Pour la plupart d’entre nous, René Dumont est l’homme au pull rouge qui a brandi un verre d’eau à la télévision en 1974 en annonçant l’apocalypse. Un fada qui, comme ces fous des villes au Moyen Âge, annonce la peste et fait rire. Ce fada est alors le premier candidat écologiste à une élection présidentielle. C’était il y a 50 ans, René Dumont était alors à la fois un prophète et un visionnaire.
A l’occasion des 50 ans de la première campagne présidentielle du mouvement écologiste, la chaîne de télévision LCP propose en ligne un documentaire sur le candidat René Dumont, « le Géant vert. » En 1974, René Dumont brandissait un verre d’eau à la télévision, un demi-siècle plus tard, la bataille de l’eau fait rage aux quatre coins du monde ainsi que dans plusieurs régions françaises et l’eau du robinet, tout comme l’eau en bouteille, est désormais largement contaminée par les pesticides ou autres polluants éternels.
En 1974, René Dumont a 70 ans et une longue carrière d’ingénieur agronome et de spécialiste international de l’agriculture dans ce que l’on appelle alors le « Tiers-Monde. » Il a parcouru le monde entier et s’est peu à peu converti à l’écologie après avoir été le « premier productiviste de France » dans les années 50. Lui, le professeur de l’agriculture intensive des Trente Glorieuses, se met à penser contre lui-même et critique radicalement le modèle de croissance occidental.
A la mort de Pompidou en 1974, des écologistes pas encore organisés décident de proposer un candidat à l’élection présidentielle afin de bénéficier du temps d’antenne offert aux candidats par l’ORTF à la télévision. Ils vont voir alors René Dumont et lui demandent d’être leur candidat, ce qu’il accepte au bout de 24 heures de réflexion et à la condition de pouvoir parler aussi du Tiers-monde.
Dès lors, la première campagne électorale des écologistes débute avec comme directeur de campagne Brice Lalonde, alors président de la section française de l’association des Amis de la Terre.
Selon les intervenants du documentaire, dès le départ, « ça partait dans tous les sens, c’était pas un programme construit. Son premier ennemi, c’était la bagnole. C’était l’objet typique de la dérive de notre monde. La bagnole, c’était la régression de l’intérêt collectif. C’est l’étalement de la richesse individuelle et c’était en plus l’imposition d’un modèle de développement dans les pays du Sud : « Ayez aussi votre propre voiture, vous serez aussi un individu autonome et libre. »
René Dumont fait sa campagne électorale à vélo, veut augmenter le prix de l’essence, promouvoir l’énergie solaire, le recyclage, stopper le gigantisme industriel et la construction de centrales nucléaires. Le décalage est total avec le programme des autres candidats.
Au-delà de la campagne électorale de 1974, l’intérêt du documentaire est aussi de retracer l’ensemble du parcours de René Dumont et son évolution personnelle depuis le productivisme agricole jusqu’à sa critique du capitalisme et du socialisme soviétique.
René Dumont, géant vert
https://lcp.fr/programmes/rene-dumont-geant-vert-313381