Tata Nano: un cauchemar social et environnemental

Le groupe Tata vend « la voiture la moins chère du monde » à 1500 euros!

Depuis le temps qu’on le dit que l’automobile est en train de détruire la planète… le coup de grâce pourrait bien venir d’Inde où le groupe industriel Tata Motors propose la “voiture la moins chère du monde”, la “Nano”, qui a tout de la voiture ultra low-cost.

La Nano avait été présentée une première fois en janvier 2008 à New Delhi. Elle doit être présentée une deuxième fois, en mars, au Salon de l’Automobile à Genève, dans une version européenne. Tata Motors vient d’annoncer la date officielle de commercialisation de la Nano. Ce sera en avril prochain après le lancement officiel prévu le 23 mars.

Rappelons que la fabrication de la Nano a fait l’objet d’un long feuilleton en Inde où des paysans expropriés se sont opposés à l’installation de l’usine Tata au Bengale (photo). Ce conflit a retardé de six mois le démarrage de la production de la Nano qui sera désormais fabriquée dans l’Etat du Gujarat, à l’ouest du pays.

La version de base de la Tata Nano sera vendue en Inde aux alentours de 1500 euros, soit 200 euros de moins que ce qui était prévu à l’origine par le constructeur indien. A ce prix-là, autant dire que les ingénieurs indiens ont raboté les coûts de toutes les pièces. Exemple: le compteur kilométrique analogique a été préféré au numérique, plus précis, mais jugé superflu. Il ne faut pas compter non plus avoir un freinage ABS, une direction assistée ou un lève-vitre électrique…

L’objectif est clair, doter à terme chaque indien, du moins ceux appartenant aux classes moyennes, d’une voiture Tata! Le problème, c’est que la classe moyenne en Inde représente quand même 300 millions de personnes… Même si le taux de motorisation indien (nombre de voitures par habitant) est encore très faible, aux alentours de 8 voitures pour 1000 habitants (à comparer aux 600 voitures pour 1000 habitants en France), les marges de progression sont énormes. Déjà, le taux de motorisation indien a ainsi été multiplié par trois entre 1985 et 2002.

Un cauchemar pour l’environnement

Le constructeur automobile indien table sur 500.000 ventes les premières années pour atteindre ensuite l’objectif d’un million de véhicules vendus par an, ce qui doublerait la production annuelle de l’Inde en matière de voitures (elle est actuellement en 2006 d’environ 1,1 millions de voitures par an). Baptisée « voiture du peuple », la Nano est équipée d’un moteur de 624 centimètres cubes, la cylindrée d’une moto.

Lire aussi :  Le Tour de France de la bagnole

Cet objectif audacieux comporte de très gros risques pour l’environnement. Rajendra Pachauri, président du Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat, a déclaré que la Tata Nano allait devenir un cauchemar pour l’environnement. Egalement, la Nano ne devait au départ pas être commercialisée en Europe pour des raisons de conformité aux standards européens en ce qui concerne la sécurité, la pollution et les émissions de CO2. En fait, il y aura bien une version européenne de la Nano, proposée à la vente pour 5.000 euros, sans doute le prix de la mise en conformité aux normes européennes plus un profit probablement non négligeable…

Pour Anumita Roychoudhury, du Centre pour les sciences et l’environnement, à New Delhi, cette tendance de la voiture low-cost est une “bombe à retardement”. “Lorsque vous baissez aussi fortement les prix, comment pouvez-vous parvenir à respecter les normes de sécurité et de pollution?”, a-t-elle déclaré dans un entretien à The Observer, précisant à Reuters: “Ce n’est absolument pas viable, d’un point de vue environnemental comme en terme de congestion du trafic.”

La bagnole à 1.500 euros va désormais envahir les pays en voie de développement accéléré, comme l’Inde et la Chine par exemple. A 5.000 euros, elle risque bien aussi de rafler la mise dans les pays occidentaux face à des constructeurs complètement dépassés et proches pour certains de la faillite. Des licenciements sont encore à prévoir dans l’industrie automobile… En effet, si des constructeurs comme Peugeot ou Renault n’arrivent déjà pas à faire de profits sur leurs petits modèles, l’arrivée de la Nano risque bien de les achever.

En bref, la Nano semble préparer un cauchemar social et environnemental. A ce prix-là, la voiture devient accessible au plus grand nombre… un petit pas pour la démocratie et un grand pas pour la destruction de la planète…

Voir aussi: L’automobile détruit la planète

4 commentaires sur “Tata Nano: un cauchemar social et environnemental

  1. yongho

    Par curiosité, quel est l’empreinte annuelle au niveau pollution d’un français moyen équipé d’une Mégane … Je parle de toute la pollution générée par ce français, hein. Voiture, loisirs, boulot etc …
    Et celle d’un indien moyen équipé d’une Tata Nano ?
    Question subsidiaire … Si par hasard c’est le français le plus pollueur (comme je le pressens), est-ce que ce sera à lui que l’on demandera de se calmer ? Ou au propriétaire de la Tata, coupable de plus polluer qu’une Mégane bien de chez nous ?

  2. CarFree

    d’un point de vue individuel, tu as tout à fait raison: si un français pollue plus que vingt indiens, il semble que cela soit à lui de se « calmer » en priorité… mais d’un point de vue collectif, les 60 millions de « gros cochons de pollueurs » français ne pèsent pas lourd par rapport à la pollution engendrée par 1 milliard d’indiens roulant en tata nano… comme quoi, rien n’est simple…

  3. Pimousse3000

    A ce sujet,
    Tous les journaux en parlent aujourd’hui, hélas de manière élogieuse! « Une prouesse technologique à ce prix » est le genre de phrase qu’on retrouve le plus souvent. Ne parlons même pas du Figaro qui plaint presque Tata à cause des retards (si parlons en : « En cause, les interminables querelles de Singur, situé près de Calcutta, d’où devait sortir la Nano. Alors que Tata Motors avait quasiment achevé la construction des usines – un investissement de 350 millions de dollars -, le groupe a fini par quitter Singur »)

    Le seul article intéressant que j’ai trouvé est dans Challenges où on parle des problèmes humains causé par l’usine, mais encore trop peu de la castastrophe écologique que cela va créer!

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