La dictature du parking

Un article du journal Libération explique pourquoi les logements neufs sont petits et mal fichus. Les pièces sont de plus en plus petites et leur distribution de plus en plus contrainte. En dix ans, la surface moyenne des logements a diminué et la qualité de ce qu’ont proposé les promoteurs a été assez inégale. Cette évolution tient à des facteurs surprenants, parmi lesquels la « nécessité » de garer les voitures dans les parkings souterrains des immeubles en ville…

Qu’est-ce qu’un appartement idéal ? Un espace traversant, avec des fenêtres à chaque bout. Pour cela, il faut que l’immeuble ne soit pas trop large. Pas trop «épais» disent les architectes. Or, «ces dernières années, les bâtiments se sont épaissis», note Alexandre Neagu, architecte et enseignant à l’Ensa de Montpellier et à Paris-Nanterre. De 12 ou 14 mètres, largeur optimale, ils sont passés à 16 mètres. Pourquoi? «Parce que c’est la largeur du parking.» Une bande de voitures garées en épi + une bande de circulation centrale + une seconde bande de voitures garées en épi = 16 mètres de large.

Pour qu’un appartement soit traversant dans un immeuble de 16 mètres de large, il faut qu’il mesure au moins 80 mètres carrés. Pas le produit le plus facile à vendre. Donc, dans les étages, on suit le modèle du sous-sol: un couloir central et des appartements en bande de chaque côté, «mono-orientés, et parfois plein nord», résume le chercheur.

«Le parking est généralement le poste de dépenses le plus important, confirme Jean-Raphaël Nicolini, promoteur immobilier. C’est idiot mais on conçoit le dessus à partir de ce qui se passe en dessous. Aucun promoteur n’est satisfait d’utiliser de l’argent pour couler du béton en sous-sol». Mais nombre de Plans locaux d’urbanisme (PLU), «absurdes», obligent encore à le faire…

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Rien qu’à Paris, nous avions pu montrer en 2016 que l’arrogance du stationnement automobile fait que la surface totale consacrée au stationnement atteint plus de 8 km², soit l’équivalent de la quasi-totalité du centre de Paris…

Enfin, il faut rappeler que le stationnement automobile privé constitue un produit coûteux et non rentable. C’est notamment le cas des dispositifs de stationnement enterrés, dont le coût peut représenter de 10 à 15% du coût de construction d’un bâtiment, selon le bureau d’études ARCH’URBA. Automobiliste ou non, quand vous achetez ou louez un appartement en ville, il y a donc de fortes de chances que vous payiez de manière directe ou indirecte le prix du stationnement automobile dans le sous-sol de votre immeuble….

Lire l’article complet sur le site du journal Libération

7 commentaires sur “La dictature du parking

  1. Alexandre

    Juste un petit élément : les PLU qui « obligent » à créer des stationnements privés ne sont « absurdes ». Par contre, ce qui est absurde c’est, dans le même temps, de continuer à autoriser les automobilistes à stationner leurs véhicules dans l’espace public. A Tokyo, et d’autres villes japonaises, lors de l’immatriculation d’un véhicule, il faut apporter la preuve à la préfecture que l’on dispose de suffisamment de places de stationnement privées (personnelles ou louées dans un parking en ouvrage) pour stationner l’ensemble des véhicules appartenant au ménage. Du coup, aucun stationnement n’est toléré en voirie. Et là, pour le coup, ça libère un sacré paquet d’espace sur la voirie. Par contre, effectivement, quand on créé pléthore de stationnement privé, mais que dans le même temps, tout le monde peut se garer gratuitement ou presque sur la voirie, quel intérêt pour un particulier d’acheter à prix d’or un stationnement souterrain alors qu’il pourra laisser sa voiture dans le rue quitte à prendre un abonnement riverain qui lui coûtera pas plus de 50 ou 60 € par an.

  2. vince

    Il faudrait construire des immeubles pas bien et avec des logements non-traversants pour ceux qui veulent absolument des parkings et des immeubles biens conçus pour ceux qui sont d’accord pour s’en passer.

  3. Emmanuel

    Habitant la campagne je connais plus la construction de maisons individuelles que des appartements, mais de nombreux PLU prévoient que la moindre maison doit posséder 1 voir 2 garages intégrés au bâti.
    et on se retrouve avec des maisons de 100 m2 pour les humains, et 45 m2 pour deux voitures, parce que 3 chambres + 1 chambre/salle de jeux pour les enfants = obligation de 2 garages intégrés au bâti !
    Même s’il y a 500 ou 600 m2 de terrain autour et que les véhicules peuvent dormir en extérieur et n’ont pas besoin de chambres plus grandes que celles des habitants 🙁

    Par contre l’idée de construction neuve en ville = interdiction de véhicules dans la rue, je suis d’accord, mais que faisons nous des habitations construites à une époque ou le véhicule motorisé était un luxe interdit aux habitants de ces maisons / appartements. J’ai longtemps vécu à Lille et aux alentours, je n’ai jamais eu que des maisons sans stationnements intégrés. en même temps, qui en 1930 aurait pu avoir l’idée d’une population ouvrière propriétaire d’un véhicule motorisé à 4 roues !

     

  4. jol25

    En général, un appartement comprend au mieux une place de parking ou un garage. Le garage, s’il est non partagé, est souvent utilisé pour autre chose (stockage…) Moralité, vécu :

    – « Mais quelle bande de ** ils m’ont pris ma place de parking ! On peut jamais se garer ici !  Et je paie le parking dans mes charges !

    – Pourquoi ? Vous avez combien de voitures ?

