Propos d’un banlieusard

Le développement considérable de l’automobile n’a pas arrêté et n’arrêtera pas celui de la bicyclette. Dans les grandes villes et leur banlieue, il suffit d’assister à la sortie des ateliers pour constater que les fidèles de celle qui fut autrefois baptisée « la petite reine » sont innombrables.

Il devient donc nécessaire de rétablir partout les pistes cyclables qui assureraient une circulation pratique et sans danger pour les cyclistes, en dégageant les chaussées désormais réservées aux véhicules.

Le Touring – Club de France a pris l’initiative des constructions ou réinstallations de pistes pour lesquelles il a dépensé en deux ans 400.000 francs. Il a terminé celles de la Chapelle au barrage de Pierrefitte; du barrage de Pierrefitte à Luzarches; de la porte de Neuilly au rond-point de la Défense; de Paris à Juvisy, route nationale n°7; de Choisy-le-Roi à la Croix-de-Berny, route nationale 186. Il poursuit des travaux semblables dans les départements du Nord et du Rhône et se propose d’intensifier son action en 1929.

Le conseil d’administration vient de voter une nouvelle somme de 200.000 francs pour les pistes, et la chambre syndicale du cycle et de l’automobile a renouvelé sa subvention de 50.000 francs.

« Nous avons l’assurance, déclarent les dirigeants du Touring, que l’Etat doublera, d’autre part, le montant de ces subventions, comme il le fit en 1928 et que, de la sorte, de nouvelles pistes pourront être construites aussi bien dans la banlieue parisienne que dans les environs d’autres grandes villes où la circulation cycliste peut et doit être facilitée. »

Mais ils s’empressent d’ajouter: « Cependant nous nous rendons bien compte que, malgré nos très gros sacrifices, malgré l’aide des chambres syndicales et celles d’autres groupements, ce n’est là qu’une goutte d’eau dans la rivière. Il faudrait, en vérité, que l’Etat prit entièrement en main l’affaire des pistes cyclables. A vrai dire. Il s’agit là d’un service public considérable dont la charge ne doit pas incomber à nos seules associations. »

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On ne saurait mieux souligner les devoirs de l’Etat en cette matière. L’encombrement des voies autour des agglomérations importantes augmente pour ainsi dire de jour en jour. Il importe de le réduire en utilisant les moyens les moins onéreux et les plus faciles. C’est par une sorte de classement du matériel roulant que l’on parviendra à établir une circulation à peu près normale, en tout cas moins périlleuse. Le passage acrobatique des bicyclettes entre les voitures rapides constitue un véritable défi au bon sens et au légitime souci de la sécurité publique que doivent garder ceux qui en ont la lourde responsabilité.

Presque toutes les grandes routes de France et spécialement presque toutes celles qui aboutissent à Paris comme aux chefs-lieux de nos départements sont larges et munies de bas-côtés spacieux permettant d’établir à peu de frais une piste cyclable et un chemin réservé aux piétons.

Il faut que les départements et l’Etat, au lieu de soutenir l’initiative privée, la commandent, l’entraînent et mettent à sa disposition les crédits indispensables à l’aménagement d’un réseau routier conçu suivant les besoins modernes.

La sécurité des automobilistes, des cyclistes et des piétons dépend de la bonne organisation de ce réseau.

Jean Chataigner
Source: Le Journal – lundi 18 février 1929
Image: Construction la bicyclette
Via https://twitter.com/nassigny

Un commentaire sur “Propos d’un banlieusard

  1. zaph

    Intéressant de lire que le touring club demande à l’état de construire des pistes cyclables après l’avoir fait lui même a quelques reprises lui même.

    Déjà a cette époque, sous prétexte de sécurité, les automobilistes veulent avoir l’exclusivité de l’usage des chaussées construites avec les impôts de tous les citoyens.

    Ils préfèrent voir les « gueux »à vélo sur les bas cotés plutôt que de cohabiter avec eux en devant rouler moins vite.

    Révélateur d’un état d’esprit de prédateur. Etat d’esprit qui perdure encore aujourd’hui

     

     

     

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