À nous de vous faire préférer la bagnole

Tout le monde se rappelle sans doute de l’ancien slogan de la SNCF, « à nous de vous faire préférer le train« . Le nouveau slogan de la SNCF pourrait être aujourd’hui: « à nous de vous faire préférer la bagnole… » Une campagne publicitaire récente pour une voiture dans les gares SNCF se moque ouvertement du train en tant que mode de déplacement. La SNCF accepte donc, pour toucher de l’argent, que des annonceurs publicitaires discréditent dans les gares son activité principale, qui consiste jusqu’à preuve du contraire à faire circuler des gens dans des trains.

La publicité et l’automobile ont ceci de commun qu’elles occupent l’intégralité de l’espace public. Où que l’on porte son regard, on trouve soit des publicités, soit des voitures. Et très souvent, ce sont des publicités pour les voitures. L’industrie automobile est d’ailleurs le principal secteur d’activité utilisant la publicité.

Et comme l’industrie automobile doit aller chercher le client « avec les dents », pourquoi ne pas faire de la pub pour des voitures directement dans les gares SNCF, ces lieux remplis de gens qui se déplacent, les malheureux, sans voiture?

Et pour être sûr que le message passe bien, autant en profiter pour dénigrer le train!

Cette campagne de publicité se trouve actuellement dans plusieurs gares SNCF, apparemment au moins la gare Lille Flandres et la gare Montparnasse, mais probablement beaucoup d’autres gares vu que l’exploitation des panneaux publicitaires de l’ensemble des gares françaises relève du même marché.

Si on suit le message, le train c’est contraignant (horaires, destinations, etc.) alors que la voiture c’est bien sûr la liberté!

Sauf que, à trop forcer le trait, on finit pas s’emmêler les pinceaux… Selon le constructeur de voitures, « les seuls bons horaires sont ceux qu’on décide »: jusqu’à preuve du contraire, on décide justement en train de ses horaires de départ et d’arrivée, ou du moins on les maîtrise relativement précisément, à la minute près (tant que le train est à l’heure…). Alors qu’en voiture, on ne maîtrise pas vraiment ses horaires de départ (qui n’a pas été obligé de se lever à 4 heures du matin lors d’un départ en vacances pour éviter les bouchons?) et encore moins ses horaires d’arrivée…

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Pour l’autre slogan, « à toujours suivre la même voie, on arrive toujours au même endroit », il est censé probablement moquer une certaine forme de conformisme de l’usager de train qui n’a pas le choix de la voie empruntée par le train. Alors que l’automobiliste, lui, est un aventurier qui a le choix de sa voie, et donc de la route qu’il emprunte… C’est assez piquant d’imaginer le choix phénoménal de l’automobiliste parisien qui part l’été en vacances dans le sud: est-ce que je prends l’A7 ou les départementales? C’est bizarre, les automobilistes qui ont le choix prennent en général tous l’A7, et c’est bien pour cela qu’elle est bouchée…

Mais le meilleur slogan est sans doute le dernier: « Ne prenez que des allers simples ». Le sous-entendu est énorme, car il montre que ceux qui ont réalisé la campagne de pub ne connaissent rien au train. Pour les publicitaires, en train, on est sans doute obligé de prendre un aller-retour. A la SNCF, l’aller-simple n’existe pas. Alors qu’en voiture, bien sûr on a le choix, on peut faire des allers simples du type « je pars avec ma bagnole à Saint-Tropez et je la laisse là-bas à la fin des vacances… »

C’est bizarre, mais c’est en fait l’inverse exact de la pub qui est vrai: en voiture, on ne fait que des allers retours. Alors qu’en train, on peut faire justement si on le souhaite des allers simples et revenir de n’importe quelle autre manière…

22 commentaires sur “À nous de vous faire préférer la bagnole

  1. piétons de Marseille

    J’ajouterai que cette voiture garée sur le trottoir est une insulte aux piétons ! aux autres quoi !

  2. struddel

    Très bon article, et la pub autant que la SNCF sont affligeantes…

  3. geroges

    c’est vraiment scandaleux, mais dans la lignée de la politique de la sncf, qui promeut la bagnole pour se débarrasser de ses lignes pas rentables mais utiles en les coulant encore plus

  4. emmp

    L’allusion à l’aller simple pourrait même être interprétée comme une fausse pub anti-ouature : il suffirait de remplacer l’image par celle d’un accident grave sur fond de cimetière…
    La direction de la seuneuceufeu a vraiment des idées et des attitudes affligeantes. Je ne connais pas d’autres services qui militent si ouvertement contre eux-mêmes.

  5. Laurent Rayssiguier

    Je comprends surtout aller simple dans le sens difficulté, pas comme un demi  aller retour 😉

    La voiture évite de chercher le bon billet, la bonne destination etc…

    C’est  balaise que la sncf accepte la pub.

  6. Grob

    On a aussi statistiquement plus de chance de ne pas revenir d’un voyage en voiture plutôt qu’en train. « Aller simple ».

