Un quartier sans voitures dans Paris

À Paris, rares sont les opportunités concrètes de mettre en place les objectifs du développement durable.

Au printemps 2006, la Mairie du 13ème lancera les appels d’offre en vue d’aménager autour de la Place de Rungis une ZAC (zone d’aménagement concerté) de 3 hectares. C’est une occasion unique d’y réaliser une EcoZAC (une ZAC écologique), un aménagement exemplaire en matièred’environnement, de transports et d’énergie.

En matière de transport, cette ZAC a des atouts

La friche est un ancien terrain SNCF relié à la ligne ferroviaire de la Petite Ceinture qui fait le tour de Paris. Après quelques aménagement mineurs, cette voie serait utilisable pour évacuer les déchets du chantier et l’approvisionner. Une fois construits, les 40’000 m2 de logements et bureaux seront à 200 mètres du futur tramway des Maréchaux. Des lignes de bus et le RER passent déjà à quelques minutes (à pied ou à vélo) du site (plan des transports communs disponibles autour de la place de Rungis). Pourtant, la Mairie du 13ème imagine sa ZAC de façon classique : création de parkings et ouverture de trois voies automobiles traversières pour « désenclaver » la Place de Rungis.

En matière d’énergie, la France se doit d’ériger des bâtiments collectifs exemplaires

Les bâtiments de l’EcoZAC auront pour objectif de produire sur l’année plus d’énergie qu’ils n’en consomment. Les surfaces des toits seront utilisées au maximum pour implanter les énergies solaires. Le site pourrait aussi être équipé en production locale d’énergies renouvelables : une production de courant ou de chaleur à partir de bois ou de biogaz.

Dans le 13ème, les Amis de l’EcoZAC demandent d’aller au-delà du simple cahier des charges HQE qui n’offre aucune obligation de résultat

Les exemples de BedZED ou de Fribourg montrent que cet objectif est réaliste. Une plate-forme d’objectifs concrets a été rédigée, elle est soutenue par quatre associations nationales (Negawatt, , le CLER) et une association de quartier (L’association des Peupliers).

Nos propositions s’articulent autour des axes suivants

1. Empreinte écologique

Un chantier respectueux de l’environnement

Les constructions de la ZAC seront réalisées avec des matériaux de construction propres, et l’ensemble de la démolition et de la construction du site devra être écologique. Un exemple : on pourra effectuer un tri des déchets et les évacuer par le train, la ligne ferroviaire de la Petite Ceinture étant présente sur le site qui est un ancien terrain SNCF.

Une consommation faible et autonome d’énergie

Les constructions de l’EcoZAC de Rungis seront des bâtiments très bien isolés qui utiliseront les apports solaires passifs et l’éclairage naturel. Ils consommeront beaucoup moins que les normes de constructions actuelles le demandent. Ce seront des bâtiments dits basse énergie. Les constructions auront pour objectif de produire sur l’année plus d’énergie qu’elles n’en consomment. Les surfaces des toits seront utilisées au maximum pour implanter du solaire thermique (production d’eau chaude) et du solaire photovoltaïque (production d’électricité). Le site pourra être équipé en production locale d’énergies renouvelables. Au sud de Londres, BedZED produit de l’eau chaude et de l’électricité avec une chaufferie au bois déchiqueté (des copeaux de bois alimentent automatiquement la chaudière). Sur l’EcoZAC, une production de courant ou de chaleur à partir de bois ou de biogaz (gaz des déchets ménagers) pourra être envisagée.

Une gestion harmonieuse des ressources en eau

Les eaux pluviales seront récupérées et stockées dans des citernes souterraines. Ces stocks répondront d’une part aux besoins des jardins et d’autre part alimenteront les chasse d’eau des habitations. Les eaux usées seront nettoyées sur le site par une filtration par les plantes. En fin de cycle, les eaux propres retournent dans les citernes pour alimenter les chasse d’eau. Ce principe est appliqué sur le site anglais de BedZED.

Une gestion locale des déchets

Les habitants de l’EcoZAC, ainsi que les habitants du quartier qui le désirent, pourront composter leur déchets verts sur le site. Ce compostage permettra de fournir de l’engrais aux jardins potagers prévus sur la ZAC, tout comme aux espaces verts. Cela limite les quantités de déchets à évacuer et évite de faire venir des engrais pour entretenir plantations et pelouses.

