Proposition de cité utopique

Imaginer l’inimaginable : rues et routes sans l’automobile. On ne peut pas dire qu’elle fasse partie du paysage tellement elle détonne, dans tous les sens du terme : gênante, inadaptée et rendant inapte à vivre dans un territoire où on devrait faire corps facilement, naturellement. Alors l’esprit s’élève, va se réfugier sur les toits de la ville, qu’il transforme en terrasses jardins, en prétendant que les habitants, les passants ou les touristes devraient de nouveau y faire société. Ce sont les rues jardinées suspendues, imaginées au-dessus de la rue traditionnelle, laquelle cesserait d’être le tuyau réceptacle du flux de ce qu’on s’évertuera à remplacer. Faudra-t-il en passer par certaines violences pour en arriver là ? Plutôt alors en empruntant celle qui est la plus symbolique, suivant l’expression « se faire violence », en s’obligeant à oser l’impensable, le dérangeant et à camper dans l’inconfort de la remise en cause permanente, à travers la dispute citoyenne.

Pas un jour où il ne ruminait sa haine contre les obstacles qu’il trouvait invariablement sur son chemin. À l’aller ou au retour de la gare. Même chose pour la supérette. Ou encore la bibliothèque. A chaque fois il s’agissait de descendre un nombre incalculable de fois du trottoir et d’y remonter. Soit avec une valise à roulette, soit à faire suivre le caddie à provisions, plein de victuailles ou d’ouvrages plus ou moins digestes : toujours les mêmes carrosseries artistiquement grimpées sur la banquette dédiée naturellement au piéton, depuis que le Grand Siècle imagina ce dispositif pour le Pont Neuf parisien. Deux roues sur la chaussée, les deux autres parfois au ras de l’immeuble qui borde la rue. Ah ça donnait belle image de baroudeur à l’automobiliste je-m’en-foutiste qui carrait-là ce qui restait des heures et des heures sans vrombir… ! Mais ça sciait bras et jambes du piéton, qui rêvait alors du dispositif libérateur, genre couteau suisse, caché sous le bout de la chaussure, qu’il pourrait déclencher électroniquement pour picoter le flanc mou des pneumatiques accessibles !… l’impuissance quoi !… puisque bien incapable de maîtriser son aversion pour l’électronique, voire le moindre geste de bricolage pour mener à bien sa vengeance… Et puis la bonne éducation, respecter le bien d’autrui… Les éventuels emmerdes aussi…

Au cours d’une de ces sorties contrariantes, en revenant d’emprunter des livres, las d’avoir fait son slalom habituel, il décida de faire halte dans le square ombragé sur l’itinéraire du retour. La curiosité le démangeait de parcourir plus attentivement le traité d’urbanisme qu’il avait emprunté. Il calla son échine moite sur le dossier d’un banc public, décapsula une cannette de boisson fermentée et entreprit un parcours sur place, donc à vitesse nulle, sûr alors de ne pas ajouter à la chaleur de la journée d’été celle du métabolisme d’un corps en mobilité autonome…

« L’univers social n’est sans doute pas régi par le modèle cosmologique standard. L’urbanisme en particulier, qui agence nos abris et nos motifs de déplacement le long des couloirs des agglomérations humaines qu’on nomme rues, n’a cessé d’osciller au gré des époques ou des autoritarismes locaux depuis plus de cinq millénaires : tissu urbain diffus à grandes avenues monumentalisées ou lacis de ruelles dans un espace confiné, tels des galaxies qui se disperseraient ou se rassembleraient selon les constantes , les valeurs et les lois du moment, ou simplement suivant la nécessité de se protéger… La démesure d’Ur puis plus tard celle de Babylone, avant la modestie de la cité hellénique, mais avant l’expansion hellénistique et romaine puis la plongée dans le concentré urbain des castrums médiévaux, puis des corsets bastionnés de la ville de l’époque classique – boulet métallique de canon et poudre du même nom obligent -, laquelle s’est finalement débridée dans une géométrie panoptique d’avenues rayonnantes, annonçant la pulvérisation de l’espace urbain à la vitesse du carrosse, puis de celle du chemin de fer et de l’automobile, par les filaments ferroviaires et autoroutiers… »

Remparts.

