce soit pour aller en course ou rentrer chez moi, que m importe d’y arriver mouillé (et j ai un peu d’équipement, d habits de secours, au boulot, en cas de nécessité absolue).

     

    Oui…. comme 90% des personnes en âge de travailler et ayant un travail, mes principaux trajets soit vont, soit viennent de mon boulot et/ou de chez moi.

    C est triste, mais c est une réalité pour bcp d entre nous…

    En fait, depuis que j ai vendu ma voiture et que je suis passé au tout-vélo, j ai bien plus de trajets « autres » qu’avant, et que la majorité de mes collègues…

    La liberté réelle, qu’importe qu’il y ait des bouchons, des travaux, des manifs, qu’importe que toutes les places de parkings soient prises, et où sont ces parkings :

    la voiture, c est la liberté théorique :

    on peut partir, tous les vendredis soirs, à amsterdam, barcelone, turin, berlin ou chamberix… mais on ne le fait jamais… (et, en train/avion, c est plus indiqué…)

    le vélo, c est la liberté réelle : on peut partir au ciné, à la bibliothèque, au restau, chez un ami,…

    et, vu qu’il n y a aucune contrainte, si celà est sur la même agglo, il n y a aucun frein à le faire, si bien qu’on le fait…

    (aller au ciné ou à la piscine en voiture… si on est seul ou à 2, le prix réel tout compris pour le conducteur (pas uniquement l essence, qui compte pour moins d’1/3 pour les grosses voitures neuves, et pour la 1/2 pour les petites achetées d occase et auto-réparée) du trajet, revient souvent plus cher que le prix des entrées…)

     

    Quand j avais une voiture,

    j ai fait un petit calcul :

    en enlevant les trajets impliquant maison et/ou boulot et/ou courses,

    les trajets restant, un %age non négligeable, ce n etait pas ma qui me déplacé en voiture, mais ma voiture qui se servait de moi comme chauffeur pour se déplacer :

     

    je m amenai à la pompe (au moins 2 fois par mois),

    je m amenai au garagiste/au CT et/ou j allais la rechercher chez le garagiste/au CT

    avec le vélo.. c est moi qui vais où je veux, et pas le vélo qui me contrains à faire des déplacements forcés pour lui.

    mais bon… je comprend qu’on puisse adorer aller à la pompe et chez le garagiste… c est des trajets si intéressant…

  7. picard

    @ Jean-Marc

    Vous oubliez un trajet que font les automobilistes : pour aller dans une salle de sport pour faire du vélo d’appartement parce qu’ils ont trop grossi depuis qu’ils ont acheté une voiture (c’est une histoire qui est vraiment arrivée à mon ancienne chef)!

  8. Jean-Marc

    Ton ancienne chef aime les USA ?

    http://www.manaszk.it.pl/zarty/usa-only.jpg

     

    Oui, c est une donnée à prendre en compte, dans l usage urbain du vélo : en dehors de ses déplacements, petit bonus, cela fait économiser du temps et de l argent en activité sportive nécessaire, pour destresser/pour entretenir sa forme/pour besoin physiologique.

  9. Zeed

    J’ai bien aimé la poésie sur le téléphone. Je sais pas pour vous, mais moi je regrette parfois l’époque où le portable n’existait pas ! ( avant 1997 si mes souvenirs sont bons ) . NON ! Au lieu de ça, aujourd’hui, où qu’on aille, il faut que quelqu’un nous casse les couilles et qu’on soit joignable à tout moment ! Grrrrrrrr qui a un broyeur ?

  10. Jean-Marc

    Tu parles des années 2000 à 2003 ?

    Les seules années de ma vie où j avais un tél portable ET une voiture.

    après, en 2003, j ai arrêté le tél, après en avoir vu les abus (merci à ma soeur et à ses 5 appels en 15 minutes pour rien, quasi tous passés (pour elle) depuis sa voiture, roulant, pour avoir fortement accéléré ma prise de conscience), alors que « tlm » continuait à en être de plus en plus équipé.

    et, qq années après, j ai arrêté la voiture, alors que « tlm » continue à en être équipé

    j ai aussi arrêté les zones commerciales – hyper/super et chaines inter/nationales +/- dans la même période, alors que « tlm » continue de s ‘y rendre (seules exceptions : les chaines de bricolage-quincaillerie : il n existe plus d’indépendants chez moi… mais l alim., les vétements, les chaussures, les libraires, SI, encore qq uns, pour l instant…).

     

    Chacun choisit ses chaines, ses maitres. Si tu considères que ton tél est une prison, alors,tu as peut-être un grand pas en avant à faire, au risque de passer pour un original auprès de ton entourage, et de te libérer d’un poids.

    (en fait, ce n est pas tant sur mon absence de tel, ni de voiture que je passe le plus pour un original; mais plus sur ce que je mange, et sur mon OS (linux) et les LL utilisant des formats ouverts, qu’en général mes amis et connaissances me font des remarques… mais surtout -en priorité-  sur ce que je dis, fait, pense, vis, …  n ayant en général pas de lien direct avec les points évoqués plus haut

    P.s. le plus étrange, pour certains d entre eux, c est que j ai encore une TV…

    (ou, dernièrement une collège (bien intentionnée), s’étonnait que je ne sois pas devenu sylviculteur ou maraicher bio… ce que je pourrai devenir… mais à la retraite… car avant, ce serait faire un pas de géant, et sans filet… En gardant mon travail et mon salaire, je comprend bien les réticences de certains automobiles à faire le grand pas : la difficulté semble importante, insurmontable avant le grand changement. Se passer du travail salarial, avec garantie de revenu chaque mois (après s être battu pour obtenir une telle place..), je ne sais pas; mais pour le tél ou la voiture, en fait, c’est vraiment très facile, après, de vivre sans)

    Mais, niveau TV, je n oublie pas que c est un meuble, et qu’il y a un bouton off + une télécommande (pour couper le son pendant les pubs, zapper ou éteindre) :

    Je regarde bien moins certaines chaines commerciales dessus, et bcp plus d autres chaines, en choisissant les émissions [zapnet, docteur CAC, le dessous des cartes, studio 4.0, personne ne bouge et d autres… (global-mag quand cela existait :()] plus intéressantes et/ou amusantes que de la télé-réalité,

    Emissions, qu’éventuellement j enregistre pour visionnage-effacement, ou que je vois sur le replay

  11. Zeed

    @jean-marc:  » Chacun choisit ses chaines, ses maitres. Si tu considères que ton tél est une prison, alors,tu as peut-être un grand pas en avant à faire, au risque de passer pour un original auprès de ton entourage, et de te libérer d’un poids.  »

    Perso,je me passe de mon portable quand je veux, il m’arrive souvent de sortir sans, au risque de me faire jeter par mon entourage mais je m’en fous . Quant à la télé, y aura-t-il un jour des émissions pour manger mieux?  Parce que qu’est ce qu’on bouffe comme programmes de merde !

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