« Le changement, c’est maintenant » : de tels slogans ne cessent de se répéter, d’élections politiques en campagnes publicitaires. Partout, candidats et marchandises se font porte-drapeaux d’un Progrès divinisé. Le changement est devenu « la loi pratique et morale d’une histoire qui n’est plus que torrent déchaîné ».
Bernard Charbonneau, dans ce livre inédit achevé en 1990, ose interroger cette grande mue permanente. Qu’y a-t-il derrière cette évolution présentée comme immuable, derrière ces appels à la mobilisation générale ? Une soumission totale de l’homme et de la nature au développement économique et technique.
Pris dans un tourbillon sur lequel il n’a pas prise, chaque maillon flexible de la société industrielle doit suivre le rythme de la croissance : déménager, se recycler, être mobile, ne jamais s’enraciner, suivre les modes.
« On ne va pas contre le cours du progrès », quitte à transformer les paysages en tables rases. Dans cette course sans fin, le seul véritable changement consiste à le mettre en cause.
« Pour bâtir, le changement commence par démolir. À peine a-t-on dressé des murs ou planté des arbres qu’il faut les abattre : aujourd’hui on démolit les Sarcelles des “Trente Glorieuses”. Le chantier n’est plus un stade provisoire, mais le milieu permanent où l’homme est condamné à vivre. »
« Vue de haut la société actuelle – au moins celle du Marché – n’est qu’un Maelström : ce tourbillon vertigineux qui fait du surplace, ce n’est plus un état social, ni même une course de fond, mais un sprint furieux où chacun sur la même piste circulaire s’efforce de dépasser à tout prix ses concurrents. »
Précurseur de l’écologie politique, Bernard Charbonneau (1910-1996) a toute sa vie alerté sur les dangers du développement industriel. Le Changement, ouvrage jusqu’alors non publié, dénonce les ravages de la croissance sans fin et de l’idéologie progressiste qui la sous-tend, pour appeler à sauvegarder la terre et la liberté de l’homme.
« Dans bien des cas (notamment celui des transports) même la croissance zéro est insuffisante, il faut envisager une diminution. Si cela vous effraye, dites-vous que les courbes ascendantes de production d’autos seront remplacées par celle d’eau et d’air purs… »
Bernard Charbonneau, 1990, Le Changement, aux éditions le pas de côté, octobre 2013.
Oui ce livre vient d’être édité en 2013, et était donc inédit Bernard Charbonneau est décédé en 1996, mais n’avez-vous pas reçu cette analyse de Simon Charbonneau? son fils. Je suis en train de lire cet ouvrage qui décrit très bien d’une façon prémonitoire les travers de notre société et des politiques aux déclarations « creuses » au nom du changement! » De droite ou de gauche? S’il y eut un temps où ce débat a eu un sens, tel n’est plus le cas. » C’est un livre qui apprend à réfléchir et très revigorant!