Sauvons le fret ferroviaire : éléments de synthèse

Le 14 février dernier, le CCE-SNCF lançait une campagne d’affichage publicitaire pour sauver le fret ferroviaire, ainsi qu’un communiqué de presse relayé par Carfree.

Si le site « Sauvons le fret » n’est pas transcendant en soi, on y trouve tout de mêmes quelques éléments très instructifs relayés dans cet article.

Une campagne invisble

Tout d’abord la campagne publicitaire. « Les affiches seront apposées sur environ 1900 panneaux en France », nous apprend fièrement le site. C’est une campagne hélas très maigre si on la compare à une campagne de publicité automobile classique. Par exemple, Renault, avec sa campagne honteuse « baby boom » en septembre 2009 dénombrait 180 000 affiches en plus des spots TV, radio etc. (source autoplus )
Cette campagne sera donc porobablement peu efficace médiatiqueent (hélas), car avec le maigre budget que le CCE-SNCF a réussi à consacrer, on peut aussi soupconner que les 1900 panneaux ne soient pas non plus les plus visibles du territoire.

Les infos intéressantes du site

Parallèlement à cette campagne, le site « Sauvons le fret » est né, et apporte tout de même quelques informations instructives au sujet du fret en France et dans le monde. Pour cela, CCE-SNCF a fait appel à un cabinet de conseil. Les résumés, présentations et autres joyeusetés sont disponibles sur leur site au volet études.
A première vue, ca ressemble à du consulting-audit-expertise : ca pique les yeux, ca fait du bruit, ca pond des schémas technico-péteux, c’est plutôt optimiste et assez peu transcendant. Mais en lisant entre les lignes et en faisant abstraction du leitmotiv « le fret va s’en sortir d’ici 2020 » qui fait plaisir aux décideurs, la synthèse regorge d’informations vraiment intéressantes sur le sujet!
(Aussi, le discours s’adresse aux initiés du rail et de la logistique avec beaucoup de jargon spécialisé…)

Parmi les infos intéressantes, j’ai relevé ces quelques infos en vrac remarquables:

France :

« Entre 1970 et 2009, le réseau autoroutier concédé est passé de 1000 à 8200km« . (Le réseau autoroutier complet est bien plus dense)
« Entre 1970 et 2008, le réseau ferroviaire (hors TGV) est passé de 36 117 km à 29 900 km. Les investissements routiers représentent 2/3 du total (autant pour les personnes que pour les marchandises). Le fer, selon les années représente entre 12 et 22%, et majoritairement consacré aux voyageurs (TGV) »
Inutile de faire des commentaires sur les choix politiques à propos du transport.

Monde et Europe :

« En 2007, la part modale du fret ferroviaire s’élevait à 45% aux Etats-Unis, à 25% en Chine, à 59% en Russie, à 35% en Inde pour seulement 15% pour l’UE à 15 et 29% pour les 10 nouveaux pays membres (hors Chypre et Malte).

Entre 1990 et 2007, ces zones ont évolué selon trois trajectoires : régression en Chine (de 16 points), en Inde (de 28 points), dans l’UE à 10 (de 34 points) et dans l’UE à 15 (de 5 points) ; stabilisation en Russie et progression aux États-Unis (de 7 points, seule zone à dépasser ainsi en 2007 le niveau de 1970). »

Ici, le cabinet de consulting a comparé de manière pertinente UE, Chine et USA d’un point de vue géographique, car les distances à parcourir d’un bout à l’autre du territoire sont du même ordre de grandeur. Ce qui est plus gênant, c’est l’absence de ‘normalisation du rail‘ en Europe, ce qui rend difficile le fret ferroviaire entre certains pays. Hé oui, tous les rails n’ont pas la même largeur selon les pays. A se rouler par terre non?

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Le GTK

Comme moi, j’imagine que vous ne parlez pas couramment le GTK (Giga Tonne Kilomètre). Le Giga Tonne Kilomètre est l’unité de transport du fret. 1 Tonne.Kilomètre, c’est une tonne transportée sur 1km. Donc le GTK, c’est énorme, ca montre à quel point les pays occidentaux consomment tout et n’importe quoi, surtout si on considère que beaucoup de marchandise chinoise a pour destination les USA et l’UE…)

Par exemple un poids lourd Paris Marseille, c’est 30T transportées sur 1000km environ, soit 30000 TK = 0.00003 GTK. 33 000 poids lourd entre Lille et Marseille, c’est donc 1 GTK.

La synthèse nous apprend que 15% du fret européen représente 437 GTK. En Europe, on transportait donc en 2007 2913 GTK, et 5687 GTK aux USA (Il s’agit uniquement des marchandises transportées sur le territoire, donc les marchandises chinoises destinées aux USA et UE et transportées partiellement en Chine ne sont pas comptées). 2913 GTK, c’est donc 100 millions de poids lourds sur 1000km. Je n’ai pas trouvé exactement dans le document la part réelle du transport routier en Europe. Néanmoins, sur le net on apprend que la part du fret fluvial est de 14%.

Autres infos européennes

En 2008 en Europe, le rail transportait 11% des échanges intracommunautaires (en tonnes-kilomètres), loin derrière la route (46%) et la mer (37%).
La carte suivante, issue du site ‘sauvons le fret’ présente les échanges  au sein de l’UE.

Enfin, la diapo issue de la synthèse du cabinet de conseil présente l’état actuel du fret ferroviaire dans le monde.

En particulier, l’Espagne, premier exportateur de fruits et légumes pourris en Europe, a une part de fret ferroviaire minime!

Conclusion

Ceci est loin d’être une synthèse exhaustive sur le sujet, mais elle donne une bonne idée de l’état actuel des choses en Europe et dans le monde : le camion se taille la part du lion et continue de croître. Inutile d’approfondir sur l’arrivée des ‘monster-trucks’ en France. En un mot, c’est une catastrophe. Ou un désastre, le lecteur choisira.

2 commentaires sur “Sauvons le fret ferroviaire : éléments de synthèse

  1. CarFree

    Synthèse intéressante, merci. Je retiens deux choses:
    – la mondialisation est aberrante (le pot de yaourt qui parcourt 2000 km…) en aboutissant à une explosion des échanges de biens de (sur)consommation. Tout le système est bon à jeter: y a-t-il une obsolescence programmée du capitalisme?
    – la chute du fret ferroviaire est un phénomène historique de grande ampleur, en France et en Europe. Les décideurs ont tout misé sur la route depuis 50 ans, laissant les réseaux ferrés dépérir au profit du developpement autoroutier. Depuis quelques annees, les politiques essayent d’inverser la tendance pour des raisons diverses (pollution, CO2, coût du petrole…), mais la tache est désormais trop immense pour rattraper le retard pris et, en outre, on ne sent pas une véritable volonté politique au-delà des grandes déclarations de principe…:

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