Le professeur Jean-Paul Morin, de l’Inserm de Rouen (Institut national de la santé et de la recherche médicale), était l’invité d’un débat sur l’avenir de l’automobile, le 26 mai 2009 à Saint-Romain-De-Colbosc (Haute-Normandie). Débat au cours duquel il s’est livré à un véritable réquisitoire contre l’automobile et ses (trop) nombreux polluants, rappelant au passage que les premières victimes de la pollution automobile sont les automobilistes et les passagers de leur voiture.
La technologie a ses limites
«La pollution est la plus concentrée à l’intérieur des véhicules; les élus et le Grenelle ne tiennent pas compte de la pollution par les particules et le NO2 et ne considèrent que le CO2 (gaz à effet de serre) ; les constructeurs automobiles cherchent de nouveaux moteurs, pour abaisser la production de CO2, mais sans se préoccuper beaucoup des autres polluants émis que chaque passager de voiture reçoit lorsqu’il roule derrière un véhicule diesel ; l’Europe prévoit des normes bien plus strictes pour les années à venir pour les futurs moteurs mais la technologie à ses limites. »
Telles sont quelques-unes des informations livrées, mardi dernier à la salle des expositions de Saint-Romain-De-Colbosc, par le professeur Morin, de l’Inserm de Rouen.
On parle en effet à juste titre beaucoup des émissions de CO2 de l’automobile du fait de l’impact de ce Gaz à Effet de Serre (GES) sur le réchauffement climatique. Mais on parle beaucoup moins des nombreux polluants émis par les voitures, d’autant plus que les constructeurs automobiles réalisent depuis plusieurs années un véritable lavage de cerveau sur ce thème en faisant croire au public que le problème est quasiment réglé ou en voie de l’être, grâce à la technologie et aux innovations techniques (Filtres à particules, pots catalytiques, etc.)
D’une part, il apparaît que le problème est loin d’être réglé, les voitures d’aujourd’hui les plus récentes émettent de nombreux polluants. D’autre part, deux études récentes menées à Paris et Toulouse montrent que l’habitacle des voitures concentre les polluants.
En effet, l’automobiliste au volant de son véhicule ainsi que ses passagers sont les plus exposés à la pollution de l’air. Ces résultats mettent à mal des idées reçues selon lesquelles les automobilistes seraient “protégés” de la pollution par l’habitacle de leur voiture, à la différence des piétons et des cyclistes. En fait, il n’en est rien, bien au contraire, l’habitacle des voitures concentre les polluants, à la fois du fait de son exiguïté et de la nature même de la circulation automobile (congestion, attentes aux feux en file, etc.).
Autrement dit, transporter son bébé à l’arrière de sa voiture dans un siège enfant, c’est un peu comme lui donner à fumer une cigarette!
Une autre étude, menée par la Fédération Inter-Environnement Wallonie, arrivait déjà aux mêmes conclusions en montrant que l’endroit le plus pollué (tous lieux confondus) était la voiture!
Encore plus inquiétant, il apparaît désormais que les pots catalytiques, sensés limiter la nocivité des gaz d’échappement des véhicules motorisés, polluent en fait les eaux de toute la planète… Quand la technologie sensée limiter la pollution provoque encore plus de pollution…
Enfin, des cartes rendues publiques à la fin de l’année dernière montrent le lien entre pollution et trafic automobile: Pollution automobile, les cartes qui font peur. Où l’on voit que la pollution en ville se superpose parfaitement aux axes de trafic automobile…
Dans ce contexte, le CO2, problème récurrent et très médiatisé de l’automobile, apparaît seulement comme un des nombreux impacts négatifs de l’automobile. Et il faut rappeler une fois de plus que l’automobile est aussi et surtout un problème de santé publique, du fait des polluants émis en quantité dans l’atmosphère et des milliers de morts par an (en France) du seul fait de la pollution automobile, sans même parler des accidents de la route qui provoquent eux aussi morts, blessés graves et handicapés à vie!