2 euros le litre de carburant, ce n’est qu’une étape

Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le prix du carburant n’arrête pas d’augmenter, pour atteindre et désormais dépasser les 2 euros/litre, que ce soit pour l’essence ou le diesel. Quoi qu’en disent les médias, ce n’est pas qu’une mauvaise nouvelle. Cet événement doit être l’occasion de repenser la société fondée sur le tout bagnole, de relocaliser l’économie, de privilégier les transports en commun et le vélo…

Il est de bon ton de s’alarmer. Certaines personnes vont en effet souffrir dans un premier temps de la hausse du carburant et du chauffage. On peut supposer malgré tout qu’elles souffriront légèrement moins que les civils ukrainiens bombardés par l’armée russe…

Par ailleurs, cette augmentation est tout sauf une surprise. La société n’a simplement pas daigné anticiper cette hausse et ses conséquences économiques et sociales. Malgré la diminution continue des réserves de pétrole et leur concentration dans quelques pays autocratiques, dictatoriaux et corrompus, nous nous obstinons à maintenir et développer un système automobile largement dépendant des énergies fossiles et à la merci des crises géopolitiques mondiales.

On sait que les automobilistes aiment les dictateurs, car le pétrole consommé dans les pays occidentaux vient pour sa plus grande part de sympathiques pays comme l’Arabie saoudite, la Russie, le Nigéria, le Kazakhstan, les Emirats Arabes Unis, l’Azerbaïdjan, le Qatar, l’Angola, l’Iran, etc.

Et moins il y aura de pétrole, plus les crises seront nombreuses et plus notre dépendance à l’égard de ces pays sera grande. Comment peut-on prétendre être des « démocraties » si on fait reposer la survie de nos systèmes dits démocratiques sur la fourniture d’énergie provenant de ces pays?

Aux dernières nouvelles, notre dealer en chef Jean Castex a annoncé la semaine dernière une « remise à la pompe de 15 centimes par litre » qui s’appliquera à partir du 1er avril et pendant 4 mois pour tous les Français, afin de faire face à l’envolée des prix du carburant. Pas sûr que cela nous aide collectivement à sortir de notre dépendance au pétrole en général et au pétrole russe en particulier.

Lire aussi :  La pétro-masculinité

Cette subvention sur l’essence va nous coûter 2 milliards d’euros pour seulement 4 mois. Rappelons que le plan vélo, c’est 50 millions d’euros par an, soit 40 fois moins… Et pourtant, le vélo est peut-être bien l’arme secrète pour vaincre Poutine.

Personne n’est dupe, à moins d’un mois des élections présidentielles, le carburant à 2 euros le litre, c’est tout simplement explosif, alors que cela devrait être le moment idéal d’une prise de conscience collective.

En 2011, nous avions publié un article prémonitoire intitulé « Vivement le litre d’essence à 2 euros ! » qui proposait d’organiser une « grande fête » quand l’essence serait à 2 euros/litre.

Aujourd’hui, l’heure n’est pas vraiment à la fête, mais le passage à 2 euros/litre ne doit pas simplement être considéré comme une mauvaise nouvelle. Cet événement doit au contraire servir de déclencheur. C’est l’occasion de repenser la société fondée sur le tout automobile, relocaliser l’économie, privilégier les transports en commun, la marche et le vélo et chercher enfin à réduire la pollution dont nous souffrons tous.

Profitons de cet avertissement qui nous est donné. 2 euros le litre, ce n’est qu’une étape. N’attendons pas que la situation s’aggrave au point de devenir ingérable. Commençons dès maintenant à nous adapter et changeons nos comportements pour aller vers une société libérée du pétrole. Apprenons à nous désintoxiquer de ce carburant que nous consommons comme une drogue.

Un litre de pétrole économisé, c’est un peu de liberté gagnée.

Photo: Vélotaf Metz

3 commentaires sur “2 euros le litre de carburant, ce n’est qu’une étape

  1. mat b

    Je m’attendais à cet effet perroquet #parroteffect en écho à twitter où tous les cyclos se plaignent de cette manne qu’un bagnolard relativisera aisément, sachant que le coût réel se retrouvera entre les deux discours.

    Mais carfree.fr va un peu plus loin que le twittos cyclo relayeur et c’est là que nos points de vue convergent.

    Tout d’abord, il ne faut pas s’étonner de cette offrande, un nombre important de gens votent afin d’obtenir de telles faveur et comme ils sont plus nombreux que nous autres, ils obtiennent mieux. De la même manière qu’ils obtiennent mieux les routes que nous les pistes cyclables, donc pas besoin de tergiverser.

    On peu aussi noter une tendance pompidolienne chez Jean Castex qui, à ce moment ou j’écris, célèbre, à quelques encablures de chez moi, non seulement une nouvelle bretelle d’autoroute mais aussi un nouvel hôpital. Un projet de construction, qui réponds à un besoin, certes, mais qui est principalement étudié par le biais de l’accessibilité, d’où la coincidence avec ce projet de bretelle qui devrait (attention secret) passer à proximité.

