L’économie circulaire ou comment tourner en rond

J’ai eu le malheur de me rendre à une conférence de Gregory Giavarina, délégué général de l’institut de l’économie circulaire. Cette conférence est un vrai bêtisier du développement durable (nom d’une rubrique du journal « La Décroissance », justement rebaptisée « bêtisier de l’économie circulaire et de la transition »).

Gregory Giavarina (appelons le Greg car c’est un mec cool) va nous expliquer ce nouveau concept innovant. L’objectif est de découpler la croissance économique de l’épuisement des ressources en créant de la valeur, en innovant, c’est une logique de boucle, nous dit-il. C’est simple, efficace, on n’y avait pas pensé avant, il suffit que le déchet devienne matière première, on réutilise, on recycle, on répare, on arrête l’obsolescence programmée et la planète est sauvée, et puis c’est bon pour le business. Parce que pour Greg, le business, c’est important et grâce à l’économie circulaire, on va avoir un ecobusiness propre innovant qui fait de la croissance.

Venons-en au contenu de cette conférence, Greg nous expose le contexte, les ressources de la Terre (Pétrole, gaz, charbon, uranium) sont limitées, la planète se réchauffe, notre modèle économique en est la cause, il faut réagir! Après cette première demi-heure qui nous fait penser que Greg est un écolo anticapitaliste qui nous amène une solution révolutionnaire, Greg nous ramène à la réalité, c’est-à-dire au capitalisme.

C’est le moment du film qui nous montre l’alternative concrète. Va-t-il nous diffuser « Ne vivons plus comme des esclaves? » Non, Greg est un réaliste. Il nous diffuse un film sur Renault, pas le chanteur mais le constructeur automobile. Renault a déjà le pied (gauche!) dans l’économie circulaire. L’entreprise automobile récupère des pièces automobiles de sa marque en fin de vie qu’elle refond et refait. L’illusion est là, c’est circulaire, on prend ce qui existe déjà et on refait du neuf, le documentaire oublie de préciser avec quelle source d’énergie on fait fondre les pièces, quel pourcentage de la voiture jetée est récupérée, on ne parle que de grosses pièces métal, mais les sièges, les parties plastiques, les déchets électroniques… Disparus!

Ensuite, un intervenant, cadre d’une grande entreprise publique, vient nous parler de l’engagement de La Poste dans l’économie circulaire. Ce monsieur, la cinquantaine, ventripotent, nous fait l’éloge de La Poste qui a plein de nouvelles activités, qui vous livre la papeterie en même temps que le courrier et si c’est demandé gentiment avec le café et les croissants, mais surtout La Poste investit dans le véhicule électrique, elle a déjà une flotte de 25.000 véhicules électriques dans le monde et c’est pas fini! Et il semble trouver ça Super Green. Je n’ai pas vu la circularité mais tout le monde semble trouver ça super green aussi.

Lire aussi :  Conférence "Quand la mobilité dessine la ville"

Et comme l’économie circulaire, c’est aussi citoyen, on a un élu, conseiller régional PACA vert, venu vanter lui aussi l’économie circulaire. Il est content de ce qu’il a entendu et il va en remettre une couche. Pour lui, l’important c’est de créer de l’emploi, et il est content car il a passé son temps d’élu à aider une PME à créer 3 emplois. C’est une PME innovante qui a inventé une machine qui permet de gagner du temps pour enlever les voitures accidentées de la chaussée, et limiter les embouteillages. Alors là, la circularité, j’ai lâché!

Je crois que j’ai compris! L’économie circulaire, c’est la 2e couche de peinture verte qu’on met sur la 1ère appelée développement durable qui commence à s’écailler.

Greg conclut, plein de positivité dans la tête face à toutes ces pratiques innovantes qui font de la croissance et en rajoute une couche. Il prend même l’exemple du vélo, qu’on peut acheter d’occasion sur leboncoin.fr ou sur e-bay.con, qu’on peut réparer soi-même ou faire réparer grâce à des « model-business » très intéressants. Apparemment, il ne connaît pas les ateliers vélo, pourtant sur leur site apparaît dans les adhérents « L’heureux-cyclage ». Quelle déception, marchent-ils dans ce système, se sont-ils fait avoir? Après cette conférence, je les contacte pour leur dire ma surprise et leur conseiller d’économiser le prix d’une adhésion. Ouf, c’est une erreur! Ils ne sont pas adhérents, et s’occupent de suite de demander à l’institut de l’économie circulaire de retirer leur logo du site.

A bas l’économie circulaire! Vive l’heureux cyclage!

9 commentaires sur “L’économie circulaire ou comment tourner en rond

  1. Vincent

    Même l’Heureux cyclage, c’est de l’intox : les pièces de rechange (chambres à air, pneus, patins de frein, chaîne, etc.) sont des produits industriels.

    We’re fucked.

