Une dizaine de réalisations et de nombreux projets, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Autriche et au Royaume-Uni démontrent qu’une forte densité est compatible avec une grande qualité de vie.
L’idée de départ est simple: ceux qui vivent sans voiture doivent malgré tout subir les nuisances de ceux qui vivent avec… En réunissant dans un même quartier les habitants qui souhaitent vivre sans voiture, ceux-ci se trouvent à l’abri du bruit du trafic et les enfants peuvent tranquillement jouer dehors.
On peut classer les quartiers sans voitures en deux catégories:
Les vrais quartiers sans voitures
La plupart des quartiers réalisés et des projets font partie de cette catégorie. Leurs habitants ne possèdent pas de voiture et toute circulation automobile à l’intérieur du quartier est interdite (sauf pour les véhicules d’urgence, etc.). Quelques places de parc (0.1 à 0.2 voiture par logement) aux entrées du quartier sont à disposition, selon les cas, pour des voitures en autopartage et d’autres exceptions.
Les quartiers « pauvres en voitures »
Le ratio de places de parc y est en général limité à maximum à 0.5 place par logement, regroupées dans des parkings collectifs placés aux entrées du quartier. Des voitures circulent néanmoins à l’intérieur du quartier.
Ce compromis entraîne cependant une baisse de la qualité de vie et il est source de conflits. A Amsterdam, les responsables du quartier Westerpark, premier quartier (presque) sans voitures (20% des ménages y ont droit à une place de parc, attribuée par une loterie) recommandent de ne plus prévoir de voitures du tout pour les nouveaux projets.
Le marché existe
Au début, les responsables des projets penchaient en faveur de quartiers «moitié moitié», par crainte de ne pas trouver d’investisseurs. Mais l’expérience a montré que les purs quartiers sans voitures sont très recherchés et les enquêtes prouvent que les habitants sont très satisfaits de leur choix.
Il y a donc un marché pour des quartiers sans voitures. En Suisse, 20% des ménages ne disposent pas d’une voiture. Dans les villes, la part des ménages sans voiture atteint jusqu’à 49% (Bâle). Selon différentes études, on peut compter sur 2% des ménages d’une agglomération susceptibles de s’installer dans un quartier sans voitures.
Localisation et taille des quartiers
Les quartiers sans voitures sont intégrés dans le tissu urbain, à des emplacements bénéficiant d’une excellente desserte par les transports publics. Des commerces, des écoles et d’autres équipements se trouvent dans l’environnement proche, à distance de marche.
Il s’agit souvent de friches industrielles, militaires ou ferroviaires, ou alors de terrains restés libres pour différentes raisons. La taille des quartiers est très variable (0.08ha à Brême, Grünenstrasse, 13ha à Berlin, Mitte). Il est préférable de réaliser de grands quartiers, mais mieux vaut quand même réaliser de petits quartiers sans voitures que renoncer purement et simplement.
Les auteurs des projets recherchent en général une mixité socio-économique, avec une part de logements en propriété, avec des logements subventionnés et des logements pour personnes handicapées.
La mixité des affectations est également recherchée, mais elle n’est pas toujours possible. Tous les quartiers offrent différents services facilitant la vie sans voiture.
Prix modestes et espaces libres de qualité
Outre l’absence de bruit et de danger, citons, parmi les nombreux autres avantages:
– Des prix et loyers relativement modestes (jusqu’à 20% inférieurs à des logements comparables), grâce à l’économie du coût des parkings, à la densité élevée et à d’autres économies rendues possibles en raison du processus participatif. Entre autres, cela permet à des ménages relativement modestes d’acquérir un logement.
A noter que dans certains quartiers, les futurs habitants choisissent d’investir l’argent économisé dans des équipements collectifs plutôt que de le restituer aux habitants.
– Une grande qualité des espaces libres: davantage de surfaces sont disponibles pour de la végétation et des places de jeu, etc.
Deux aspects posent problème, mais ils ne sont pas insurmontables.
– Obligation légale de créer des places de parc
Cette obligation – ou, dans certains cantons, celle de payer une taxe de compensation lorsqu’on ne crée pas le nombre de places requises par la loi – est un problème central pour la réalisation de quartiers sans voitures. En Allemagne, ces dispositions varient d’un Land et d’une commune à l’autre, comme en Suisse. Mais plusieurs Länder ont déjà modifié leurs lois pour éliminer cette difficulté.
– Engagement à vivre sans voiture
Deux solutions type à ce problème ont été mises en place pour différents projets.
La première solution consiste en un engagement formel des habitants, locataires ou propriétaires, à ne pas acheter de voiture. Des exceptions sont prévues pour des personnes qui, un moment donné, vont avoir un besoin «existentiel» de posséder une voiture.
Dans la seconde solution, les habitants ne s’engagent à rien ; il n’y a tout simplement aucune possibilité de stationner, ni à l’intérieur du quartier, ni dans les environs proches.
Processus participatif et solutions novatrices
Le processus d’élaboration des projets de quartiers sans voitures est l’un des aspects particulièrement intéressants de ce thème. D’une part, l’initiative pour des projets est en général prise par une association. D’autre part, les responsables invitent très tôt des habitants intéressés à se manifester.
Or, toutes ces personnes veulent avoir leur mot à dire dans l’élaboration du projet. Ainsi, les quartiers sans voitures se font presque toujours avec une intense participation des futurs habitants (le revers de la médaille, c’est que cette participation peut rendre le processus compliqué et long).
Elle donne par contre lieu à des solutions novatrices. L’architecture est personnalisée et variée, contrastant avec la monotonie des grands ensembles habituels. Dans tous les cas, les espaces extérieurs sont traités avec soin. Le souci écologique fait partie de la plupart des projets (voir quartier Vauban).
Une alternative à la fuite à la campagne
Dans la perspective d’un développement urbain durable, les quartiers sans voitures sont un modèle d’avenir. Ils permettent de construire dense, tout en offrant une grande qualité de vie. Des familles qui, actuellement, émigrent dans la périphérie, trouvent en ville un environnement idéal pour leurs enfants.
Lydia Bonanomi
Source: http://rue-avenir.ch/
Pour en savoir plus :
www.autofrei-wohnen.de
www.autofrei-wohnen.ch
www.viererfeld.ch
« Une alternative à la fuite à la campagne » : effectivement, j’ai dans mes projets de fuir à la campagne, je n’en peux plus du bruit et de la pollution urbaine dues à la voiture.
Si les quartiers (voire villes) sans voitures pouvaient se démocratiser en France, ce serait vraiment le pied… Et je signerais des deux mains pour y acheter un logement !