Nous ne sommes pas dupes : le “développement durable” ou “le capitalisme vert” promus, par exemple, lors du “Grenelle de l’environnement”, ne sont qu’une façon de relancer la fuite en avant dans la croissance infinie. Portée par la liste de Daniel Cohn-Bendit, la version ultra-light de la « décroissance » prônant de “scinder les flux entre la croissance économique et la croissance des flux de matière et énergétique” est une ultime escroquerie destinée à vider la décroissance de son sens politique et à récupérer l’avancée de ces thèses dans la société.
Aucune formation politique représentative n’apporte aujourd’hui de réponse crédible face aux enjeux représentés par les crises environnementale ou sociale. En voulant relancer la croissance économique (capitaliste, rouge ou même verte), toutes vont nous précipiter davantage dans le mur des limites des ressources de la planète et engendrer une nouvelle récession. Il est temps de lever le nez du guidon.
Face à l’absence d’une alternative crédible, nous souhaitons la présence de listes “décroissance” pour les élections européennes de 2009. Nous appelons à la constitution de groupes locaux, les plus larges possible, pour défendre :
• Une décroissance qui soit d’abord une décroissance des inégalités, localement, mais aussi à l’échelle de l’Europe comme à celle de la planète. Nous voulons l’instauration d’un revenu minimum et d’un revenu maximum, avec un différentiel maximum de 1 à 4. Puisqu’il n’est plus possible de faire croître le gâteau, la question de sa recette et de son partage redevient première ;
• Une décroissance du transport des marchandises à travers la planète, pour une relocalisation de la production et de la consommation, contre l’“économie de marché” (c’est-à-dire le capitalisme), mais pour une “économie des marchés” fondée sur des petites entités économiques. Nous voulons, par exemple, démanteler progressivement la grande distribution, au profit d’emplois de qualité, écologiques, qui permettent à tous mais notamment aux jeunes de trouver une place épanouissante et qui ait du sens ;
• Une décroissance du gigantisme, pour une société, une économie et des villes à taille humaine, où chacun-e puisse vivre et faire vivre sa famille dans la dignité. Nous voulons une agriculture locale, écologique et paysanne ;
• Une décroissance de la vitesse, dans une société dont l’accélération exclut chaque jour davantage d’entre nous, en commençant par les plus faibles, et nous condamne à une folle fuite en avant. Non au TGV, oui au TER. La civilisation de l’automobile n’est pas soutenable ; nous devons en sortir ;
• La décroissance de la tyrannie de la finance, pour une Europe où chaque démocratie maîtrise sa monnaie. Nous refusons la marchandisation du monde. Nous défendrons et étendrons tous les espaces de gratuité comme tous les temps de pause communs, à commencer par le dimanche ;
• Une décroissance de la déresponsabilisation sur la technique et la science. Nous faisons face à une problématique d’abord culturelle, politique et démocratique. Elle nécessite des réponses sur ces plans. Le nucléaire, les OGM, les agrocarburants ou les nanotechnologies nous conduisent dans des impasses dangereuses ;
• Une décroissance de l’emprise du pouvoir économique sur les médias, pour une presse européenne indépendante exerçant sa fonction de quatrième pouvoir, et non celle d’outil de propagande consumériste ;
• Une décroissance de la publicité, outil d’une propagande insidieuse qui fait de nous des gavés ou des frustrés de la consommation.
Nous voulons une Europe du partage, ouverte sur le monde. Une Europe qui reconnaît ses crimes liés au colonialisme, celui d’hier et d’aujourd’hui. Une Europe de l’égalité dans la promotion de la diversité de ses cultures. Une Europe veillant sur la nature comme on cultive un potager. Une Europe où chacun d’entre nous sera considéré avant tout comme un être humain et non pas un petit soldat de l’économie dont le seul horizon est de consommer et produire chaque jour davantage. Une Europe qui ne soit pas une entreprise dont la réussite se mesure à l’aune de l’augmentation du PIB mais une communauté solidaire chez elle comme solidaire au monde.
Premiers signataires : Paul Ariès, Stéphane Bienvenue, Salih Branki, Remy Cardinale, Vincent Cheynet, Julien Gonzalez, Vincent Liegey, Stéphane Madelaine, Baptiste Mylondo, Christophe Ondet, Thomas Waring, Gwendolyn West, Michel Evrard, Marie-José Narducci…
Très bonne initiative… qui manque de fond cependant! Je m’explique :
Halte au capitalisme : Oui! C’est clairement incompatible avec une économie décroissante. Mais que proposez-vous à la place? Il existe de nombreux systèmes économiques développés par des économistes, qui puissent être mis en place. Le lancement de listes décroissantes impliquent d’avoir un programme politique et économique sans faille. Sinon cela va ressembler au nouveau parti anti-capitaliste de Besancenot… Contre le capitalisme oui, mais que proposer à la place?
Et juste une remarque au passage : L’idée de l’abandon du TGV est, pardonnez moi, franchement débile, celà relève seulement du symbole de la vitesse de notre société pour vous. Mais vous oubliez clairement les chiffres : le TGV ne consomme franchement pas beaucoup plus que les Corails et TER! Et les chiffres sont clairement incomparables à la voiture, même en covoiturage, je ne parle même pas de l’avion que le TGV pourrait remplacer sur tout le continent.
TGV duplex : 3,72kWh/100km/passager (soit 0,383L/100km equivalent diesel)
Corail : 1,92kWh/100km/passager (soit 0,198L/100km eq diesel)
(sources : http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89missions_de_CO2_des_transports_ferroviaires#Trains_de_voyageurs
http://www.voyages-sncf.com/design/commons/media/fr/ecocomparateur_regles_calcul.pdf )
Etant partisan d’une décroissance économique, je suis également pour le TGV, qui permet pour une consommation ridicule de 2MWh/100km (soit 1 éolienne moderne fonctionnant moins d’une heure à pleine puissance…) de parcourir des distances en un temps concurrentiel à l’avion.
Qu’en pensez-vous?J’attends votre réponse.
oui et non… c’est vrai que le TGV reste incomparablement plus efficace en termes énergétiques que la voiture ou l’avion, mais le problème posé du point de vue de la décroissance (à mon point de vue bien sûr!), c’est la relocalisation des activités. La construction de TGV sollicite énormément d’argent et d’énergie pour atteindre cette vitesse élevée, ce qu’Ivan Illich appelait je crois de « hauts quanta d’énergie »… La question posée est peut-être la suivante : à quoi cela sert-il et surtout qui cela sert-il de pouvoir faire paris-marseille en trois heures? Quel modèle économique se cache derrière cette vitesse? des hommes d’affaire ubiquistes, des turbo-profs qui vivent à marseille et travaillent à paris, etc… Bien sûr, c’est un exemple parmi d’autres, mais pour pouvoir satisfaire ce modèle, il aura fallu consacrer une énergie considérable qui aurait très bien pu être mise au service d’un développement massif des TER dans les régions….