    « Entretien avec Philippe Bihouix : Le mythe du recyclage à l’infini est un leurre en l’état de nos processus industriels, alerte Philippe Bihouix, ingénieur, qui, dans son livre L’Âge des low tech, plaide pour les « basses technologies ». Ou comment « revenir à l’âge des Visiteurs, mais avec le dentiste ».  »

    http://www.dailymotion.com/video/x20m2hy

     

  2. Le Vélo Petit Canard !

    Ah ben oui, justement ils étaient venus faire de la retape à L’Heureux Cyclage, leur cocept jouissant d’une écoute attentive et d’un soutien financier de l’état… Ben oyuais, il y a aussi des greenwashers à L’Heureux Cyclage. C’est un peu comme le tour en tandem d’Alternatiba : ça se drape dans l’écologie, ça fait du crowfonding, ça se prétend « démocratique » mais en fait c’est tout le contraire ! Prochainement sur Carfree et ailleurs je donnerai tous les détails de cette histoire, vous verrez comment l’écologie sert de prétexte au capitalisme le plus débridé !

  3. Jean-Marc

    Oui.. l économie circulaire…

    ou comment faire croire qu’on pourra tjrs continuer à aller dans le mur, sans rien changer, et que cela finira par aller mieux, car on a UN PEU ralenti l allure…

    A l opposé, la décroissance volontaire permet de changer de direction et/ou de rebrousser chemin (achats d occase, dons, location-partage, auto-production, AMAP, moins de viande, de plats préparés et de surgelés, moins de déplacements en voiture/avion, moins d achat de neuf et de jetable, formats ouverts, logiciels libres et OS libres, recyclage, …)

    Vincent,

    L’Heureux Cyclage propose des pièces d usure neuves, mais il propose aussi les même d occase, et pour un prix bien moindre.

    Ainsi, on peut très bien préférer à une chambre à air neuve à 2.20€ neuve, une chambre à air d occase à 20cts, ou une rustine, à 0€

    Ou, on peut préférer un pneu d occase à 2€ à un pneu neuf à 11€.

    D ailleurs, je peux te garantir que, dans l atelier où je vais, les rustines partent plus vites que les chambres à air neuves (les tarifs varient d’un atelier à l autre, chacun étant indépendant).

    Cependant, vu la consommation comparée d’une voiture et d’un vélo d occase (50 fois moins pour le vélo), ta remarque ressemble à une bonne blague… malheureusement, je crains que tu ne sois sérieux.

    Car chaque personne utilisant un vélo consomme et pollue moins que s’il avait fait le même trajet en voiture ou un 2RM, … et ceci, même s’il change toutes ses pièces d usure tous les ans par du neuf.

    Après, on peut toujours faire mieux, mais L Heureux Cyclage PROPOSE des articles d occase.. alors, à part instaurer une dictature pour OBLIGER à utiliser des produits d occase… je ne vois pas trop ce qu’ils pourraient faire de mieux…

    D ailleurs, acheter d occase un vélo en acier, en métal… alors qu’on peut très bien fabriquer son propre vélo, à partir des plants de bambous qu’on a planté dans son jardin, je trouve cela très moyen.

    C est comme acheter un habit d’occase, alors qu’on peut faire pousser du lin, du chanvre, du coton ou de la jute dans son jardin :

    c est produits industriels d’occase sont une course à la dépendance industrielle et capitalistique.

    p.s. n hésite pas à poster une photo de toi, Vincent, j aimerai bien savoir comment tu te déplaces, et -surtout- comment tu t habilles, ainsi que comment tu te nourris, j espère qu’il ne s agit que d auto-productions de ton jardin ou de la forêt et/ou prairie attenantes à ton lieu de vie.

  4. pédibus

    Oui le système tourne bien en rond, et le greenpainting n’y fait rien. On va présenter bientôt comme innovation schumpétérienne la  relique la plus fraîche exhumée de la boîte de survie du système des systèmes :

    – « agriculture raisonnée »

    – phytopharmacie (pesticides pour les cultures)

    – automobile électrique

    – drive commerce convivial et économiseur de mobilité

    – et pour les nostalgiques du Grand Siècle, carrosse à voile…

    Pour ce qui est de la belle entreprise française dont cause Anthony Grégoire, avec son colporteur quinquagénaire ventripotent, organisation qui rappelle Seneukeufeu ou d’autres bureaucraties du même acabit, on ne tarit pas d’auto promotion sur la responsabilité sociale et environnementale de l’entreprise jaune malgré au moins deux détails comme disait l’autre :

    – le trafic courrier et colis est sur les routes et propulsé au gazoil

    – les employés des bureaux de postes  complètement chosifiés et fliqués par leurs kapos et des organismes externes de contrôle (comme les contrôleurs Seneukeufeu je crois…) : ils sont obligés de débiter le même discours à chaque usager (ce qu’une organisation de cons -sommateurs, Que choisir ou 60 Millions, peu importe, avait pu constater il y a déjà deux ou trois ans, avec la proposition commerciale la plus chère) … avec une hécatombe d’arrêts de travail de longue durée dans la communauté des guichetiers ex pétété…

    Allez, pour ceux que le spectacle satisfait complètement je peux leur fournir l’adresse d’un revendeur de décors de Potemkine : ils pourront se rejouer le spectacle ad nauseam…

     

     

  5. Loic

    J’aimerai en rire derrière les vitres teintées de mon 4×4 diesel avec pot catalytique…. mais  » j’y arrive pas » , je reprends mon vélo énervé !

