Aux origines de la décroissance

En juillet 2014, le journal La Décroissance publiait un dossier spécial intitulé « Géants d’hier, néant d’aujourd’hui. » En une, ce titre était illustré par des portraits de Simone Weil, Léon Tolstoï et George Orwell, opposés à ceux de Luc Ferry, Jacques Attali et Caroline Fourest. Les pensées de vingt-huit auteurs majeurs pour le mouvement d’idées auquel appartient le journal étaient présentées dans un cahier central stimulant qui invitait à (re)découvrir leurs œuvres et à s’y plonger. Ce numéro a fait date, à tel point qu’il s’est vite retrouvé épuisé. Quelque temps après, afin de donner une pérennité à ces textes forts appréciés, les éditions québécoises Écosociété ont sollicité La Décroissance pour les republier sous la forme d’un livre. L’échappée et Le Pas de côté, complices et déjà co-éditeurs de deux titres construits autour du journal, Vivre la simplicité volontaire et Le Progrès m’a tuer, se sont joints au projet…

La civilisation industrielle ne s’est pas imposée sans résistances. De grands esprits critiques se sont toujours levés contre la liquidation des artisans et des paysans, contre la destruction de l’environnement et le bouleversement des modes de vie, contre l’emprise du marché et des machines sur les individus. La contestation de l’idéologie du Progrès que porte aujourd’hui le courant de la décroissance se situe dans cette longue filiation.

Parmi ces illustres devanciers, les cinquante penseurs présentés ici – dont les œuvres très diverses se déploient sur les deux derniers siècles – ont de quoi alimenter les réflexions actuelles de toutes celles et tous ceux qui aspirent à une société centrée sur l’humain, et non plus soumise à la mégamachine. Leurs pensées, profondes, intemporelles et clairvoyantes, exposées dans ce livre de manière claire et didactique, remettent radicalement en cause le culte de la croissance, l’esprit de calcul, la foi dans les technologies, l’aliénation par la marchandise… Elles en appellent à une sagesse immémoriale : il n’y a de richesse que la vie.

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Parmi les penseurs de la décroissance, il y a bien entendu Jacques Ellul, dont certains écrits devraient interroger tous ceux qui voient dans le progrès technique la solution aux problèmes écologiques: « S’intéresser à la protection de l’environnement et à l’écologie sans mettre en question le progrès technique, la société technicienne, la passion de l’efficacité, c’est engager une opération non seulement inutile, mais fondamentalement nocive. »

Cet ouvrage est plus que jamais nécessaire au moment où Emmanuel Macron devient président, car celui-ci déclarait le 9 février dernier: « Être écologiste aujourd’hui c’est se préoccuper d’avoir une vraie croissance. […] Je ne crois pas à la décroissance. »

Edward Abbey, Günther Anders, Hannah Arendt, Georges Bernanos, Murray Bookchin, Albert Camus, Edward Carpenter, Cornelius Castoriadis, Bernard Charbonneau, Jean Chesneaux, Gilbert Keith Chesterton, Barry Commoner, Ananda K. Coomaraswamy, Guy Debord, Lanza del Vasto, Jacques Ellul, Pierre Fournier, Michel Freitag, Gandhi, Patrick Geddes, Nicholas Georgescu-Roegen, Jean Giono, Paul Goodman, André Gorz, Alexandre Grothendieck, Michel Henry, Aldous Huxley, Ivan Illich, Robert Jaulin, Stanley Jevons, Leopold Kohr, Gustav Landauer, Christopher Lasch, Ned Ludd, Dwight Macdonald, Herbert Marcuse, William Morris, Lewis Mumford, George Orwell, François Partant, Pier Paolo Pasolini, John Cowper Powys, Majid Rahnema, John Ruskin, Ernst F. Schumacher, Jaime Semprun, Rabindranath Tagore, Henry David Thoreau, Léon Tolstoï, Simone Weil.

Livre collectif, coordonné par Cédric Biagini, David Murray et Pierre Thiesset. Illustré par Stéphane Torossian. Co-édition L’échappée/Le Pas de côté/Ecosociété.

Aux origines de la décroissance
Cinquante penseurs

Coordonné par Cédric Biagini, David Murray et Pierre Thiesset
Co-édité avec Le Pas de côté et Écosociété
Dessins de Stéphane Torossian
300 pages | 16,5 x 22,5 cm | 2017
20 euros | isbn 978-23730901-7-8

Un commentaire sur “Aux origines de la décroissance

  1. Boris D

    Le législateur a bien vu un lien entre « transport collectif gratuit » et pratique du vélo, au travers de l' »indemnité kilométrique vélo », puisque le décret n° 2016-1184 du 31 août 2016 instituant à titre expérimental une IKV pour les agents des ministères du développement durable et du logement ainsi que de leurs établissements publics – et qui pourrait préfigurer une extension à l’ensemble de la fonction publique – prévoit que ce décret n’est pas applicable (article 9 alinéa 5) lorsque l’agent bénéficie d’un transport collectif gratuit entre son domicile et son lieu de travail.
    Mettant en pratique le bon vieux principe « on ne paie par 2 fois la même chose »… la chose étant le trajet domicile-travail…

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