Ruelles.

Avenues.

Boulet de canon.

Vacarme des roues de carrosse après celles des chars antiques.

Ronron lointain d’innombrables moteurs automobiles…

Lenteur… douceur… Calme champêtre.

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Il fut décidé que dorénavant l’espace primerait sur le temps et que tout aménagement en tiendrait compte. Déjà à l’époque, à la charnière des XXe et XXIe siècle, le sociologue Hartmut Rosa prônait la décélération. Curieuse période. C’est aussi celle où fut mise en évidence l’expansion accélérée de l’univers observable… Donc les valeurs ne furent plus celles frappées par le diktat simpliste d’E=mC2, ou des modèles suivants, plus complexes, comme celui du pavage spatial discret de la gravité quantique… Pas plus de V = d/t plus intuitif : observable dans ces reproductions faussement animées de la vie quotidienne, puisque disparues, où des véhicules autopropulsés dévoraient espace, temps d’utilisation et ressources diverses. Désormais on se recentra sur la valeur de dimension zéro, ponctuelle donc. On chérissait les distances faibles et le « là, maintenant ». Mais on ne troqua pas le confinement du carrosse ou de l’automobile, écrabouilleurs de piétons, pour la contemplation extatique du moment présent, de chaque citadin assis sur son pas de porte. Parce que les villes continuèrent de grouiller de passants et de cyclistes, avec des transports publics ferroviaires qui leur servaient d’ossature.

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Mais l’organisme de la cité n’avait plus les proportions monstrueuses de la Rome impériale ou, plus encore, de Tokyo et de Los Angeles de la période pétrolière. Et Céline n’aurait pu dire d’elles, comme de New York et de ses buildings au début du XXe siècle, qu’elles étaient « raides et pas baisantes du tout » : les immeubles comportaient quelques étages, mais juste ce qu’il fallait pour se payer une tranche de vie. On avait rajouté une dimension urbaine, humaine et pratique. Là il faut se débarrasser de la physique et des métaphores faciles qu’elle autorise. Le plein et le vide et hop on voit le plan de n’importe quelle cité antique ou des derniers siècles. Le remplissage par les immeubles et la béance de l’espace autour.

chamberyFiliforme avec la voirie, en peau de léopard avec les ilots de verdures au centre des blocs des cités les plus denses, ou un saupoudrage plus ou moins structuré de bâtiments dans les concentrations urbaines comme celles d’Amérique du nord. Une fois mise de côté l’échelle architecturale avec la hauteur, les façades et l’intégration des immeubles dans l’ensemble on penserait avoir fait le tour de la question. Mais ce serait oublier un pan entier de la géométrie urbaine avec le toit… en le laissant aux chats. Ici une explication s’impose. Il y eut bien ces expériences de potagers du ciel, en cultivant la toiture terrasse de quelques gratte-ciels américains, histoire de retrouver des racines si loin du sol… Dés lors la ville chercha dans le passé ce qui avait fait ses preuves à l’époque et pourrait satisfaire encore les habitants du temps présent. Alors la médina retint l’attention, ses toitures-terrasses en particulier. Mais la densité humaine y semblait bien forte, très au-delà des dizaines de milliers d’habitants au kilomètre carré. De même fut examinée la ville médiévale occidentale. Déjà très dense, compacte, avec tout à portée de quelques pas, mais terriblement minérale, surtout quand les périodes d’expansion démographique coïncidaient avec celles des guerres et obligeaient à ajouter des étages aux immeubles existants ou à construire dans les espaces restés vacants. Et puis il y avait les toits : de tuiles, d’ardoises ou de lauzes, tout juste fréquentables par les ramoneurs, les couvreurs et les guetteurs de tout poil… dont les matous. Donc fut décidé d’hybrider la médina avec la cité médiévale enkystée dans ses enceintes fortifiées successives. On conserva de la première la toiture terrasse et on ménagea assez d’espaces libres, même sous forme d’une modeste dent creuse par ci par là, pour corriger l’impression d’étouffement qu’on pourrait ressentir en marchant dans une ruelle. En plus du jardin, ou de la cour derrière l’immeuble, chaque ménage devait pouvoir jouir de son morceau de terrasse jardin au-dessus du dernier étage. Contrairement à l’architecture et l’organisation sociale urbaine française de l’époque haussmannienne, feuilleté qui perdait en prestige vers le haut et rangeait à la base l’élite, les immeubles du concept hybride historique ne comportait pas plus de trois étages, et chaque ménage en habitait une partie, toiture terrasse-jardin comprise. Le feuilleté devenait vertical…

