Nous avons l’honneur de publier ici même un rapport de 201 pages qui a fait date dans l’histoire de la mobilité. Ce rapport, réalisé en 1991 par un bureau d’études italien sous la coordination de Fabio Maria Ciuffini s’intitule: « Proposition de recherche pour une Ville sans voiture. »
Ce document a une histoire que nous avons retracé en détail dans cet article. C’est la Commission européenne qui l’avait commandé, afin d’étudier au début des années 1990 la faisabilité technique et économique de villes sans voiture.
Sa diffusion fut limitée, presque confidentielle. Jusqu’à aujourd’hui, il était impossible de trouver le document sur internet, que ce soit en français, en anglais ou en italien. C’est Fabio Maria Ciuffini lui-même qui a pris contact avec nous et qui nous a fourni son rapport au format pdf que nous proposons au téléchargement à la fin de cet article.
Les conclusions dépassent les plus belles espérances du mouvement d’opposition aux abus de l’automobile. Sur le strict plan de la rationalité économique, le rapport en arrive à la conclusion que, selon la densité de l’agglomération, la ville sans voiture coûterait de 2 à 5 fois moins cher que nos cités congestionnées.
L’étude a en effet prouvé que des villes sans voitures dotées d’un nouveau système de transport expressément pensé pour elles, sont non seulement plus vivables à tous égards (tant socialement qu’écologiquement), plus accessibles et traversables en peu de temps, mais elles pourraient être réalisées au prix d’investissements en mobilité nettement moindres que ceux d’aujourd’hui, avec un système de transport moins coûteux à gérer, des économies d’énergie significatives, un plaisir visuel amélioré et une restitution, à chacun de ses habitants, d’une part importante de son temps.
Selon les auteurs, les ingénieurs Fabio Maria Ciuffini et Francesca Ciuffini et l’architecte Aldo Tarquini, la prédominance de la voiture n’est pas fondée sur les lois inexorables du marché, mais sur leur violation, sur l’ignorance par les bilans écologiques des externalités négatives ou l’omission de données positives. Dit autrement, la Ville avec voitures telle que nous la connaissons a pu se mettre en place car le système automobile dans son ensemble a été largement subventionné, que ce soit les routes ou les parkings payés par les contribuables, ou les innombrables nuisances causées par l’automobile et qui ne sont pas payées par les automobilistes, mais par la société dans son ensemble.
Comment avons-nous pu laisser se développer un tel système en dépit du bon sens? En réalité, le système basé sur la voiture a réussi à s’imposer et continue à être en expansion, parce qu’il s’agit du système qui demande la moindre intervention de la part des pouvoirs publics et qui laisse le problème de la mobilité pratiquement à l’intérieur de la sphère des consommations privées. Cela peut paraître contradictoire avec l’affirmation précédente, mais cela ne l’est pas. Même si le système automobile est largement subventionné et qu’il coûte à la société au bout du compte probablement deux à cinq fois plus cher qu’un système urbain sans voiture, il repose principalement sur la sphère privée (constructeurs de voitures et compagnies pétrolières du côté des entreprises et achat privatif de voitures et de carburant du côté des particuliers).
Tout ceci explique également pourquoi un tel rapport est resté quasiment confidentiel. La commission européenne le pressentait dès cette époque, il y a comme une contradiction entre l’idée de promouvoir, pour des raisons de santé publique, d’environnement et d’économies, des villes sans voitures, quand dans le même temps on se veut le défenseur de l’industrie européenne en général et de l’industrie automobile en particulier…
En fait, tout s’est passé comme si face à deux enjeux importants relevant de la politique européenne (le bien-être des gens et les intérêts de l’industrie), la question a rapidement été éludée… au bénéfice de l’industrie automobile.
Et même si l’hypothèse de la construction d’une ville sans voitures se révèle pourtant parfaitement réalisable sur tous les plans, en plus d’être souhaitable en termes de santé publique et d’économies d’énergie, et tout en coûtant moins cher à la société que le système automobile que nous connaissons.
Proposition de recherche pour une ville sans voiture, Tecnoser Roma, Ing. Fabio Maria Ciuffini (Coordonnateur), Ing. Francesca Ciuffini, Arch. Aldo Tarquini, 10/12/1991, 201 pages.
Télécharger le rapport en français au format pdf (47,3 Mo)
Version anglaise – english version (41 Mo)
Version italienne – versione italiana (42,6 Mo)
C’est absolument génial que ce chercheur aie pensé à Carfree pour faire part de ses travaux. Demandez-lui s’il ne veut pas qu’on le dépose sur HalSHS, la plate-forme d’articles en libre accès du CNRS.
je suis prête à le faire s’il donne son feu vert.
oui à l’idéologi€ dominante… :
que l’urbanisme de nos villes européennes soit désormais guidé par les principes de la concurrence libre et non foncée, avec un système automobile désormais débarrassé de ses béquilles phynancières…
je tâche de revenir rapidement après lecture du document/trouvaille…
Pour une meilleure compréhension des calculs, se souvenir qu’un euro correspond à 1936 lires. Mais vu l’inflation depuis l’époque du texte, on devrait avoir une bonne approximation des coûts en euros actuels en divisant les chiffres fournis seulement par 1000 ?
Il est d’accord Anne lise .