Les travaux pharaoniques du Grand Dédé Toutankamion

Le récit qui suit est une fiction parfois inspirée de faits réels. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé n’est pas toujours qu’une coïncidence fortuite.

Il était une fois un petit bout de caillou au milieu de l’océan Indien. Ce petit bout de terre émergée nommé île de La Réunion était décrit par ses premiers découvreurs comme un paradis sur terre. Les paysages sculptés par la montagne qui crache le feu et érodés par les pluies torrentielles y étaient d’une beauté époustouflante. Il y avait profusion de tortues en mer comme sur terre.

Les poissons pullulaient sur les récifs coralliens. Les forêts regorgeaient de bois de qualité et d’oiseaux flamboyants. La terre volcanique fertile et la diversité des climats y étaient idéales pour les cultures et l’élevage.

L’eau potable y coulait en quantité. Ni bêtes dangereuses ni moustiques n’étaient à déclarer. Que pouvaient-ils demander de plus? C’était presque l’Eden! Malheureusement, la vie sur cette île éloignée de tout n’a pas toujours été facile. Il fallu s’organiser pour survivre. Cette nature exceptionnelle a fourni aux hommes de quoi s’habiller, se soigner, se nourrir et s’abriter.

Des esclaves et des travailleurs ont été importés d’Afrique, d’Inde, de Chine et de Madagascar pour travailler cette terre vierge. Au fur et à mesure que la population augmentait, les forêts ont régressé, les terres se sont érodées, la quantité de poisson pêché s’est amaigrie.

La ressource en eau s’est amenuisée et sa qualité s’est dégradée. Nombre d’espèces végétales et animales réputées succulentes ont disparues à tout jamais.

Vous me direz quel gâchis, tout est foutu, il n’y a plus rien à faire! Certes ce qui est perdu l’est à jamais. Mais l’île de La Réunion est à ce jour encore considérée par les experts mondiaux comme un point chaud de biodiversité sur notre planète.

Sa nature y est encore riche et abrite une majorité d’espèces n’existant qu’ici et nulle part ailleurs.

L’autre richesse de cette île de l’océan Indien est le métissage de sa population qui a certes souffert du passé colonial et de l’esclavage mais qui a su se serrer les coudes pour vivre en harmonie dans un melting-pot de traditions africaines, indiennes, européennes et asiatiques.

Conscient du caractère unique de cette nature et de cette société multiculturelle arc en ciel, des réunionnais avant-gardistes et amoureux de leur terre natale se sont battus et ont réussi à faire inscrire le cœur de l’Ile montagneux et une part de la culture réunionnaise au patrimoine mondiale de l’humanité à l’Unesco.

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Mais cette reconnaissance ne protège malheureusement pas les côtes paradisiaques d’un nouveau fléau. En effet, les monstres que sont tractopelles et bulldozers, accompagnés de leurs amis béton et goudron grignotent et engloutissent inexorablement, le moindre mètre carré de terre sous une chape imperméable, brulante et nauséabonde.

Il n’y a pas très longtemps sur ce bout de terre verdoyant et entouré par le bleu de l’océan, un petit homme est né. Ce petit homme, nommé Dédé Toutankamion a toujours eu un égo surdimensionné qui l’a poussé à mener un combat politique acharné pour enfin devenir un jour le chef des réunionnais.

Durant ce dur chemin jusqu’au pouvoir, il a oublié les liens ancestraux qui le raccrochaient à la nature, jusqu’à ne plus voir le caractère unique de l’environnement qui l’entourait.

Dédé aimait beaucoup la vie citadine et les grosses cylindrées vrombissantes un peu bling bling. Il n’était d’ailleurs pas le seul, certains de ses très bons amis concessionnaires et revendeurs de pièces lui ont fait savoir que l’automobile était un marché très lucratif et qu’il était important de ne pas tuer cette poule aux œufs d’or.

La Réunion est une petite île d’à peine 50 km sur 70 qui est devenue en peu de temps le royaume de l’automobile. Alors que 40% de la population vit sous le seuil de pauvreté, les transports en commun sont paradoxalement très peu développés.

L’automobile au fur des ans est devenue le signe extérieur de richesse par excellence et on compte un véhicule pour deux habitants.

C’est ainsi que, seuls dans leur automobile, beaucoup de gens ont pris l’habitude d’aller travailler à la capitale, St Denis. Ils empruntent chaque jour « la route du littoral. » C’est un axe incontournable à quatre voies passant au pied d’une falaise en bord de mer, à l’endroit même où auparavant passait l’ancienne ligne de chemin de fer aujourd’hui démantelée.

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4 commentaires sur “Les travaux pharaoniques du Grand Dédé Toutankamion

  1. abil59

    Emouvant comme histoire. C’est dans quel livre l’histoire entière haha? Le gros problème des anciens dénommés DOM-TOM c’est l’absence de transports en commun viables et le pullulement de l’automobile.

  2. Françoise

    Une fois de plus : une ligne de chemin de fer a été démantelée… Quelle absurdité ! Alors que c’est justement ça qu’il faudrait pour résoudre le problème actuel de circulation dans cette île…

  3. naturenville

    Et dire qu’il y a peu existait un projet ambitieux de tram train qui reprenait cet itinéraire circulaire…

    Le transport dans l’île sera privatisé, pour le plus grand profit du système automobile, et le Réunionnais paiera au prix fort son culte de l’automobile – qu’il a bien le droit de pratiquer, après tout… -, malgré une proportion record de pauvres dans la population : là se trouve une violence symbolique extrême.

    Quelle contre politique locale produire pour redresser la situation?

    : anthropologues, sociologues, psychosociologues, historiens, spécialistes des sciences politiques, érudits locaux sortez de vos cabinets obscurs si vous êtes des femmes et des hommes de chair et de sens pour fabriquer une autre route à cette société!

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