Etude des leucémies de l’enfant à proximité des routes à fort trafic

On savait que la proximité des rues et des routes à fort trafic automobile était responsable de nombreuses maladies chez les adultes et les enfants. Aujourd’hui, une étude de l’Inserm montre que la proximité du trafic routier a un impact certain sur le développement de certaines leucémies de l’enfant.

Des chercheurs de l’Inserm du CRESS (Centre de Recherche Epidémiologie et Statistique Paris Sorbonne Cité, Inserm– Université Paris Descartes – Université Paris 13 – Université Paris Diderot – Inra) ont étudié le risque de leucémie aiguë chez l’enfant à proximité des routes à fort trafic. Pour aborder cette question, l’équipe de recherche a pris en compte la totalité des 2760 cas de leucémie diagnostiqués chez des enfants de moins de 15 ans en France métropolitaine sur la période 2002-2007. Les résultats montrent que la fréquence de nouveaux cas de leucémie de type myéloblastique (418 cas sur les 2760 cas de leucémie) serait plus élevée de 30% chez les enfants dont la résidence se situe à moins de 150m des routes à grande circulation et qui ont une longueur cumulée dans ce rayon dépassant 260m. En revanche, cette association n’est pas observée pour les leucémies les plus fréquentes de type lymphoblastique (2275 cas). Les chercheurs ont particulièrement étudié le cas de l’île-de-France grâce aux données modélisées par Airparif, chargé de la surveillance de la qualité de l’air francilien.

Ces résultats sont publiés dans la revue American Journal of Epidemiology.

Les cancers touchent environ 1 700 enfants de moins de 15 ans chaque année en France, pour une population d’un peu plus de 11 millions d’enfants. Leur surveillance est assurée par le Registre National des Hémopathies malignes de l’Enfant depuis 1990 et le Registre National des Tumeurs Solides de l’Enfant depuis 2000. Avec 470 nouveaux cas chaque année, les leucémies (cancers du sang) sont les cancers les plus fréquents chez l’enfant, et ce sont majoritairement des leucémies aiguës lymphoblastiques. La leucémie « myéloblastique » ou « myéloïde » est un autre type de leucémie qui touche les cellules souches myéloïdes notamment à l’origine des globules rouges. La survie à 5 ans après une leucémie dans l’enfance est aujourd’hui de plus de 80 %.

L’objectif général du programme GEOCAP (Étude GEOlocalisée des CAncers Pédiatriques) est d’étudier le rôle des expositions environnementales dans la survenue des cancers de l’enfant de moins de 15 ans.

L’accroissement du risque des leucémies chez les enfants résidant au voisinage des routes à grande circulation fait partie des hypothèses de la communauté scientifique. L’augmentation du risque de leucémie myéloblastique est établie de longue date chez l’adulte dans le cadre d’expositions professionnelles au benzène.

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L’équipe EPICEA (Épidémiologie des cancers de l’Enfant et de l’Adolescent) dirigée par Jacqueline Clavel, directrice de recherche Inserm, au sein du CRESS, rapporte les résultats d’une étude sur l’incidence des leucémies chez les enfants résidant à proximité des routes à grande circulation. Il s’agit d’une étude cas-témoins permettant d’évaluer le niveau de l’exposition à un ou plusieurs facteurs de risque. La totalité des 2760 cas de leucémie infantile diagnostiqués en France métropolitaine entre 2002 et 2007 ont été inclus dans l’étude et comparés à un échantillon contemporain de 30 000 enfants témoins représentatifs de la population métropolitaine et constitué en collaboration avec l’INSEE.

« La fréquence des leucémies de type myéloblastique serait plus élevée de 30 % chez les enfants habitant dans un rayon inférieur à 150 mètres des routes à fort trafic et lorsque la longueur cumulée des tronçons routiers dans ce rayon dépasse 260m » explique Jacqueline Clavel, directrice de recherche Inserm.

En revanche, il n’y avait pas d’association entre les leucémies aiguës lymphoblastiques – les plus fréquentes – et la concentration aérienne en dioxyde d’azote, la distance ou la longueur cumulée des routes à fort trafic au voisinage des habitations.

Les chercheurs ont particulièrement étudié le cas de l’île-de-France, la région la plus urbanisée pour laquelle la concentration moyenne annuelle en benzène, principalement issu du trafic routier, a été estimée au voisinage de chaque résidence de l’étude de façon particulièrement précise. Ils ont observé que le risque de leucémie aiguë myéloblastique de l’enfant était doublé chez les enfants franciliens dont l’habitat était le plus exposé au trafic, c’est dire quand simultanément la longueur cumulée des tronçons routiers dans un rayon de 150 m autour de la résidence dépassait 300 m et l’estimation de la concentration moyenne annuelle en benzène au voisinage de la résidence était supérieure à la valeur médiane observée en Ile-de-France (1,3 µg/m3).

En cohérence avec les hypothèses ayant fondé la réalisation de cette étude, l’exposition au benzène liée au trafic automobile pourrait donc être l’une des explications de cette association.

Source: Inserm.fr

2 commentaires sur “Etude des leucémies de l’enfant à proximité des routes à fort trafic

  1. AlexGrigs

    Le cancer est juste la phase ultime, visible, des effets nocifs de la pollution sur les enfants. Mais pour un très grand nombre d’enfants les effets se traduisent par la débilité mentale et physique. En conséquence on constate le retard à l’école, l’obésité, ce qui pousse l’enseignement à prodiguer un nivellement par le bas plutôt que de s’attaquer aux vrai causes du niveau bas des enfants.

  2. pedibus

    Cette géolocalisation des cancers dus au trafic routier ne peut que me renvoyer à cette étude qui a fait l’objet d’une parution à l’INVS en 2009, au sujet des leucémies (lymphomes non hodgkiniens) autour des incinérateurs d’ordures ménagères : la localisation des leucémies formait alors une tache en ailes de libellules autour de l’installation de Besançon, d’après les résultats de l’étude épidémiologique.

    http://opac.invs.sante.fr/doc_num.php?explnum_id=1252 (page 72)

    Avant le gros scandale sanitaire « super amiante » que nous prépare l’hyper massive motorisation diesel française quoi faire face à l’inertie des pouvoirs publics français?

    Si au moins l’épidémiologie pouvait sortir de son ghetto dans ce pays… Combien de groupes scolaires en bordure d’infrastructures routières? Que dire des logements tout simplement?

    Quand au cocktail de polluants en sortie de pot d’échappement et à l’effet dynamisant des brouillards hivernaux je laisse le soin d’imaginer le pire…

    On peut toujours se faire insulter, se faire traiter de catastrophiste… en attendant de sortir de cette longue période obscurantiste : insulte pour insulte, dent pour dent…

     

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