La Commission Européenne veut rendre les routes plus sûres et plus propres. Peut mieux faire…

L’Agence France Presse (AFP) nous apprend le 17 mai dernier que la Commission européenne a dévoilé ses propositions pour rendre les routes de l’Union Européenne plus sûres et plus propres, en introduisant par exemple une limite aux rejets de CO2 des camions et en rendant obligatoires certaines technologies d’assistance à la conduite.

« C’est le troisième et dernier « paquet mobilité » de l’exécutif européen. Il contient plusieurs propositions législatives et autres recommandations moins contraignantes, qui s’inscrivent dans son objectif du « triple zéro » d’ici 2050: 0 morts (sur les routes), 0 pollution et 0 papier. Parmi les mesures phares, la Commission propose pour la première fois de fixer une limite d’émissions de CO2 pour les poids-lourds: en 2025, leurs rejets devront être 15% plus faibles qu’en 2019, et au moins 30% d’ici 2030. »

C’est bien joli, mais à quand l’obligation pure et simple de dérouter tout ou partie du fret vers le rail, le fluvial et en local les moyens « vélogistiques » ? Ce serait bien LA mesure la plus impactante en terme de réduction d’émissions de CO2 et de particules fines dans le transport de marchandise. Sachant que pour exemple, 25% du tonnage circulant parcourt déjà entre 500 et 1500 km…

« Tous les secteurs doivent contribuer à atteindre nos engagements pour le climat pris dans l’accord de Paris »,
a martelé le commissaire européen à l’Action pour le climat Miguel Arias Canete. Selon lui, « ces normes représentent une opportunité pour l’industrie européenne de consolider sa position de leader dans les technologies innovantes ». Sachant que l’accord de Paris est déjà en tant que petite manœuvre de com’ du précédent gouvernement (dont le ministre en charge se trouve actuellement mouillé dans le dossier « Lafarge campe en Syrie et pactise avec une entreprise terroriste ») bien moins contraignant vis-à-vis des pays « développés » que le minimum nécessaire pour assurer un futur vivable à la planète, on peut se poser des questions sur la pertinence de ces normes.

« Cette mesure attendue de longue date a toutefois fait l’objet du scepticisme du secteur, l’Association européenne des constructeurs automobiles (ACEA) exigeant que soit pris en compte les « complexités » du secteur. Selon ses chiffres, les camions représentent un cinquième des émissions de CO2 dans le secteur du transport mais transportent 70% du fret terrestre. » Certes, si l’on mesure uniquement les rejets de CO2 et qu’on omet les particules fines, le transport routier serait presque un bon élève. Maintenant, vu les dernières révélations médicales au sujet des conséquences sanitaires des particules fines, et après découverte des magouilles enfumantes de l’industrie automobile sur le diesel (VL, VUL et VI compris), je conseille à ces honnêtes messieurs de l’AECA de garder le silence au lieu de pousser des cris d’orfraie.

Lire aussi :  Grève de la pensée

« La Commission estime que ces objectifs de réduction de rejet de carbone permettrait aux sociétés de transport routier, surtout des petites et moyennes entreprises, d’économiser 25.000 euros en cinq ans en consommation de carburant. » Encore un effort et on aura droit aux avantages des motorisations diesel Euro6 par rapport aux Euro5.

« Bruxelles propose également de rendre obligatoire sur les nouveaux modèles de véhicules certains équipements de sécurité avancée: système de freinage d’urgence, aide au maintien sur la voie ou système de détection des piétons ou cyclistes pour les camions. » On voit déjà ce que ça donne sur les véhicules particuliers (outre Atlantique notamment), aussi je ne pense pas que quiconque soit impatient de connaître l’application de ces joujous sur les poids lourds. Et je le répète : en augmentant la part du rail, du transport fluvial, et du vélo de livraison, on diminuera assurément le risque d’accidents impliquant des attelages et véhicules de transport routiers.

« Environ 25.300 personnes ont perdu la vie sur les routes d’Europe en 2017, et 135.000 ont été gravement blessées. »

« Le secteur du transport routier emploie environ 11 millions de personnes dans l’UE, et représente 5% du PIB de l’Union. Il est estimé que le trafic passager va augmenter de plus de 40% d’ici la moitié du siècle, et le trafic fret de 60%. » Si nos gouvernants adorés n’ont pas anéanti le rail d’ici-là, il y a peut-être une chance… Sinon, Macron et son gang de petites frappes pourront se vanter d’avoir laissé une marque sanguinolente dans l’histoire du pays et bradé la santé des citoyens au profit des financiers, investisseurs privés, boursicoteurs et actionnaires (tant de synonymes pour « escrocs » et « voleurs », que la langue de Molière est riche ! 😉 ).