    A première vue, on est bien obligé de rendre compte de la cohérence du personnage mais  en regardant un peu plus loin, force est de constater que lui, comme n’importe quel chef de gouvernement, cherche une branche à laquelle se raccrocher  face à cet effondrement de l’utilisation automobile qui devient de plus en plus évident.

    Le covid, la guerre en Ukraine, le prochain décès d’Elizabeth II, le vainqueur de la prochaine coupe du monde  ou quoi que vous vouliez, chaque évènement marquera une étape dans ce déclin.

    Moi, avec les deux milliards, ni piste cyclable ni autoroute, je disséminerai un peu partout des statues de notre nouveau prophète, j’ai nommé Georges Miller

    VROOOOOM VROOOOOOOOOM

     

  2. Lydie

    Que de pognon gaspillé et de temps perdus. Quel manque de clairvoyance de la part de nos dirigeants quelle inconséquence de nous tous avec des français qui pérorent sans agissement constructif. Qui a pris la décision de réduire la température de son chauffage, de changer la manière de se déplacer, de consommer différemment, de réduire sa vitesse à 110 km/h au lieu de 130 sur autoroute ce qui permet d’économiser jusqu’à 25% de carburant par exemple etc… Nous préférons avoir du sang sur les mains et continuer notre vie dans la plus grande lâcheté qui nous caractérise si bien. L’histoire se rappelle tragiquement à nous et nous espérions ne pas devoir revivre ou faire revivre ces  tristes moments. Le vélo trouvera t’il enfin sa juste place et deviendra t’il l’accessoire indispensable dans nos déplacements pour le plus grand plaisir de tous. Vu les kilométrages parcourus sur différents supports rien ne m’a permis à ce jour de voir des améliorations sensibles dans le comportement des conducteurs ou les usages. Le chemin à parcourir est immense. Pourtant vivre la sobriété serait tellement plus heureux que de subir les contraintes et les restrictions. L’individu préfère sans doute être flagellé.

  3. pedibus

    les chercheurs de sens comme ceux d’un métal rare peuvent facilement s’éblouir, une paillette médiatique et un chiffre symbolique peuvent suffire à faire croire que le Graal n’est plus très loin…

    las! la numérologie est sans doute, parmi les sciences occultes, celle qui revient à toutes les époques, l’actuelle n’ayant rien de tellement reluisant, la « science économique » ayant remplacé la métaphysique par exemple comme branche fondamentale de notre mode de pensée, sans pour autant que l’ajout de belles équations économétriques à la première doive non plus cacher longtemps la supercherie quant à la magie sous-jacente…

    et sans doute la menace de procès en sorcellerie  pourrait dissuader quiconque s’aviserait d’aligner une série de chiffres, les fameuses statistiques à qui « on fait dire ce que l’on veut », non content de contempler la rondeur du nombre deux ou de se satisfaire d’une pirouette lacanienne digne de la Pythie qui vient en mangeant… :

    Savez-vous évaluer la puissance d’un coton-tige… ?

    Deux ouates… !

     

    on n’abandonnera pas pour autant face à l’épuisante nécessité de corriger les idées reçues, de remettre les compteurs à zéro pour démolir cette croyance de « hausses de prix du carburant automobile qui grignotent le pouvoir d’achat des Français [automobilistes] »…

    l’économiste Jean-Marie Beauvais, du Conseil économique social et environnemental, s’y est essayé avec brio en 2019 :

    https://www.cairn.info/revue-transports-urbains-2019-2-page-29.htm

    et l’affichage des chiffres à la pompe aujourd’hui est très loin de faire franchir cette fameuse ligne de pouvoir d’achat depuis 1970, en termes de minutes de labeur smicard, pour le droit de continuer à bousiller le climat de la planète avec l’usage de son véhicule individuel thermique… :

    https://www.hebergeur-image.com/upload/86.234.217.158-622fd50bec37c.PNG

    source : https://france-inflation.com/graph_oil.php

    toujours en-deçà donc, à ce jour, du pic de 2008 et sans tenir compte des gains de productivité du travail transformés en partie en gains de pouvoir d’achat depuis cette date…

    https://www.hebergeur-image.com/upload/86.234.217.158-622fd61c144be.PNG

    source : https://fr.statista.com/statistiques/564926/prix-annuel-du-petrole-de-l-opep-1960/

    sur plus de soixante ans le niveau de prix annuel moyen du brut OPEP a évolué dans tous les sens, avec des amplitudes abyssales à certaines époques, sans remettre en cause le sacrosaint (!) droit de conduire une bagnole en France, en tout cas « sans se ruiner », ce qu’on ne pourrait pas dire cependant au sujet de l’état du géosphère sur la période…

     

     

Les commentaires sont clos.