  7. Vince

    Etonnant que la SNCF n’utilise pas son espace public pour sa propre pub, voyons, que pourrait-on imaginer, ah oui des images d’embouteillages, des images d’accidents : « avec le train je suis sûr de pouvoir faire le retour », des images de pollution, des images de travaux, etc…

    Bref trop facile. On pourrait donner ça à un stagiaire de 3ème dans les agences de pub.

     

  8. pedibus

    ça me pèle de plus en plus fort de voir les Teutons et les Chuisses nous racheter ce tas de ferrailles – au même prix – qui nous tient lieu de service des chemins de fer français…

    décidemment rien ne marche (!) dans cette boîte  de merdre, au point que ça pourrait même faire avorter la mère Ubu…

    pas boaaa du tout cette affaire…

  9. abil59

    C’est certain pour financer la mise en place du nouveau naming du TGV haha. SNCF: société nationale de la cachexie ferroviaire…

  10. sleipne

    effectivement, la pub sur l’aller simple, je l’ai pas du tout compris 🙂

  11. Rémi

    Je me souviens de Guillaume Pépy, président de la SNCF, qui posait publiquement la question de la légitimité de la ligne de train Quimper-Brest, parce qu’elle longe une voie express.

    J’attends toujours qu’un responsable de cette voie express se pose la question contraire.

  12. The Flying Dutchman

    En même temps, au vu de la qualité de service offerte par la SNCF, de l’amabilité de ses agents et de sa politique train+vélo, effectivement, il vaut mieux prendre sa voiture…

    Pas la même en Suisse ou en Allemagne où, par exemple, l’on sait sait déjà sur son billet sur quel quai sera le train, même avec 4 correspondances… Le site de la DB est plus au courant des trains circulant en France que la SNCF…

  13. Vince

    « En même temps, au vu de la qualité de service offerte par la SNCF, de l’amabilité de ses agents et de sa politique train+vélo, effectivement, il vaut mieux prendre sa voiture… »

    C’est vrai qu’en voiture on profite de l’amabilité des autres conducteurs, on bénéficie de services bon marché (péages) et de politique de gestion des embouteillages d’une grande efficacité.

     

     

     

  14. Axelos

    Suite aux quelques expériences vécues en voyageant en train équipé de mon vélo, je confirme qu’il faut être bien téméraire.

    Un exemple l’année dernière dans un TGV, on paye la place de nos vélos respectives, mais finalement devant le train on nous dit que le wagon ou devraient être stockés les vélos est rempli … Ensuite il a les escaliers pour accéder aux quais, sans rampe évidement et des ascenseurs trop petits, et encore de nombreux trains ou la porte est étroite et le niveau du sol est bien différent du quai. Les bus de connexion à cause de gares récentes placés au milieu de la nature, ou le vélo y est tout simplement interdit.

    La voiture, il suffit d’avoir un porte vélo, et c’est bon.

  15. Serious DD

    Le seigneur donne, le seigneur reprend.

    Tout comme la « gauche » a voulu casser le code du travail la SNCF va détruire le transport ferré en France. Ils le font sciemment et en se cachant à peine.

    J’achète un billet de train, SNCF m’envoie un mail pour me proposer de louer une voiture. Ca donne envie de vomir.

  16. JP CASSOU

    « Si on suit le message, le train c’est contraignant (horaires, destinations, etc.) alors que la voiture c’est bien sûr la liberté! »

    En tant que spéléologue, force est de constater que la bagnole est un outil indispensable pour se rendre sur les sites de pratique. Vous imaginez-vous à faire le trajet domicile – point de départ du sentier d’approche en vélo avec 30 kg de matos sur le dos ? Je pratique la spéléologie en carrière sur Bordeaux (topographie) et le simple trajet à vélo de 30 km AR avec un sac de 10 kg sur le dos est pour moi tellement pénible (et pourtant c’est essentiellement du plat) que j’ai adopté un format de séance topographique de 12 à 15 heures, avec matériel topographique en double, vivres, batteries et même un ordi portable pour transférer les données de terrain.

    En tant que vacancier, j’aime passer mes vacances en montagne sous le format suivant:
    – Location d’une base-vie (camping, gîte rural)
    – A partir de cette base-vie, excursions, visites de cavités, randonnées. Pour atteindre ces lieux de pratique, un véhicule motorisé est indispensable.

    J’ai horreur des voyages, tous modes de transport confondus, et tout déplacement est pour moi un facteur de stress, mais je suis obligé de composer avec puisque la téléportation est du domaine de l’imaginaire.