Le sommet des immeubles constituait alors une vraie campagne. Juchée à tous les vents, au-dessus du canyon viaire, c’était un liseré végétal qui courrait jusqu’au premier carrefour, qu’une passerelle pouvait enjamber, comme ces pontets médiévaux, mais qui eux constituaient une véritable pièce supplémentaire suspendue au-dessus de la chaussée. Dès lors on ne réussit pas à réaliser la ville à la campagne, mais à ressusciter la campagne à chaque coin de rue, sans que s’en doute le passant d’en bas. Bien qu’une palme ou d’autre débordement végétal trahissent sa présence. Et puis certains jardinets suspendus étaient aménagés de telle sorte qu’un sentier ouvert au public courrait au milieu d’eux, parallèlement à la rue en contrebas, sans que le promeneur ait l’impression d’être en ville, leurré encore par la présence de petites basses cours…

comparaison
Le rez-de-chaussée était occupé par une myriade d’échoppes ou d’espaces ouverts sur la rue, c’est-à-dire regardant la rue : un tabou avait été créé, et pour la bonne cause, inspiré des écrits de l’Américaine Jane Jacobs, au début de la seconde moitié du XXe siècle, en interdisant tout mur aveugle à ce niveau, tolérant cependant grilles et rideaux protecteurs pour les commerces. C’était là le meilleur garant pour animer les rues et rassurer les passants. Et c’était le total opposé des dispositifs de l’époque pétrolière et automobile, où des locaux de stockage cachaient une pléthore de véhicules sous les immeubles. Marcher dans la rue, quand elle servait principalement au flux des véhicules, donnait l’impression pénible de progresser dans un tuyau, à l’intérieur d’un tube viaire à ciel ouvert…

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Cette réplique tardive des jardins suspendus de Babylone avait aussi l’avantage de créer une urbanité supplémentaire. Elle était la réplique de celle de l’espace public d’en bas : si fruits, légumes et petit animaux d’élevage appartenaient bien aux habitants du foyer du dessous, les escargots pouvaient être ramassés par tout le monde, à condition que la concentration des hérissons ne les raréfie pas trop. Et la prise des repas assez synchronisée y permettait une coprésence naturelle entre les riverains du ciel, qui se trouvait enrichie par les passages de flâneurs, de touristes ou de curieux, en assurant une coproduction d’urbanité…

Une bonne proportion des habitants pouvait se retrouver dans deux discours idéologique différents, deux partis qui structuraient le débat de la cité. Il y avait d’abord celui des néo pythagoriciens, bien illustré par exemple avec les amateurs de bicyclette à récupération d’énergie et à assistance de pédalage, plutôt technophiles, et néo scientistes. Tout était analysé chez eux à travers la complexité et la transdisciplinarité. L’objectif individuel se rapprochait de celui d’un humaniste de la Renaissance, en tâchant de mettre à profit un maximum de connaissances agrégées pour pénétrer un monde perçu comme une dualité physique et sociale. On aurait pu également les appeler néo physiocrates, puisqu’ils reconnaissaient comme richesse principale la simple surface sous leurs pieds. Potentiellement productive suivant un protocole qui devait toutefois ménager sa capacité future de profitabilité pour les sociétés qu’elle aurait à recevoir, elle était à la base de leur système de valeur. Si leur mode de pensée restait systémique il avait aussi ses exigences en termes de rétroaction compensatrice, mais davantage pour servir des buts conservateurs. Et c’était là l’un de ses principaux travers : conserver l’équilibre plutôt que de courir le risque de la rupture possiblement créatrice…

