Le concept d’espace partagé peut-il réconcilier les usagers de la rue?

Hans Monderman, décédé le 7 janvier 2008, était un passionné. Il avait une vision, et depuis les années 1980, il travaillait inlassablement pour son idéal: restaurer la dimension humaine à la rue et à la société. Dans ce sens, il a non seulement jeté les bases pour le Projet Européen du Shared Space (Espace partagé), il a aussi réussi à inspirer et à défier de nombreuses personnes à travers le monde à avoir un regard critique sur eux-mêmes et leur environnement. Souvent il pointait du doigt des lacunes et des erreurs que d’autres considéraient comme chose acquise sans la remettre en question. Et il n’a jamais été découragé par le scepticisme ou des réactions hostiles que son travail de pionnier suscitait.

En particulier dans son domaine professionnel, le secteur de la circulation, il rencontrait régulièrement un manque de compréhension. Toutefois, il n’a pas baissé les bras, au contraire, il était capable d’utiliser ce « feedback » pour élaborer davantage sa vision. Les contributions de Hans Monderman, son engagement et son enthousiasme en tant que « père » du Projet Shared Space vont nous manquer à tous, mais il continuera à vivre à travers les aménagements qu’il a réalisés ou qu’il a inspirés et inspirera.

L’Institute of Shared Space (institut de l’espace partagé) doit ouvrir l’année prochaine à Drachten aux Pays-Bas. Le but de cet institut est de développer et de proposer des politiques innovantes pour le concept d’espace partagé développé par Hans Monderman et qui a connu de nombreux succès.

Les principes du shared space

* la rue parle (avec son histoire), pas la signalétique
* seules règles : rouler à droite + priorité à droite
* l’être humain est placé au centre de l’aménagement
* créer un flou et provoquer le contact visuel entre les usagers
* réduire le différentiel de vitesse entre les usagers
* tous les usagers ont les mêmes droits
* les déplacements sont un moyen, pas un but
* l’apparente insécurité contribue à promouvoir la vraie sécurité (« chaos productif »)
* la voiture n’est pas un problème, mais un élément de la solution

Lire aussi :  La course à vélo contre la Françafrique

Le « shared space » de Hans Monderman est parfois traduit aussi en français par « route nue », mais cette traduction ne semble pas appropriée car il s’agit d’aménagements situés en ville et non en milieu purement routier. En outre la traduction littérale en français « espace partagé » semble plus claire et plus proche du concept initial.

Le concept d’espace partagé rencontre un grand succès populaire dans de nombreuses villes des Pays Bas, de Grande Bretagne et d’Allemagne. Il apparaît comme une réconciliation des différents usagers de la rue, en mettant tout le monde sur le même plan.

Malgré tout, quelques critiques, émanant principalement en France du Certu, sont mises en avant et en particulier la difficulté de la prise en compte des personnes handicapées, quelque soit le handicap et notamment les personnes aveugles et malvoyantes.

Autre critique, la mixité vélo piéton voir deux roues motorisés sur la partie correspondant à un trottoir à niveau de la chaussée.

Des chercheurs allemands, Jürgen Gerlach, Dirk Boenke et Jens Leven de l’université de Wuppertal en Allemagne et Rob Methorst du Centre pour le Transport et la Navigation (DVS) de Rotterdam aux Pays Bas ont réalisé un travail de fond sur le shared space : « intérêt et incohérence du shared space : rendre une philosophie d’aménagement populaire plus objective ».

Cette étude a été traduite en français et peut être téléchargée sur le site du Certu.

3 commentaires sur “Le concept d’espace partagé peut-il réconcilier les usagers de la rue?

  1. Sissi

    Les panneaux de pubs (sucettes, 4×3 etc) ont été oubliés sur les deux images avant / après.
    C’est vrai, il n’y a pas la place :/

  2. Colibri

    Tout le monde n’est pas aussi emballé par le concept et les réalisations de type « shared space »…
    Par exemple ce billet [1] (en anglais), tiré d’un blog « par un cycliste, pour les cyclistes » 🙂
    Et il y a un commentaire qui résume bien le problème avec ce type d’aménagement : il y a toujours une poignée de motorisés « irréductibles » qui ne respectent rien et qui mettent en défaut le « système » : vitesse, stationnement, etc.
    C’est un argument à prendre en compte, et on ne peut pas dire que les Pays-Bas aient des leçons à recevoir en ce qui concerne les aménagements cyclables 🙂
    C’est surement d’ailleurs grâce à ces aménagements séparés, « en site propre » (segregated) que la pratique du vélo est si élevée là-bas. Bien que ça puisse faire mal à nos « idéaux d’égalitarisme républicain »(?) l’exemple des Pays-Bas montre que des aménagements dédiés au vélo, séparés de la circulation motorisée, ne sont pas à écarter, bien au contraire !

    [1] http://hembrow.blogspot.com/2008/11/shared-space.html

  3. bikeman

    Tout à fait d’accord, mais d’un autre côté, imaginons une ville sans code de la route qq instants : les bagnolards, à force de s’emplafonner les uns contre les autres, finiraient par rouler à une vitesse raisonnable en ville, à savoir entre 15 et 35 km/h, et finiraient par rouler à vélo finalement!! mdr

Les commentaires sont clos.