    Les dysfonctionnements récurrents des systèmes ferroviaires et aériens m’ont dégoûté des voyages, et par expérience, pour le moment, la voiture individuelle est le mode de transport le moins pénible (je n’ai pas dit que j’aimais la bagnole)

    Parce que force est de constater qu’il est difficile de remplacer la voiture (ou la moto) individuelle parce que ce mode de transport n’a pas d’avantages, il a des atouts:
    – Liberté totale du planning: en bagnole, je pars quand je veux
    – Je peux improviser une virée spéléo le WE, alors que la planification d’un simple trajet AR en train ou en avion relève désormais de de la préparation d’une mission spatiale.
    – Je peux transporter mon matériel (et même dormir si nécessaire dans mon véhicule)
    – Le rayon d’action est quasiment illimité (en restant dans le réseau routier)
    – Le coût de la voiture est certes élevé (5.000 euros / an) mais peut être vite amorti si on fait beaucoup de sorties dans l’année, à fortiori avec covoiturage.
    – La voiture individuelle a quand-même désenclavé le monde rural, et si vous enlevez la bagnole, vous éradiquez 99% du tourisme rural.
    – Lors de vacances au ski, je peux me rendre dans plusieurs stations à partir de la même base-vie, au lieu de devoir me cantonner à un seul domaine (c’est d’ailleurs la raison pour laquelle je priorise les très grands domaines alpins pour mes vacances de neige via le rail: Bourg St Maurice, Orelle 3 Vallées, Briançon, …)

    Le vélo a certes d’immenses avantages, et je l’utilise pour me rendre à mon travail, mais au bout d’un moment, il faut être pragmatique: dans une ville avec très peu de relief, le rayon d’action pratique ( = accepté par un travailleur) est de 15 km, pas plus. Dans une ville accidentée, ce rayon descend à moins de 3 km. Le vélo à assistance électrique est indispensable en zone accidentée.

    La voiture individuelle est actuellement sans concurrence pour une personne vivant en milieu rural, un pratiquant de sports de pleine nature, un prestataire ou un médecin à domicile, une personne qui aime aller en vacances à la montagne ou à la campagne.

     

     

  17. Vince

    Bonjour Jp Cassou,

    Tu as raison sur toute la ligne

    Mais tu oublies un point important. La pollution est aujourd’hui la cause de nombreux décès. Près de cinquante mille par an en France, selon un organisme gouvernemental. Et si l’on ne fait rien, il n’y aucune raison que ce ne soit pas un jour 10 fois plus. De récentes études démontrent également que la pollution est directement responsable de baisse du Qi chez les enfants les plus exposés.

    Pour rappel les transports sont responsables de près de 25% de la pollution globale (18 à 23% selon les associations de défense des automobilistes).

    Une autre étude récente démontre que les routes qui entrelacent les paysages découpent les écosystèmes naturels de façon dramatique.

    Enfin toi qui est amateur de spéléologie je ne sais pas quel âge tu as mais moi quand j’étais enfant je regardais les étoiles, aujourd’hui avec la pollution lumineuse due à nos routes et à nos multiples activités on ne distingue même plus la voie lactée dans une grande partie de l’Europe, alors faire de la speleo c’est encore possible mais l’astronomie ça devient difficile.

    Et quand on aura creusé des trois partout pour trouver des gaz de schistes pour alimenter nos pollumobiles que restera t il de tes belles grottes ?

     

     

     

     

  18. Bibinato

    Et bien, après un tel panégyrique de la déesse gnognole, comme l’appelent affectueusement certains ici, tout les lecteurs se sont barrés de Carfree, croyant s’être égaré sur le site de 40 millions d’automodébilistes…

    Je n’ai rien contre la liberté d’expression, mais lire de tels paragraphes sur un site dont le sous-titre est « la vie sans voiture », ça fait un peu mal aux yeux.

    Enfin, j’imagine que c’est parce que ceux qui savent faire sans, justement, sont partis se promener sur plus de 3 kms sur un vélo non assisté nucléairement et chargé de bagages, les inconscients.

     

     

  19. emmp

    Tu as bien raison, Bibinato : en lisant certains commentaires, j’ai vérifié l’adresse du site pour être sûre de ne pas m’être trompée.
    Ce que ces gens expliquent gentiment, et en toute sincérité, c’est qu’ils ne peuvent pas faire sans voiture ce qui est devenu possible après l’invention de la voiture. Autrement dit : si on estime avoir besoin de ce véhicule, c’est précisément parce qu’on a établi des habitudes qui reposent sur son utilisation. Donc, en bonne logique, on ne peut pas s’en passer pour accomplir les mêmes tâches.
    Si on trouve normal aujourd’hui d’aller loin, quand on veut, en emportant plein de choses, alors évidemment, la voiture va être jugée nécessaire. Parce que les habitudes ont été modifiées en profondeur, au point de chambouler toute l’organisation sociale (vie des petites communes, commerces, etc.).
    Quant à affirmer que le VAE est « indispensable » dans telle ou telle zone, franchement… Il y a plein de gens qui ne se savent pas capables de faire du vélo au quotidien, précisément parce qu’ils ne font pas de vélo au quotidien. Là encore, on tourne en rond.Je ne dis pas qu’on peut tous monter les Alpes matin midi et soir, hein, mais avec un bon porte-bagages, faire 20 km n’est pas un exploit.

  20. pedibus

    effectivement…

    la prochaine révolution copernicienne attendue est celle qui disqualifiera vitesse et temps de parcours en ville :

    quand les métriques piétonnes et vélo auront rapetassé nos infâmes villes étalées et informes…

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