L’autre courant idéologique était celui des néo diogéniques, idolâtres de la simplicité. Parmi eux beaucoup préféraient le vélo basique, à peine modifié depuis le début du XXe siècle, époque qui a suivi celle de sa création, à leurs yeux la seconde révolution technique majeure après le triptyque de la roue, de l’urbanisation et de l’écriture à la fin du IVe millénaire avant J.-C… Ils avaient œuvré jadis pour faire disparaître le système automobile, en ne cessant d’en démontrer l’inefficience économique et la perversité sociale. Les plus activistes avaient même mené de véritables actions de guerre urbaine, en détruisant à l’explosif propulsé le train avant de tous les gros véhicules individuels qui roulaient dans les zones où ils sévissaient. Ils prenaient soin de ne pas mettre en danger la vie du conducteur mais le bastonnaient copieusement quand il sortait hagard de son épave fumante, avant de foutre le camp plus loin sur leur bicyclette. La répression à leur égard fut d’abord plutôt disproportionnée, avant qu’ils ne bénéficient progressivement d’une certaine mansuétude, qui n’était que le reflet de l’approbation silencieuse du corps social face au mépris des considérations socio environnementales de ces conducteurs, puis de l’ensemble des automobilistes. D’autres avaient payé de leur personne, particulièrement leur ligne, en réalisant des hauts faits non moins spectaculaires. Ils consistaient, de longues années durant, à s’approprier la technique japonaise du sumo pour immobiliser l’adversaire. Et pragmatiquement il s’agissait d’organiser une traversée de la rue en jaugeant instinctivement le plus finement possible le risque de collision avec l’automobile censée s’arrêter au dernier moment pour céder le passage au piéton kamikaze… Sûr de son coup le bipède de cent-cinquante à deux-cents kilos simulait la peur et sautait de toute sa masse sur l’aile du véhicule. Le métal froissé de la carrosserie ne manquait pas de déchirer le pneumatique alors que les mécanismes de suspension et de direction pouvaient être également bousillés…

C’était là quelques uns des fruits les plus riches de la démarche DIY(1), « faites par vous-mêmes », qu’ont pu recueillir les énergumènes qu’ont été les robins des villes et les associations écologistes. Le rapport anthropologique à l’automobile s’était inversé, la hiérarchie des modes de déplacement comme l’insécurité qu’ils induisaient : rouler en automobile était alors devenu une chose honteuse et risquée, avec les piétons et les cyclistes perçus comme une menace potentielle par les derniers automobilistes…

Au-delà de ces guérilleros cyclistes et piétons le poids des néo diogéniques dans l’organisation sociale et leur capacité manœuvrière avaient suffit à convaincre la société de se détourner de l’automobile et de miser davantage sur le qualitatif et la reconversion urbaine. Jusqu’au patronat qui privilégiait alors désormais les micro-initiatives entrepreneuriales, mais sans garantie qu’elles ne soient pas capturées plus tard par quelques structures capitalistes, toutefois à méso échelle et à portée locale… Ces adeptes de la simplicité cynique avaient toutefois à cœur de maîtriser un ensemble de savoirs pragmatiques et de techniques utiles pour manœuvrer leurs contemporains et les relations sociales qui les gouvernaient. Ainsi ils excellaient à mettre en œuvre les changements à partir des modifications des représentations qu’ils induisaient. Bons psychosociologues, graphistes créatifs et habiles rhéteurs ils bouleversaient habilement l’opinion en leur faveur. Et ce à toutes les échelles de la société, depuis la réunion fomentée chez l’un des habitants riverains pour obtenir un aménagement local jusqu’à un boycott réussi auprès de la population d’une grande région urbaine. Dans ce dernier cas ils étaient alors en capacité de nuire sérieusement à un secteur économique trop « entreprenant » à leurs yeux, au vu de considérations socio environnementales locales ou globales.

