Vinci : quand la corruption tue

Mikhaïl Beketov était journaliste à Khimki, près de Moscou. Il avait dénoncé la corruption entourant le projet d’autoroute détruisant la forêt dans Khimki, et dans lequel est associée la multinationale Vinci. Violemment passé à tabac en 2008, il était depuis paralysé. Il est décédé le 8 avril.

Mikhaïl Beketov, rédacteur en chef du journal La Pravda de Khimki et militant écologiste, est décédé lundi 8 avril 2013 à l’âge de 55 ans.
Le Courrier de Russie

« D’après les médecins, soit il s’est étouffé du fait de problèmes de coordination, soit il est mort d’une crise cardiaque », a déclaré Stalina Gourevitch, l’avocate du journaliste. Mikhaïl Beketov avait été admis dans la journée à l’hôpital, où il devait passer des examens neurologiques. C’est à l’heure du déjeuner qu’il s’est mis à suffoquer. Les médecins ne sont pas parvenus à le réanimer.

Mikhaïl Beketov était propriétaire et rédacteur en chef du journal local La Pravda de Khimki. Dans ses articles, il se faisait notamment le critique de l’administration de Khimki, une banlieue au nord de Moscou. Le maire de la ville était à l’époque Vladimir Streltchenko, un proche de l’ancien gouverneur de la région de Moscou, Boris Gromov.

« Nous avons fait connaissance il y a six ans. Je venais tout juste, alors, d’apprendre l’existence des projets de construction d’une autoroute à travers la forêt de Khimki. Je me suis mise en quête de journalistes susceptibles de s’y intéresser. C’est comme ça que nous nous sommes rencontrés. C’était un bourru de deux mètres qui avait fait son service militaire dans des zones à risques », confie Evgueniya Tchirikova, figure de proue du Mouvement pour la défense de la forêt de Khimki.

Beketov a payé cher la poignée d’articles qu’il avait consacrés à cette déforestation : le 13 novembre 2008, il avait été violemment passé à tabac sur le pas de sa porte par des inconnus. Après être resté inconscient dans le froid pendant plus d’une heure, il a finalement été transporté à l’hôpital où les médecins lui ont diagnostiqué un traumatisme crânien, une commotion cérébrale, une fracture du tibia et de multiples hématomes. Il a passé plusieurs mois dans le coma et a été amputé de la jambe droite ainsi que de trois doigts. Il avait perdu l’usage de ses jambes et de la parole.

Outre ces lourdes séquelles, le journaliste avait fait l’objet de poursuites judiciaires. En été 2010, le maire Streltchenko l’a accusé d’être à l’origine de l’attaque du bâtiment de l’administration communale par des centaines d’anarchistes et d’antifascistes. Le 10 novembre 2010, le tribunal de paix de Khimki avait imposé à Beketov une amende à hauteur de 5 000 roubles (125 euros) pour calomnie. Le journaliste a finalement été acquitté, le 10 décembre, parce que les faits étaient prescrits.

Lire aussi :  L’amende écologique sur les voitures

Ses agresseurs, eux, courent toujours. « Quand j’allais le voir, il me montrait sa main, sa jambe, levait les bras au ciel et me demandait quand la justice allait enfin inculper les responsables. C’était très important pour lui que ceux qui l’avaient attaqué répondent de leurs actes. Malheureusement, il nous a quittés avant de connaître leur identité », s’est attristée son avocate.

Les obsèques se tiendront dans la maison du journaliste. L’endroit où il sera enterré n’a pas encore été déterminé, mais Beketov reposera très probablement dans un des cimetières de Khimki, où ses proches et fidèles pourront venir lui rendre hommage et couvrir sa tombe de fleurs.

Son combat doit continuer
Russie Libertés

C’est avec la plus vive émotion que Russie-Libertés a appris le décès du journaliste et écologiste russe Mikhail Beketov. Les responsables de sa mort doivent être trouvés et condamnés, et son combat doit continuer !

Mikhail Beketov, journaliste et écologiste russe, s’était battu contre la construction de l’autoroute Moscou – Saint-Pétersbourg qui menace de détruire la forêt de Khimki près de Moscou. Il a notamment révélé dans le journal local les soupçons de corruption qui pesaient sur les responsables du projet d’autoroute. Peu de temps après, en novembre 2008, il a été violemment agressé et a passé le reste de sa vie dans une chaise roulante. Son décès est donc un nouveau et terrible symbole des dangers qui pèsent sur les journalistes et les militants de la société civile, notamment les écologistes, en Russie.

Aujourd’hui l’enquête sur son agression est toujours au point mort. Qui sont les responsables ? Qui sont les commanditaires ?

Russie-Libertés rend un vibrant hommage au combat de Mikhail Beketov.
Nous exigeons la vérité, nous exigeons aussi plus de protection et de respect des droits des journalistes et militants qui sont aujourd’hui menacés.

Nous appelons également l’entreprise française Vinci, partenaire dans ce projet d’autoroute, à suspendre sa participation au projet tant que justice ne soit pas faite et tant que le tracé de l’autoroute, tracé anti-écologique et auquel s’oppose activement la population locale, ne soit modifié.

Source : Reporterre

2 commentaires sur “Vinci : quand la corruption tue

  1. Nico

    Merci pour cet article, la mémoire de Mikhaïl doit rester vivante. A vous lire, c’est vraiment un grand homme qui nous a quitté.

  2. Marie Do Vittori

    Bonsoir, A Bastia c’est aussi VINCI CONSTRUCTION TERRASSEMENT qui construit 3 immeubles neufs sur AMIANTE avec des dysfonctionnements graves pour ses ouvriers mais surtout pour les riverains dont je fais partie. J’ai fait établir un constat d’huissier et on verra bien si les juges et les élus feront ce qu’il faut…. C’est horrible tellement ils sont partout, je boycott ce que je sais parking et autoroute (quand je suis ailleurs)…. Mais je suis bien seule et ils ont des milliers de sous traitants….

Les commentaires sont clos.