12 commentaires sur “La Commission Européenne veut rendre les routes plus sûres et plus propres. Peut mieux faire…

  1. Jipeka

    Bonjour

    Il me semble qu’il ne s’agit pas « d’anéantir » le rail mais de l’ouvrir à la concurrence, nuance. Et n’est-ce pas Philippe (dans le « gang » Macron) qui veut imposer bientôt le 80 à l’heure?

  2. Vincent

    « Le secteur du transport routier emploie environ 11 millions de personnes dans l’UE, et représente 5% du PIB de l’Union. Il est estimé que le trafic passager va augmenter de plus de 40% d’ici la moitié du siècle, et le trafic fret de 60%. »

    En carburant à quoi, sachant qu’il faut aussi que nous ayions sérieusement réduit notre consommation d’énergie fossile d’ici 2050 ?

  3. Prolo

    Aussi, faire respecter le code du travail dans les entreprises et payer correctement les chauffeurs ça éviterait les routiers qui s’endorment après 10H de conduite ou pètent un câble parce qu’ils tienne le coup à la cocaïne.

     

    Et puis, on a vraiment besoin de tout ce merdier qu’on transporte ?

  4. Axelos

    Il me semble qu’il ne s’agit pas « d’anéantir » le rail mais de l’ouvrir à la concurrence, nuance

    C’est un peu le même résultat. Seul les lignes « rentables » continueront à exister, les autres seront voués à disparaître

    Pour comparaison, si on prend l’exemple des routes de façon caricaturale, si toutes auraient droit à une taxation de passage, quel pourcentage de-celles ci seraient rentable ? Les campagnes et rues résidentielles se retrouveraient alors accessibles uniquement par des routes complètement déglinguées au fil des décennies car abandonnés.

  5. Vince

    @ Jipeka

    Le rapport Spinetta propose la suppression de bon nombre de petites lignes, si ce n’est pas un anéantissement cela y ressemble, en tout cas c’est une restriction.

    Les 80 km/h c’est bon pour votre porte-monnaie, au prix actuel du carburant il est peut-être bon de lever le pied ?

    J’espérais qu’à 1,50 le litre cela commence à se calmer côté trafic. Il faudrait peut-être encore en augmenter le prix et baisser le celui du train pour réduire le trafic routier.

    D’un autre côté le marché du camion n’a jamais été aussi florissant, on se demande comment l’Europe va arriver à son objectif sans relancer le train.

  6. abil59

    @ axelos
    Vous êtes le 1er homme sur Terre (ouais carrément) que je rencontre à développer le même argument que je me fatigue de développer contre des libéraux économiques! Oui à la privatisation des routes car ça dégrade bien plus la planète que le train qui devrait rester à tout prix dans le giron publique pour l’intérêt général!

  7. abil59

    @axelos

    Vous etes la 1ere personne sur Terre (ouais carrément!) avec un argument identique à celui que je me fatigue de développer devant des libéraux économiques!

    Privatisons les routes beaucoup plus néfastes à la planète (imperméabilisation, pollution, destruction accélérée de l’écosystème…) et laissons le train dans le giron publique car c’est de l’intérêt général!

  8. Jipeka

    De toute façon avec la sncf actuelle on va vers la fermeture des petites lignes et le remplacement par des bus dans lesquels on ne peut pas mettre de vélo. Autant ouvrir à la concurrence en faisant pression pour que l’accueil des vélos soit plus facile.

    L’ouverture à la concurrence se fera, en principe, sous forme de « paquet » comprenant une (ou des) ligne(s) rentable(s) avec des lignes dites non rentables. Ce sont les régions qui décideront et c’est sur elles qu’il faudra faire pression.

    Le raisonnement par analogie sur la privatisation des routes est un raisonnement par l’absurde qui n’apporte rien au débat.

     

  9. abil59

    @jipeka

    Allez dire que le raisonnement par analogie n’apporte rien au débat à ceux qui comparent la (privatisation) du transport ferroviaire est normal puisque le transport aérien l’est déjà.

