Manger du pneu

Comme l’a dit le président Macron, en France on aime la bagnole. Et il ne croyait pas si bien dire, car en fait on l’aime tellement la bagnole qu’on finit même par la manger. Il apparaît en effet qu’on trouve désormais assez largement des résidus de pneus dans les légumes et donc dans les assiettes…

Les pneus des véhicules routiers et en particulier des voitures sont une véritable catastrophe écologique. On savait déjà que les pneus et les plaquettes de frein des voitures produisent des microplastiques nocifs ou qu’on tue nos enfants en utilisant des déchets de pneus pour faire du gazon synthétique pour les terrains de football.

On savait aussi que pendant longtemps les industriels balançaient à la mer les vieux pneus pour faire des « abris pour les poissons » comme dans le sud de la France par exemple. Ces « récifs artificiels » de pneus sont même devenus avec le temps un désastre écologique.

Aujourd’hui, on découvre que le problème est sans doute encore plus vaste. Il apparaît en effet que les microplastiques provenant de l’abrasion des pneus sur les routes terminent très largement dans la nature et dans la chaîne alimentaire. En clair, on mange du pneu!

En Suisse, l’abrasion des pneus est la plus grande source de matières plastiques, en particulier de microplastiques, dans l’environnement. Les résidus d’abrasion des pneus se composent approximativement de 60 % de caoutchouc (également une matière plastique), de 30 % de suie utilisée comme matière de remplissage et de 10 % de substances inorganiques (métaux lourds tels que le zinc).

Les résultats calculés pour la Suisse indiquent que plus de 13 500 tonnes de résidus d’abrasion des pneus sont générés chaque année dans le pays. On n’ose pas imaginer la quantité phénoménale de résidus d’abrasion des pneus que l’on peut trouver en France quand on sait que la Suisse est plus petite que la seule région Auvergne-Rhône-Alpes… Sur ces 13 500 tonnes de résidus, près de 40 % (5500 tonnes env.) sont emportés sur de vastes distances et pénètrent dans les sols sous la forme d’apports diffus. Les 60 % restants (8000 tonnes env.) se retrouvent drainés et, sur cette quantité, quelque 4600 tonnes sont retenues dans les différents systèmes d’évacuation des eaux.

Evidemment, ces particules nocives se répandent dans les champs au gré du vent et de la pluie. Or, on sait désormais que la pollution plastique menace aussi les plantes (et au passage, notre alimentation).

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Une étude parue dans Nature Nanotechnology en 2020 ajoute une nouvelle conséquence désastreuse à la pollution plastique en démontrant que c’est bel et bien la biodiversité dans son ensemble qui est menacée par les micro et nano plastiques.

Ces travaux de recherche montrent en effet que les plantes absorbent de très petites particules de plastique par leurs racines. Ces particules finissent par s’accumuler au sein des plantes touchées. « L’accumulation de nanoplastiques chez les plantes peut avoir à la fois des effets écologiques directs et des implications pour la soutenabilité agricole et la sécurité alimentaire », écrivent les chercheurs en introduction de leur papier.

Récemment, le magazine suisse Bon à Savoir, un magazine spécialisé dans l’information et la défense des consommateurs en Suisse romande, a fait réaliser par un laboratoire des tests sur des salades vendues dans la grande distribution. L’article est payant, mais il apparaît que dans la majorité des cas, les salades étaient contaminées par des résidus d’abrasion des pneus de voiture.

A ce stade et faute d’études approfondies sur le sujet, il est difficile d’appréhender l’impact réel pour la santé, il y a en effet la question de la quantité admissible de microplastiques pour l’organisme, mais on se doute bien que cela ne doit pas être spécialement bon pour la santé. Rien que le fait de se dire qu’on mange du pneu pose quand même un peu question…

Il faut également rappeler que ces microplastiques sont réputés pour la plupart cancérigènes et allergènes et peuvent également avoir un impact sur la fertilité.

C’est aussi un sujet intéressant dans le cadre du développement prévu de la voiture électrique. On nous vend l’idée que la solution aux nombreux problèmes de pollution de la voiture thermique serait la voiture électrique. Or, jusqu’à preuve du contraire, les voitures électriques ont aussi des pneus et pour la santé, manger du pneu de voiture électrique ne risque pas d’être vraiment meilleur que du pneu de voiture thermique…

4 commentaires sur “Manger du pneu

  1. pedibus

    et qu’ils ne nous disent pas, nos ami-e-s bagnolard-e-s, qu’on pneu pas faire autrement… et bien sûr, toujours avec leurs arguments à la gomme…

    pas boaaaa du trou c’t’affaire, j’vous l’dit moaaaaaaa…

     

  2. Joffrin

    ‘Dura lex, sed lex’ :

    https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/09/25/normes-antipollution-les-europeens-cedent-aux-arguments-de-l-industrie-automobile_6190961_3234.html

    Le titre initial, en version papier : « L’UE renonce à durcir les normes antipollution »

    En fin d’article : « quelques avancées… » et pour la première fois, « des limites aux émissions de particules provoquées par l’usure des freins et des pneus » (concerne l’électrique donc). Pascal Canfin est fier du texte : il est optimiste sur la vertu des constructeurs.

    Dernière phrase : « Ce texte est ‘un désastre pour la qualité de l’air », dixit une ONG. Depuis quand les ONG dirigent l’UE ? Non mais !

    Tout le pouvoir aux soviets !

    Tu as voté, et bien tu l’as bien profond dans les poumons.

     

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