Ce dualisme philosophique laissait son empreinte dans la vie quotidienne, en particulier dans « l’espace public aérien ». Les technophiles tentaient d’approcher l’autosuffisance – économe en déplacements – en captant le maximum d’énergie sur la toiture terrasse, qu’elle soit solaire, éolienne ou bio massique. En complément de ce dispositif physique était aménagé un microsystème digne d’une exploitation conduite en polyculture élevage en modèle réduit. Pas un espace de la parcelle du toit qui ne contenait alors un instrument, un clapier, une cage ou une bande cultivée, de plantes fourragères, potagères, aromatiques, médicinales ou d’intérêt écologique très ciblé… Pendant ce temps les cyniques tâchaient de provoquer leurs voisins besogneux en cultivant paresse, moindre action et réflexion solitaire ou partagée : chaise longue, piscine gonflable remplie de la pluie de l’année précédente, four solaire pour mijoter autant de préparations que le permettait l’astre diurne… et longue vue pour mater le voisinage ou les astres nocturnes, entre deux préparatifs bien médités pour le prochain chamboulement sociétal, fut-il à l’échelle du voisinage…

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Ce travail de requalification urbaine avait apporté densité, urbanité dans les rues et diversité biologique et sociale, avec une participation démocratique sans cesse attisée par les initiatives individuelles. Les rues par exemple, suivant leur largeur d’origine – étroitesse médiévale ou largeur issue de la monumentalisation baroque ou encore, plus tardivement, du dispositif technique lié au système automobile –, bénéficièrent aussi progressivement d’une requalification. Les plus larges contribuèrent à renforcer les réseaux de tram et de train locaux en accueillant des lignes supplémentaires. Tandis qu’un espace de douze mètres de façade à façade était aménagé en autorisant devant chez soi du petit maraîchage ou un jardin d’agrément mi public, le tout sous des arbres fruitiers ou des treilles de vigne ou d’actinides (kiwis).

Les campagnes n’étaient pas en reste pour la transition des mobilités. Outre l’offre ferroviaire et les transports publics routier, qui tractaient systématiquement une remorque de petites marchandises, le fret cyclable avait permis de s’affranchir de l’automobile et du camion. Des cubes standardisés avaient été inventés, sorte de mini containers aux arrêtes ou aux sommets qui permettaient un rangement automatique au format plus grand. Suivant l’encodage électronique de colisage ils s’emboîtaient en Rubik’s Cube par simple contact pour former un volume standard à enfourner dans un container classique sans autre intervention que de les verser en vrac dans une espèce de tambour rotatif… Productivité et protection de l’environnement des sociétés, urbaines comprises, y trouvaient largement leur compte. Des vélos-tombereaux collectaient ces boîtes « intelligentes » pour les concentrer aux stations de chemin de fer, ou aux centres de logistique désormais sortis de l’ancien système routier. A l’inverse ils assuraient leur distribution aux ménages et à la plupart des entreprises, les plus importantes ayant réactivé ou aménagé un embranchement ferroviaire.

Le long des fleuves et des rivières qui traversaient les cités on n’hésitait pas à créer ou recréer un spectacle d’activité portuaire. Ainsi d’anciennes grues de déchargement étaient installées pour le plus grand bonheur des habitants comme des touristes, baigneurs ou amateurs de points de vue panoramiques. Soit ils s’installaient en haut de la cabine pivotante, correspondant au cinquième étage d’un immeuble, soit ils partaient dans une nacelle, commandée par elle, véritable panier à friteuse ou panier à salade grand modèle, pouvant contenir une dizaine de candidats à la trempette, et qu’un mécanisme déposait délicatement sur le bord du cours d’eau et sans que le thorax des baigneurs les moins élancés soit submergé. Le succès de cette attraction était garanti aux jours les plus chauds de l’année, et malgré la batterie des grues installées la queue des connaisseurs de ce divertissement ne disparaissait que tard le soir… C’était là encore un voyage ponctuel, sur place, et amphibie avec la transition de phase air eau corporellement la mieux vécue.

trempette

De larges gouttes de pluie froide réveillèrent l’apprenti urbaniste : la chaude journée de juin avait fini par condenser les premiers cumulonimbus d’été. Il était temps de refermer l’ouvrage emprunté à la bibliothèque et de le mettre à l’abri dans le caddie. Il sentait qu’il serait préférable de s’attarder dans un café pour ne pas se tremper complètement…

(1) Do It Yourself

Un commentaire sur “Proposition de cité utopique

  1. Avatar photoMarcel Robert

    Très bon texte, très intéressant… On retrouve par ailleurs certains débats qui traversent périodiquement l’actualité du site Carfree…

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