    Et je leur réponds dans ces cas là que contrairement au transport ferroviaire et routier, l’avion ne demande pas d’entretien du réseau (puisque c’est l’air). L’entretien du réseau va être ce qui va faire couler le train avec ce type de réforme car la France n’est pas assez dense pour avoir des liens « rentables », notion cher aux libéraux.  Le raisonnement par analogie n’est pas le meilleur mais on choisit l’avion, le train ou la voiture; pas les 3 (en même temps).

  10. Axelos

    Le raisonnement par analogie sur la privatisation des routes est un raisonnement par l’absurde qui n’apporte rien au débat.

    Ok. Désolé pour le temps de réponse, mais j’ai un peu zappé ce sujet. Alors une raison plus explicite :

    L’ouverture d’une ligne de chemin de fer nécessite des coûts plus ou moins colossaux. L’entretient des lignes de chemins de fers engendre des coûts plus ou moins colossaux. Souvent, ce fut le cas par exemple pour la construction de LGV Est, villes, département, région et mêmes autres états (Luxembourg) participent à financer les projets.
    L’ouverture à la concurrence concerne en effet dans un premier temps les exploitations des chemins de fers, et non pas ces derniers directement.

    Les institutions publiques payes alors pour proposer des lignes de chemins de fers à des exploitants. On rentre dans des contrats public-privées, basés sur un concept économique qui consiste à estimer le nombre de voyageurs afin de rentabiliser l’exploitation. Si les recettes sont supérieures, alors les sociétés prestataires engrangent une grosse partie de la différence, et en reverse une petite partie à SNCF Réseau, cela dépend des termes des contrats signés.
    Les bénéfices de l’exploitant sont redistribués à hauteur d’environ 70 % aux actionnaires, puis les 30 % se partagent entre salariés et développement. Comme toutes bonne grosses entreprises qui se respecte, rien d’exceptionnel.

    En revanche, si les recettes sont inférieures aux estimations, alors SNCF Réseau doit reverser la différence à l’exploitant. C’est en fait principalement ce type de situation qui entretient « la dette » de la SNCF.

    Sauf que cette dette a été parallèlement allégé grâce aux bénéfices de certaines autres lignes. Même si on parle d’une différence de quelques dizaines de milliards d’euros, c’est en fait extrêmement peu par rapport aux enjeux financiers totaux derrière, et cette dette s’est accumulé depuis presque un siècle.

    En revanche, lorsque les exploitations vont être libérés, les lignes fortement rentables ne serviront plus à soutenir les pertes des lignes non rentables. Concernant les lignes rentables, l’exploitant va profiter d’une marge bien supérieure à l’exploitation publique actuelle, c’est inhérent, et à contrario, concernant les lignes non rentables, les coûts d’exploitations seront bien trop lourdes à financer par les collectivités publiques. Ces lignes seront donc fermées.

  11. Jipeka

    On dirait à vous lire (avec grand intérêt car beaucoup d’arguments) que la situation actuelle est…. bonne. Je pense que c’est loin d’être le cas, et je ne parle pas de la grève et de ses conséquences. Des petites lignes sont déjà fermées et remplacées par des cars.

    Je ne suis pas spécialiste de l’économie ferroviaire, juste utilisateur du train et particulièrement du vélo-train. Dans ce domaine, la situation actuelle est mauvaise et rien ne permet de voir le bout…du tunnel. J’entends que l’ouverture à la concurrence présente des risques mais qu’elle peut aussi, si elle est bien menée, nous sortir de la situation bloquée dans laquelle nous nous trouvons.

    L’idée du « paquet » permet justement d’ouvrir dans un même ensemble des lignes bénéficiaires et déficitaires pour que tout le monde s’y retrouve, public, investisseur, salariés. C’est aux conseils régionaux de piloter le dispositif et à nous de faire pression par le biais de nos associations sur eux.

     

     

  12. Vince

    Ce n’est pas parce qu’on n’est pas favorable à la mise en concurrence qu’on se satisfait de la situation actuelle…pour laquelle la déconstruction est en effet déjà à l’oeuvre.

    On peut vouloir réformer sans se précipiter dans la mise en concurrence si cela est encore possible.

    Il y aurait moyen de relancer le transport ferroviaire si on le souhaitait vraiment, et ainsi diminuer l’impact sociétal et écologique de la tuture.

    On ne peut pas avoir une politique de transport qui se limite à mettre la pâtée aux cheminots qui vont enfin en découdre avec un employeur privé, il faut voir plus globalement.

     

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