    – Trois, pourquoi ? »

    Ben voilà…

  5. pedibus

    in Bouteille Arnaud, « Des coûts de construction très différents selon le type d’immeuble », site « politiquedulogement point com », 2019, https://politiquedulogement.com/2019/12/des-couts-de-construction-tres-differents-selon-le-type-dimmeuble

    La présence de parkings « sous les immeubles » renchérit fortement le prix final du logement ; les promoteurs trouvent un compromis avec une solution « semi-enterrée ». Cependant dans ce cas, comme pour celui d’un emplacement en rez-de-chaussée, c’est une catastrophe architecturale, avec la pénible impression pour le passant d’évoluer dans une « rue-tuyau », où aucune porte (sauf l’hideuse ouverture dudit parking…), aucune fenêtre et… aucune vitrine ne vient égayer l’espace viaire.

    Exemple ici à Mérignac, à l’ouest de Bordeaux, près de la station de tram F. Mitterrand, avec un parking de rez-de chaussée d’un imeuble de moins de cinq ans :

    https://www.google.com/maps/@44.8267711,-0.615197,3a,75y,21.25h,83.32t/data=!3m6!1e1!3m4!1sjQar_1jdi99tCUjTzH7nHw!2e0!7i16384!8i8192

    Et comme nous parlions il n’y a pas longtemps de Levallois-Perret, voici un parfait exemple de rue-tuyau, avec de chaque côté les immeubles perchés sur leur parking de rez-de-chaussée… :

    https://www.google.com/maps/@48.8987198,2.2846762,3a,75y,142.11h,86.31t/data=!3m6!1e1!3m4!1sZw4adUYb9yxs1ZWGrMss2w!2e0!7i16384!8i8192

     

    Eh oui… ! occuper le rez-de-chaussée ou l’entresol pour y garer des véhicules c’est interdire l’installation de commerces, lesquels, avec les ouvertures sur la rue permettant l’échange entre le résident et le promeneur (Jane Jacobs*, 1961), sont les meilleurs ingrédients pour assurer un minimun d’urbanité…

    Donc, quelle que soit la solution, garer des automobiles a un coût très élevé : promoteur, acheteur de logement, automobiliste-résident et bien sûr la totalité de la population d’une ville payent un sacré tribut en termes monétaires ou de désagréments. Et bien sûr ne parlons pas du stationnement de surface dans l’espace public…

    Dernier détail : certaines résidences pensent avoir résolu la question en offrant du stationnement en coeur d’îlot. Là encore mauvaise pioche, dans la mesure où c’est de l’espace privé… dont on se prive pour un autre usage, espace très rare dans le noyau des grandes agglomérations : espace vert et de détente, piscine, espace de rencontres entre résidents…

    Exemple ici à Bordeaux, cours de l’Yser, avec 80% d’un coeur d’îlot dédié au stationnement et à sa voie d’accés… :

    https://www.google.fr/maps/place/Bordeaux/@44.8247948,-0.5696443,62m/data=!3m1!1e3!4m5!3m4!1s0xd5527e8f751ca81:0x796386037b397a89!8m2!3d44.837789!4d-0.57918

    Voie d’accès au parking de coeur d’îlot de l’immeuble R8 :

    https://www.google.fr/maps/@44.824838,-0.5700497,3a,75y,95.23h,88.3t/data=!3m6!1e1!3m4!1sPRns5Qz2VWlgY-rLfa2amA!2e0!7i16384!8i8192

     

     

    *The Death and Life of Great American Cities. New York: Random House.

     

  6. mat b

    Pour répondre à Alexandre, la location d’un parking est toujours avantageuse. Je l’ai déjà fait (pour l’ensemble des bonnes raisons) dans une période un peu juste en rentrée d’argent (hasard) et je considère toujours, avec le recul, ce choix comme économique. Une voiture bien garée est une voiture qui n’a pas besoin de bouger, donc qu’on a pas besoin d’utiliser systématiquement. Elle est aussi à l’abri des coups, amendes etc… et cela devient une tannée de l’utiliser pour faire que quelques kilomètres et ainsi, l’exposer à tout ce dont elle est protégée.

    J’ai d’ailleurs loué mon logement a un ami en lui prodiguant le conseil. Il venait d’avoir une voiture assez propre et en quelques années, sa voiture avait complètement décoté cosmétiquement alors que ma Twingo commence à peine à accuser le temps au bout de 11 ans et encore moins de 100 000 km

  7. Lydie

    L’analyse faite par PEDIBUS est de très bonne facture. Les images sont très démonstratives et très parlante sur l’absurdité de créer des garages au niveau de la rue. Toutes les développements faits au niveau de l’article de LIBERATION et dans les différents commentaires démontrent la nécessité de proposer des solutions plus en phase avec les attentes des habitants sur les déplacements, la mobilité, le partage des espaces. Tant que l’hégémonie de la seule automobile ne sera pas réellement remise en cause nous irons de plus en plus vers des espaces invivables aussi bien en terme de logements que des espaces publics.  Dans le même ordre d’idée qui n’a pas assisté à la destruction d’espace public au profit de l’unique stationnement de l’automobile. La solution passe principalement par une modification de nos comportements individuels. Ceux-ci doivent être accompagnés par une volonté collective en donnant une plus grandes places aux transports collectifs, aux déplacements doux et un urbanisme à échelle humaine. Ce changement de paradigme nécessite aussi une complexification dans le recours à l’automobile pour les déplacements avec le courage d’assumer ces décisions, mais aussi offrir de réel bonus à ceux qui adoptent les bonnes attitudes.

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