Les urbanistes ont-ils compris ce qu’était un rêve?

Pour bien comprendre la question du potentiel onirique de l’urbanisme, partons de quelque chose de simple: selon vous, laquelle de ces deux images fait le plus rêver ?

C’est en fait une question assez pointue: comment rendre « désirable » un projet d’écoquartier quand on n’a pas grand chose d’autre à proposer que des potagers partagés ou des toilettes sèches?

Face à une conception de l’urbanisme bagnolo-centrée (le foot, le fric, les femmes), comment amener l’automobiliste moyen à abandonner sa voiture pour un mode de vie vélo-centré (l’effort, la sueur, la dèche)?

En matière de mobilité, comment choisir entre un tramway en site propre, mais aux couleurs criardes et une belle Lamborghini élégamment présentée?

On pourrait botter en touche et dire tout simplement qu’il faut faire table rase de l’imaginaire véhiculé par les agences de publicité depuis des décennies. Certains disent qu’il faut même « recoloniser l’imaginaire », avec des missionnaires? On pourrait aussi envoyer tous les publicitaires en camp de rééducation. Certes.

Mais la réalité est bien là. Tout le monde rêve, mais les rêves ne parlent pas forcément de réchauffement climatique, de pollution généralisée ou de destruction de l’environnement.

On pourrait aussi changer la nature des visuels et de la communication liée aux écoquartiers, au vélo ou au transports en commun. Par exemple, prenez une campagne de communication pour les transports en commun, au lieu de voir des vieilles dames, vous mettez des filles à poil en train de poinçonner leur ticket sur la photo. Quel impact mesurable sur le report modal?

On voit que le « rêve » est un concept difficile à manier. C’est pourquoi, plutôt que de chercher à vendre à tout prix l’invendable (un écoquartier avec toilettes sèches), ne faudrait-il pas plutôt chercher à pourrir les concepts opposés?

Lire aussi :  Avoir toujours le feu vert à vélo

C’est un peu ce qui avait été développé dans le cadre de la théorie de l’emmerdement maximal. Au lieu de dire aux automobilistes des trucs impossibles comme « mettez-vous au vélo, c’est vachement plus cool et en plus ça sauve la planète », l’idée était plutôt de leur pourrir au maximum leur vie d’automobiliste afin qu’ils renoncent volontairement à leur bagnole!

Certains spécialistes proposent ainsi d’inventer un nouveau concept, la PPP (Possibilité de Pouvoir se la Péter). En gros, chacun doit avoir une PPP élevée, quitte à tout faire pour descendre celle des autres! L’agence d’urbanisme Deux Degrés, spécialisée en « urbanisme, prospective et identité nationale » a fait récemment une intervention fondamentale sur ce thème à Science-Po Paris.

Retrouvez leur présentation ici:

http://www.deuxdegres.net/?p=1110

7 commentaires sur “Les urbanistes ont-ils compris ce qu’était un rêve?

  1. jean claude

    moins je suis un pure produit de l’emmerdement maximale, je me souviens du jour, porte maillot, ou je me suis dit mais c’est pas possible il faut que je fasse autrement pour aller au bureau! J’avais l’esprit tellement formaté que j’ai acheté un vélo nucléaire pour faire 7 km et ce qui est bien c’est que ca tombe en panne donc j’ai redécouvert le vélo « mécanique » et ca a changé mon way of life. C’est pour ca que je ne peste plus contre les bouchons, d’abord parceque je n’ai plus trop l’occasion d’y participé et deuxiement ils sont un formidable instrument de prise de conscience. Vive les encombrements!

  2. Cinepete

    En tout cas, il y a du boulot !
    Je ne sais pas si vous avez vu la pub pour une bagnole (qui passe notamment au cinéma… difficile d’y couper) où ils vont à fond dans le cliché : ils montrent un métro aérien, mais c’est un rat qui le prend ! Et le métro fait la course avec une voiture, c’est la voiture qui gagne (comme par hasard, il n’y a pas une seule autre voiture ni bouchon à l’horizon…)
    Pour la voir, c’est ici : http://www.youtube.com/watch?v=5a2w1rk93xA

    Pour ne pas vous infliger toute la pub, c’est entre 1’10 et 1’20 que ça se passe !

    Beurk

  3. jean claude

    exactement je l’ai déjà vu cette pub, j’avais été choqué d’ailleurs par le paralelle avec le rat, je trouve que c’est meme étonnant qu’elle puisse etre diffusée. Pour ne plus subir la pub des cinémas je vais a la mjc de colombes, les films sont moins récents du coup il n’y a pas la cohue et les films commencent à l’heure, sans pub! elle est pas belle la vie

  4. bikeman

    Merci Cinepete pour le lien vers la vidéo je viens de laisser un com…
    Encore une énième pub de bagnole totalement affligeante…

    Sinon pour le passage « Au lieu de dire aux automobilistes des trucs impossibles comme « mettez-vous au vélo, c’est vachement plus cool et en plus ça sauve la planète », l’idée était plutôt de leur pourrir au maximum leur vie d’automobiliste afin qu’ils renoncent volontairement à leur bagnole! »
    et bien c’est ce que l’on fait par le biais des Vélorutions, on teste les deux méthodes…
    on leur cause, et on bloque les rd points… Mais ça reste un événement trop ponctuel…

    Et là c’est pareil, à moins d’utiliser les techniques de pub choc des marketeux, ça ne fonctionne pas bcp…

    Le concept « choquer pour mieux vendre » devient « choquer pour mieux sensibiliser », exemple, on roule avec un masque à gaz à vélo, tout en portant le tee-shirt Carfree approprié…

    Et encore là, je ne suis même pas sûr que le bagnolard comprenne…

    Bref, la théorie de l’emmerdement maximal semble une bonne méthode, mais nécessite d’être mise en œuvre quotidiennement et de manière assidue!
    Accompagné de la « politique de réduction de l’espace affecté à l’automobile » alors là, yes, on peut obtenir de bons résultats!

  5. jean claude

    je crois que les bonnes opérations sont aussi les jours de grande grève, ce sont de formidable jour pour une alter mobilité. Les automobilistes qui n’ont pas vraiment besoin de leur voiture (il parait que 50% des trajets sont inférieur à 3km) font autrement ces jours la et s’ils n’ont pas pris un rtt ca peut etre l’occasion pour eux de découvrir qu’il est possible de se rendre au travail autrement qu’en voiture. Pour ma part je suis assez concilliant avec les automobilistes, le matraquage publicitaire aidant ils ne savent pas qu’il est possible de faire autrement, se croyant libre ils ne font que répondre au way of life délivré par le marketing.

  6. bikeman

    Bien vu Jean Claude!

    J’ajouterais que le nombre de pub de voiture est totalement hallucinant à comparer de celui pour les vélos…
    Ratio : 1 pour 1000 !!

  7. Pim

    Je ne me rappelle plus si j’ai déja posté ce lien. Mais à propos d’urbanistes, de décideurs politiques et de communication : ci joint un lien vers un article du magazine LSA, spécialiste de l’actualité de la grande distribution et de la très très sainte consommation.

    http://www.lsa-conso.fr/la-reconquete-des-clients-passe-par-les-parkings,125637

    Concrètement, leurs projets consistent à créer des parkings en pelouse pour avoir l’air écolo.
    Résumé : « La fréquentation des magasins et des pôles commerciaux ne cesse de s’étioler. Pour y remédier, il faut revenir aux solutions terrain. Et à un point trop longtemps négligé : le parking. Revue des grands services et petites attentions par lesquels débute l’attraction d’un centre commercial. »

Les commentaires sont clos.