Une réduction de la place de la voiture

La réalisation des logements devra se faire en prenant en compte tous les transports en commun qui seront disponibles à proximité du site. Ils seront nombreux : tramway des Maréchaux, ligne Météor, lignes de bus, lignes de bus Mobilien et RER. La place de la voiture sera réduite dans l’EcoZAC. La priorité sera donnée au partage de véhicules à propulsion propre (GPL, électrique…) pour les habitants du site et les entreprises travaillant sur l’EcoZAC. En conséquence, le terrain de 3 hectares de la Z.A.C. ne sera pas traversé par des voies à usage automobile comme l’envisage la Mairie du 13ème qui parle de « désenclaver » la Place de Rungis.

Lire aussi :  Une catastrophe parmi tant d'autres catastrophes

2. Insertion socio-économique

Un chantier de réinsertion

Le chantier devra recruter des personnes en réinsertion, logées par différentes associations actives dans ce domaine dans le 13ème (Mie de Pain, Foyer de la Poterne des Peupliers…).

Un support à la formation d’installateurs

Le chantier devra permettre de former divers corps de métiers aux techniques des énergies renouvelables. Ainsi, la pose de panneaux solaires thermiques (pour la production d’eau chaude) permettra de former des plombiers d’Ile-de-France. La pose de panneaux photovoltaïques (pour la production d’électricité) servira à former des électriciens. Une fois l’EcoZAC réalisée, une partie des locaux professionnels pourra être dédiée à des installateurs solaires et à un centre de formation au développement des énergies renouvelables.

Une meilleure prise en compte de la liaison entre habitat et travail

Comme le formule le projet de la Mairie du 13ème, la ZAC comprendra des logements et des bureaux. On veillera à lier habitat et travail et limiter ainsi les déplacements pendulaires. Un exemple : les bâtiments et les jardins de l’EcoZAC auront des gardiens et des jardiniers qui logeront sur le site.

De l’habitat pour tous

L’EcoZAC développera la mixité sociale, la location et l’accession à la propriété. Les bâtiments seront tous accessibles aux personnes à mobilité réduite et une attention particulière sera apportée à la réalisation des jardins, afin d’y faciliter leurs déplacements.

Un outil pour sensibiliser à l’environnement

L’EcoZAC aura pour vocation de recevoir des écoles afin de sensibiliser les enfants à l’environnement et aux énergies renouvelables.

3. Vie du quartier

Des jardins partagés

La ZAC de Rungis comprendra, comme le mentionne déjà le projet de la Mairie du 13ème, des jardins partagés. Il apparaîtrait souhaitable de réserver certains de ces jardins aux enfants des écoles du quartier. Certains potagers pourront être surélevés par rapport au sol, afin de rendre le jardinage possible aux personnes en fauteuil roulant.

Des lieux de rencontre pour le quartier

Pour les entreprises qui auront des bureaux sur le site, des restaurants seront prévus et afin de créer des lieux conviviaux, qui font défaut dans cette partie du 13ème, ils seront ouverts le soir. La cuisine y sera faite sur place. Les livraisons de produits alimentaires pourront aussi approvisionner un magasin de produits frais. De tels lieux de restauration pourraient aussi être des lieux festifs en accord avec le projet de la Mairie de Paris de remettre à ciel ouvert le cours de la Bièvre sur le secteur de la Poterne des Peupliers, proche de la place de Rungis.

Une réappropriation de la mémoire du lieu

Des activités agricoles ont existé par le passé dans le sud de Paris et de l’Ile de France. Pourquoi ne pas en réimplanter sur une partie de l’EcoZAC, afin de réhabiliter le passé maraîcher et agricole de l’Ile-de-France ? Un travail de ce type est réalisé sur le site de BedZED. Exemples de cultures possibles sur l’EcoZAC de Rungis : plantes tinctoriales anciennement liées aux activités de teinture qui existaient le long de l’ancien cours de la Bièvre pour la Manufacture des Gobelins, mais aussi plantations d’arbres fruitiers, de vignes… Ces activités pourront être le support d’événements festifs.

L’enjeu de ce projet, à l’image des exemples de BedZED et de Fribourg, est d’obtenir, par une réalisation inscrite dans une dynamique locale, un effet moteur en matière de développement durable et de construction de bâtiments collectifs écologiques. Par son exemplarité, l’EcoZAC de Rungis doit ouvrir la voie à d’autres réalisations similaires.

Source : http://ecoz.ouvaton.org/