Toulouse: concept pour une ville sans voitures

La transformation de villes existantes en réelles villes sans voitures n’est pas une question facile. Bien que ce serait certainement possible si de vastes travaux de démolition étaient menés, il n’est pas raisonnable de penser que les villes vont simplement être capables de démolir tout l’environnement bâti afin de commencer à construire une nouvelle ville sans voitures. Cela soulève donc la question de savoir comment les villes actuelles peuvent progressivement être transformées en villes sans voitures.

Après avoir étudié les cas des villes de Lyon et de Caen où une simulation de ville sans voitures a déjà été menée, nous nous attaquons à présent à la ville de Toulouse, située en Haute-Garonne. Le choix de la ville de Toulouse est intéressant car il s’agit d’une ville qui possédait au début du 20ème siècle un réseau extrêmement dense de transports en commun avec une multitude de lignes de tramway qui traversaient la ville. Dans les années 60, ce réseau a été détruit au profit de la généralisation de l’automobile: c’était l’époque où l’on croyait que l’automobile était la solution. Très vite, il est apparu que les transports en commun étaient quand même « un peu » nécessaires, Toulouse a alors mis en place des bus et des voies réservées aux bus, avant de construire deux lignes de métro à la fin des années 90.

Toulouse sans voitures
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Voici donc le plan de la ville de Toulouse présentant ce que pourrait être une ville sans voitures. L’objectif de ce plan est de montrer comment créer une ville sans voitures à partir d’une ville existante où l’usage de l’automobile est prédominant, ce qui est particulièrement le cas pour ce qui concerne Toulouse.

Ce concept de ville sans voitures appliqué à la ville de Toulouse maintient les deux lignes de métro existantes (les stations en noir sur la carte) et propose la création de nouvelles lignes de Transports en Commun en Site Propre (TCSP): les stations en rouge sur la carte. Par lignes de TCSP, nous entendons ici principalement des lignes de tramway, ainsi que quelques lignes de métro et de bus en site propre ou bus à haut niveau de service (BHNS), en fonction de la configuration du site. Il conviendrait de rajouter à cette carte le plan du réseau de bus existant, réseau qui aurait pour fonction dans une ville sans voitures de rabattre les voyageurs vers le réseau rapide de TCSP.

L’objectif qui a prévalu lors de la constitution de ce plan était de couvrir la quasi-totalité de la ville de Toulouse ainsi que les communes limitrophes d’un réseau dense de transports publics efficaces. Les cercles situés autour des stations ont un rayon de 300 mètres: n’importe quel point de la ville doit ainsi avoir accès à moins de 300 mètres à pied à une station de tramway, métro ou bus en site propre.

Egalement, le projet de ville sans voitures appliqué à Toulouse a pour objectif de relier en transports publics l’ensemble des zones urbaines: zones centrales denses, zones d’habitat collectif périphériques, zones industrielles et commerciales, principaux quartiers de la ville, lotissements pavillonnaires, etc.

Afin de couvrir l’ensemble de la ville de Toulouse et même au-delà, d’un réseau de TCSP dense où quasiment tout le monde aurait moins de 300 mètres à pied à faire pour atteindre une station, il a été nécessaire de projeter la réalisation de 13 lignes de tramway, métro ou bus en site propre. Ces lignes sont standards dans la mesure où leur longueur varie d’environ 5 km pour les plus petites à 15 km pour les trois plus longues.

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Avec un coût moyen de 20 millions d’euros par km de tramway, on peut estimer le projet à environ 3 milliards d’euros. A titre de comparaison, il faut savoir que le coût d’une autoroute en milieu urbain peut monter jusqu’à 80 millions d’euros par km: c’est le cas de l’A86 par exemple, en zone urbaine et hors tunnel, qui a coûté 80 millions d’euros du kilomètre. Cette autoroute permet de faire le tour complet de Paris à environ une dizaine de kilomètres de la capitale.

On voit par là que le projet de ville sans voitures dont il est question ici revient donc environ à 37 km seulement d’autoroutes!

