« La sobriété subie »

C’est toujours étonnant de voir à quel point les gens qui nous gouvernent salissent tout ce qu’ils touchent. Ils se saisissent aujourd’hui, contraints et forcés, du concept de sobriété et cela vire immédiatement à la pantalonnade.

La sobriété, c’est pourtant en soi une évidence. Ne pas dépenser plus que ce que l’on a besoin, être économe dans tous les sens du terme, limiter son impact, etc. Du moins, c’était une évidence pour nos grands-parents ou au-delà, mais la société de l’abondance et de la sur-consommation est passée par là.

Et cette société ne s’est pas mise en place sur la base du volontariat, mais sur la base d’une injonction à consommer, dépenser, jeter dans des proportions gargantuesques, au travers de tout un appareil de propagande (télévision, publicité, marketing, etc.).

Aujourd’hui, on nous demande de « nous mettre à la sobriété » sans interroger bien entendu le modèle de sur-consommation qui nie cette sobriété depuis des décennies. Le plus drôle, ou le plus triste, c’est quand la ministre dite de « la transition énergétique » Agnès Pannier-Runacher déclare à la télévision « qu’on ne demandera jamais à des Français en situation de sobriété subie de faire des économies… »

Dans leur esprit, et c’est logique, les pauvres sont « en situation de sobriété subie » car en fait ils n’aspirent qu’à sur-consommer comme les riches. D’ailleurs, ils doivent être au Revenu de Sobriété Active (RSA)… Donc, dans leur esprit, la « normalité », c’est la sur-consommation et la « sobriété », c’est la pauvreté…

Cette petite phrase n’a l’air de rien, mais elle en dit long sur l’impasse de notre système. Car, en associant sobriété, contrainte et pauvreté, la propagande gouvernementale en la matière explique en sous-texte qu’on ne changera rien. Qui voudra en effet dans ce contexte se « soumettre » à une sobriété associée à une contrainte « que l’on va subir » pour tendre vers un « mode de vie de pauvre? »

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Heureusement, pas d’inquiétudes, le « plan de sobriété énergétique » ne prévoit aucune mesure contraignante, aucun contrôle, aucune sanction. Il ne faudrait quand même pas diminuer la consommation, la production, les profits et la croissance…

Bon, là-dessus je vais sobrement arrêter là et remonter sur mon vélo, en essayant de donner un coup de pédale sur deux pour participer à mon échelle à ce fantastique effort national de sobriété…

4 commentaires sur “« La sobriété subie »

  1. Dehousse

    Ma grand-mère, qui savait glaner dans les bois et se soigner avec les plantes, disait souvent «  il ne faut pas déprofiter !»
    Petit, je comprenais «  il faut savoir profiter sans gaspiller »

    Aujourd’hui, où on ne peut plus glaner dans les bois, et pour cause, je traduirais par « savoir profiter des bienfaits du progrès sans gaspiller »

    Remettons le mot déprofiter a l’honneur.

  2. Bernard Delloye

    Ils se rendent ridicules. Après avoir conspué les décroissants, s’être moqués des Amish, ils reprennent le credo sans reconnaître leur aveuglement passé. Ils rêvaient d’éclairer tout, tout le temps, jusqu’à bannir la nuit….

    Je vis sans voiture depuis 25 ans, à la campagne, assez éloigné de tout, je n’ai jamais eu l’impression de subir ma sobriété. Au contraire. Après la voiture, il y a encore bien d’autres objets inutiles à bannir. Le confort est nuisible et la facilité anesthésie.

  3. Alexandre

    @Dehousse, ça me fait penser à une étude de sociologie qu’on nous avait présenté il y a quelques temps. Des étudiants étaient allés en forêt de Fontainebleau et avait analysé les parcours des promeneurs. Ils étaient arrivés à la conclusion qu’aujourd’hui, les visiteurs sortent d’autant plus des grands chemins aménagés qu’ils ont une CSP (catégorie socio-professionnelle) élevée. Donc, plus on est riche, plus on sort des sentiers battus.

    Ça m’avait marqué, car en pensant à différentes représentations de la campagne d’il y a environ un siècle (les romans et films de Pagnol, Les enfants du marais, les romans de Blazac ou Zola, etc.) il semble que c’était l’exact inverse : plus on était riche, plus on restait dans les grands chemins aménagés pour ne pas risquer de se salir, plus on était pauvre, plus on sortait de ces grands chemins pour « glaner » des champignons, lapins, châtaignes et autres aliments que l’on pouvait trouver en forêt.

    L’un des problèmes des personnes avec de faibles revenus aujourd’hui, c’est qu’on a tellement :

    détruit la nature en bétonnant à tout va autour de toutes les villes (même petites) ou en agrandissant les champs ;
    valoriser le « déjà prêt » et l’industriel par rapport au « fait maison » et aux aliments naturels.

    que ces personnes ne savent même plus, pour beaucoup, préparer un légume cru (un chou ou une courge par exemple). Ainsi, il sont coincés dans une spirale négative et achète des produits industriels de mauvaise qualité, alors que beaucoup pourraient, pour le même prix, acheter des fruits ou des légumes et les préparer. Par ailleurs, la grande majorité des gens (qu’ils soient riches ou pauvres) n’ont plus accès à un espace où poussent des végétaux comestibles (châtaignes, pommes, fleurs et plantes comestibles, baies, champignons, etc.) et les savoirs des anciens pour reconnaître les végétaux comestibles des autres ont fini par se perdre en grande partie.

  4. Joffrin

    Le Monde, journal fasciste qui ne sortira jamais de son fascisme congénital, nous informe : ZFE, injustice ! Attention, c’est de la menace là (le message ne vous concerne pas en priorité donc, ça n’est pas rédigé pour vous) : la révolte des petits pollueurs gronde ! La tyrannie des petites décisions, des petits choix, des petites gens méritantes, va se transformer en cyclone révolutionnaire de salariés mécontents, qui veulent tranquillement continuer à bosser pour le capital et acheter Le Monde (pour ceux qui ont quelques notions d’histoire, ça doit parler un peu).

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/10/11/zfe-pour-les-vehicules-les-plus-polluants-de-forts-risques-d-injustices_6145322_3232.html

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