On connaissait les routes publiques (nationales, départementales, communales), et les autoroutes à péages (construites et entretenues par des sociétés, globalement publiques, grâce aux recettes des péages). On commençait à connaître également les péages urbains (comme à Londres: taxe payée par les automobilistes pour financer les transports publics). Pour l’instant, c’est illégal en France, mais on sait que tout le monde y pense. Mais, même en France, on connaissait l’utilisation des recettes des péages autoroutiers pour financer les grandes infrastructures, en particulier ferroviaires: le principe avait été établi en 2003.
Mais l’État manque d’argent, et les routes coûtent de plus en plus cher. On pourrait penser qu’il suffit de limiter les dépenses (une piste cyclable coûte moins cher en entretien qu’une autoroute…), mais le choix semble être plutôt de céder les secteurs stratégiques aux grandes entreprises, comme dans n’importe quel pays du Tiers-Monde.
Catalogue des dernières inventions:
- privatisation des sociétés d’autoroutes: ces sociétés sont très rentables, on les vend pour être sûr que les bénéfiques ne vont pas au public. La décision a été prise par le gouvernement de M. Galouzeau de Villepin.
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privatisation de l’entretien des routes publiques (exemple: déneigement de routes départementales par la Société des Autoroutes Paris-Normandie).
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privatisation avec financement par le public: ça s’appelle le “péage virtuel” et c’est énorme. Principe: une société privée construit une autoroute dont les automobilistes ne sont pas prêts à payer le péage, et c’est l’État qui paye le péage en fonction du nombre de véhicules circulant sur l’autoroute. Les automobilistes ne payent rien, ce sont les contribuables qui payent. Cela existe déjà en France, à plusieurs endroits comme à Grenoble ou dans le Bas-Rhin par exemple.
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dégradation volontaire des routes publiques pour assurer la rentabilité des routes privées: ça s’est fait à Lyon (rocade TEO) mais la justice s’est interposée. Peut-être un jour, quand la loi aura été changée.
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le rêve de nos politiciens: le “partenariat public-privé” ou PPP, originaire d’Angleterre. Tant pis pour ceux qui y voient d’abord une cause de corruption massive ou bien un marché de dupe (le public paye, le privé encaisse, les usagers trinquent). Principe: un peu comme les sociétés d’économie mixte mais à plus grande échelle.
Au contraire des infrastructures ferroviaires pas très rentables (des chemins de fer russes à Eurotunnel en passant par Orlyval, ce n’est pas un succès), les routes privées sont rentables puisque c’est l’État qui paye au final, et parfois même l’État qui les a construites.
Me voilà pessimiste encore une fois: non seulement on va continuer à avoir de plus en plus de voies rapides infranchissables à vélo, mais en plus elles seront payantes. Et comme seules pistes cyclables, des circuits fermés avec entrée payante à la journée?
La France est en pointe dans ce secteur: Transdev ou Connex (Vivendi) expliquent en Amérique du Nord l’intérêt de privatiser les transports publics (habituellement gérés par le public là-bas), JC.Decaux a inventé le mobilier urbain appartenant au privé (financé par la pub) et l’a installé dans le monde entier. Mais nous étions déjà bien placés, avec des vendeurs d’eau du robinet (Lyonnaise des Eaux, et Générale des Eaux/Vivendi), ou Évian (qui a su vendre dans le monde entier de l’eau potable à 1000 fois le prix de l’eau potable, juste en collant la photo d’une ville des Alpes françaises).
Michel Julier
Article publié sur la liste de diffusion de la FUBicy