Egalement, il convient de noter que la France est largement en retard en matière de réseaux de tramway par rapport à ses voisins européens. Même si les chiffres datent un peu, en 1998, l’Allemagne possédait déjà 2836 km de réseaux de tramway contre 400 km seulement en France en 2008! (Source: Transflash n°333, mai 2008)

Le projet de ville sans voitures pour Toulouse a été développé sans connaissance approfondie des conditions locales d’urbanisation et de mobilité, il ne pourrait donc certainement pas être mis en place tel qu’il est décrit sur la carte.

Malgré tout, ce plan donne une idée de ce que pourrait être la conversion d’une ville automobile à la ville sans voitures. Il faut noter également que ce plan ne répond pas au standard d’une ville sans voitures où n’importe quel point de la ville serait situé à moins de 35 minutes de son point de départ, mais il est toujours possible d’améliorer cette situation à partir d’études plus poussées des conditions locales des déplacements.

En outre, certains déplacements en transports collectifs requièrent deux correspondances, ce qui ne répond pas non plus aux standards de la ville sans voitures.

Malgré ses imperfections, ce concept d’une ville sans voitures à partir d’une ville existante montre qu’il est tout à fait possible d’envisager une autre ville, où les transports en commun (métro, mais aussi bus et tramways), les vélos et la marche à pied permettraient de se passer de voiture. Tout est question de financement, mais les sommes colossales accordées au transport automobile depuis des années montrent que l’argent existe et qu’il pourrait être utilisé à autre chose que la construction de toujours plus de routes, d’autoroutes et de parkings.

En travaillant à la fois sur les conditions locales de la ville de Toulouse et de son agglomération, la question de l’organisation urbaine et les standards attendus d’une ville sans voitures, des études approfondies permettraient sans aucun doute de créer une ville sans voitures viable et vivable.

Cet exemple sur la ville de Toulouse (près de 445.000 habitants pour la commune de Toulouse et près de 875.000 habitants pour l’agglomération de Toulouse regroupant 25 communes) montre que la vie sans voitures n’est pas réservée seulement à quelques écoquartiers isolés et limités permettant aux élus locaux de se donner bonne conscience tout en maintenant par ailleurs à bout de bras une civilisation automobile à l’agonie dans le reste de la ville.

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3 commentaires sur “Toulouse: concept pour une ville sans voitures

  1. Wynfo

    Bonjour,

    Votre analyse est plutôt bien faite cependant elle ne prend pas en compte certains paramètres spécifiques à Toulouse comme les zones de travail se situant en périphérie Sud-Est à Labège, Nord Ouest à Blagnac et bien d’autres encore qui occasionne des changements profonds comme l’arrivée du Tramway en 2010 du secteur Arènes vers Blagnac et Beauzelle en passant par l’hôpital Purpan !
    De plus, si vous voulez vous pouvez participer aux assises de la mobilité mise en place par le nouveau maire de Toulouse.

  2. CarFree

    merci pour votre remarque. comme je le dis dans l’article, il s’agit d’une analyse rapide n’ayant pas pour but de résoudre l’ensemble de la question de l’accessibilité au sein de l’agglomération toulousaine, en particulier en ce qui concerne les liaisons habitat-emploi. L’objectif était de montrer la faisabilité de l’approche d’une ville sans voitures à partir d’une ville existante, en sortant de l’éternel mécanique : croissance démographique, développement des infrastructures routières, congestion généralisée, etc. Tout est affaire de choix politique car les solutions techniques et les moyens financiers existent, ils sont juste affectés depuis des décennies au tout-automobile et au tout-routier.

  3. Hugo

    Je suis toulousain et je n’ai que 13 ans mais je voudrais voir ma ville grandir évoluer se doter de tour etc…Voila pourquoi je trouve votre projet FANTASTIQUE et j’aimerais le voir réaliser dans les années qui suivent en sachant par ces temps de crise que cela ne se réalisera pas. Encore Bravo !!!

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