L’agricyclette : l’espoir pour des milliards de paysannes et de paysans?

Le sujet du jour fera provisoirement la transition de Carfree des villes vers Carfree des champs…

Jusque dans la bloblote du cameraman on sent l’entreprise dilettante, mais l’agriculture est-elle autre chose depuis dix à douze mille ans? Regardez les trois vidéos: depuis celle de janvier 2013 à la seconde, datée de novembre 2014, on sent un progrès dans le bidouillage pour la construction d’un instrument destiné à travailler la terre, qui, nouveauté importante ici, n’a besoin ni d’animal de trait ni de moteur thermique ou électrique: c’est comme sur la bicyclette que les choses se passent. Butter les jeunes pousses ou travailler le sol avant d’ensemencer se fait en pédalant.

Pendant la longue période de mécanisation de l’agriculture, jusqu’à aujourd’hui encore, on a progressé de la sorte: empiriquement, pragmatiquement, lentement mais sûrement. Même quand les tracteurs ont remplacé bœufs et chevaux, au début du siècle dernier, les instruments aratoires, les cultivateurs, les rasettes à fumier et autres dispositifs indispensables à tous les travaux de la sole ont été constamment modifiés à partir du seul bricolage des agriculteurs eux-mêmes, avant leur standardisation industrielle. Je suis debout sur les pédales après avoir vu cette initiative: l’espoir n’est pas mince pour une bonne partie de la planète, celle qui concentre encore la majorité des paysans non motorisés.

Ceux-là peuvent bénéficier de la traction animale: bœuf, zébu, cheval ou âne par exemple. Un âne peut atténuer la vexation de notre espèce pour ce qui concerne la puissance physique: de poids assez voisin du nôtre sa force de traction correspond à plusieurs dizaines de kilos, on dira du même ordre de grandeur qu’un cycliste pas trop rouillé avec une bécane bien huilée. Suivant la nature du sol, le type d’enracinement de la culture précédente ou de la jachère et compte tenu de l’humidité de la parcelle, d’une cinquantaine d’ares l’exploitation passe théoriquement à une voire plusieurs dizaine d’hectares avec une unité travail annuel.

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Quand on sait que jusqu’à présent le paysan est une paysanne en Afrique intertropicale, que ses travaux correspondent le plus souvent à du maraichage accompagné de petit élevage avec une basse-cour, que cette activité se fait avec des outils manuels, genre houe et hoyau, dans une attitude courbée des plus pénibles… Qu’on étende la réflexion à une aire géographique plus vaste, qu’on réfléchisse au gain de productivité et à l’ergonomie. On peut alors deviner le processus qui va affranchir de la peine une bonne portion de l’humanité. L’urbanisation a démarré comme ça il y a cinq millénaires, quand un premier progrès notable des techniques agricoles du moment a permis de libérer des muscles pour le meilleur et le pire en Mésopotamie: scribes, prêtres, commerçants, soldats, tyranneaux et leur aréopage…

La femme africaine par exemple pourra continuer à avoir le dessus suivant le système social matriarcal qui l’intègre. Elle pourra même dégager davantage de surplus, en temps et en valeur monétaire ou de troc, pour investir en éducation, en communication numérique et en développement local durable. Et il ne manque ni de capacités d’initiative, ni de compétences techniques ou de possibilités de les acquérir sur place pour produire et améliorer l’agricyclette, pour s’approprier l’avenir…

http://farmhack.net/tools/culticycle

5 commentaires sur “L’agricyclette : l’espoir pour des milliards de paysannes et de paysans?

  1. paladur

    La permaculture nous apprend aussi à ne pas retourner la terre. Ainsi le besoin de puissance de traction devient nettement moins prépondérante et l’option vélocipédique presque idéale.

  2. Vincent

    Pour la permaculture, a.k.a. non-labour + semi-direct, sait-on ce que ça donne pour les grandes cultures (blé, maïs, riz)?

  3. paco

    « Un âne peut atténuer la vexation de notre espèce pour ce qui concerne la puissance physique.. »:

    Il y a des résultats de translation comme cette phrase qui laissent un tantinet rêveur.
    Mais sérieusement cet engin au mieux, et au prix de beaucoup de sueur, ne pourrait que servir à biner (en surface) une terre légère et préalablement travaillée.
    Déjà sur route, vu le poids apparent, on ne lui ferait pas monter une côte à 8% 😉

  4. pedibus

    Oui Paco, sans doute certaines consistantes de sols rendront difficile l’usage du modèle présenté. On peut imaginer aussi l’équivalent avec quatre ou cinq disques à la place des roues arrières et un travail avec plusieurs passages de façon à casser progressivement un sol dur : c’est encore moins pénible et plus productif que de houer la même surface en étant cassé en deux. Mais au vu des 150 à 300 watts disponibles et un foisonnement de situations pédologiques il faudra bidouiller en permanence et trouver pour chaque cas un protocole singulier…

  5. paladur

    L’outil présenté n’est pas la panacée mais l’important est le concept d’utiliser l’outil convivial qu’est le vélo pour les travaux agricoles.

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