  6. Guillaume

    Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain non plus.

    Bien sur il y a des vautours. qui grâce a l’économie circulaire vont en profiter pour soit vendre leur déchets ou se faire payer pour prendre la matière première. les plus fort font le combo.

    exemple: ils se font payer pour prendre des déchets (terre, bricaillons) et d’un coup de baguette magique (offert ou vendu par l’administration) le transforme en produit et donc le revendent. ainsi ils se font payer 2 fois.

    Mais il y a aussi du bon comme certaines ressourcerie.

     

  7. Anthony Grégoire Auteur

    « il y a des vautours. qui grâce a l’économie circulaire vont en profiter »

    Ils n’en profitent pas, ils ont inventé le concept. L’institut de l’économie circulaire a été fondé par de grands groupes financiers ou industriels. Ce concept ayant pour but la continuité du système productiviste se donne bonne image en intégrant contre leur gré des initiatives comme l’heureux cyclage. Il suffit d’en voir les membres pour ne se faire aucune illusion, industries, collectivités, pôles de compétitivité et dans les associations : écologie industrielle (sic), association de l’aluminium, fondation Nicolas Hulot …

    Un bon exemple d’économie circulaire, les déchets de mine d’uranium pour les travaux de BTP : https://www.youtube.com/watch?v=MkFMzViwaKk

    L’abbé Pierre avec Emmaus ne voulait pas créer un pole de compétitivité mais de la solidarité, l’économie circulaire n’a pour but que de faire perdurer la société de consommation, l’esprit de compétition permanente et la destruction de notre environnement naturel et social.

  8. Jean-Marc

    Merci Anthony.

    Exemple réel « d économie circulaire » décrie par Guillaume :

    des géants des BTP intègrent des déchets ultimes polluants (boues de stations d’épuration, cendres de centrales d’incénirations,…) dans leur bitume :

    vu qu’il y a risque d infiltration et de relargage, elles doivent en mettre très peu, et, comme il ne s agit pas de bitume ni de gravier, les constituant normaux des routes et trottoirs bitumés, ces résidus polluants n ont pas les caractéristiques désirées par les bitumeurs => ils en mettent très peu, mais cela les oblige à adapter leur mélange aux modifications que ces ajouts apporte (avec parfois, un coût et un coût environnemental accrus), si bien que ce n est pas rentable du tout pour eux.

    SAUF, qu’en limitant ces déchets ultimes, en participant à la filière de recyclage, ils reçoivent des aides importantes de la part de l Adème et de l’état : la rentabilité ne vient que des aides.

    Au lieu de taxer fortement les créateurs de déchets ultimes, nos politiques préfèrent payer fortement ceux qui participent à les « éliminer » à les cacher dans le paysage… et après, on nous raconte qu’on n’a plus assez d argent pour les hôpitaux et les écoles…

    (tout est une question de choix politiques : si on taxe plus les pollueurs, alors, cela rapporte de l argent, au lieu d en coûter… mais on ne va quand même pas taxer véolia, bouygue, eiffage, total ou vinci… ce sont des « champions » de notre économie…)

  9. Le Vélo Petit Canard !

    L’affaire Clearstream a démontré comment les grandes entreprises, les banques et les politiques magouillaient pour ne pas payer d’impôts, en dissimulant l’argent, en le reversant en pots de vins à ceux qui leur donnait des législations adaptées à leurs magouilles. Derrière l’institut de l’économie circulaire il y a tous ces escrocs, qui en plus de ne rien verser veulent des « aides » en plus pour continuer leurs saloperies. Sans compter les meurtres qu’ils commettent. Le cas Dassaut mais aussi Balkany, la vente des frégates à Taiwan et le fait que certains magistrats sont bloqués dans leurs enquêtes, empêchant toute Justice réelle, nous indique qu’il n’y a pas grand chose à faire si ce n’est de ne pas être naïf. Perso, je ferai ce qu’il faut pour que l’HC quitte cet institut, et je crois bien que cela mériterait une enquête en profondeur sur leurs façons de « recycler » leurs saloperies. Par exemple, où vont les batteries lithium ? Parce que ce n’est pas recyclable et que la plus grande usine au monde est à la Défense à Paris, soi-disant car il n’y a pas d’usine, juste un entrepôt où arrivent les batteries usagées, stockées dans des containers avant de partir par camions et bateaux pour d’autres destinations sur la planète. Quant on nous parle de « durable » avec ces batteries dont la matière première aura disparu dans 20 ans, il y a du foutage de gueule et ça mériterait un procès, à l’instar de ce qu’a fait Stéphane L’homme au BVP. Mais qui va payer l’avocat ? Combien de temps durera la procédure ? Et au final qui nous garantit l’indépendance des magistrats puisqu’ils sont désignés par l’état, corrompu déjà à fond…? On le voit, on tourne en rond et il faut pourtant sortir de ce cercle infernal !

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